8 février 2001 |
Sept tableaux, calqués sur autant de scènes à la fois banales et tragiques de la vie quotidienne. Les côtés noir et risible de l'existence, ses petites perversions, ses "couteaux intérieurs" qui volent bas. Proposée par la troupe de théâtre Les Corps étrangers, formée d'étudiants de la Faculté de médecine, la pièce Couteau Sept façons originales de tuer quelqu'un avec, qui a valu à son auteure, Isabelle Hubert, la Prime à la création 1998 du Fonds Gratien-Gélinas, est présentée du 8 au 11 février, à 20 h, au Théâtre de poche du pavillon Maurice-Pollack. Ce spectacle d'humour noir, mis en scène par Caroline Stephenson est porté par une douzaine de comédiens, incarnant une vingtaine de personnages. Au menu: l'enchantement, l'indignation, plaisir, l'amertume.
Un couteau dans l'eau
Lors d'une excursion en mer avec sa famille, une petite fille
balance à l'eau le précieux couteau d'un pêcheur
gaspésien. Vingt ans plus tard, assise dans le cabinet
d'un "psy", elle tente de découvrir les raisons
profondes qui l'ont poussée à poser un tel geste.
Pour élucider ce mystère, elle observe le monde
qui l'entoure. Elle nous transporte ainsi des toilettes d'un bar
branché au bureau d'une députée en région,
en passant par un bungalow de banlieue et une chambre de motel
aux Îles-de-la-Madeleine. Ces brèves incursions dans
la vie de gens ordinaires laissent voir les petites guerres qu'ils
se livrent au quotidien, les jeux de pouvoir qui guident leurs
relations, ainsi que la violence et le mal de vivre qui les habitent.
En somme, cette quête, à la fois noble et ridicule,
devient un prétexte permettant de poser un regard critique
sur notre société, celle du pouvoir, de l'individualisme
et des apparences.
Au-delà des problèmes de fond soulevés, ce
sont les scènes à la fois comiques et tragiques
vécues par les personnages, et le ton cru et cinglant des
dialogues qui accrochent, comme le fait remarquer Caroline Stephenson.
"Dans un des tableaux, une députée commande
un deux pour deux chez Saint-Hubert. Sa secrétaire et elle
se chamaillent alors gentiment pour déterminer qui aura
le privilège de manger la poitrine. Cette coquette dispute
prend vite l'allure d'une lutte féroce entre une chef et
sa subalterne. Dans cette scène, à l'instar des
autres, on passe du burlesque au pathétique, du bavardage
courtois à l' échange caustique."
Monologues et cauchemars
L'oeuvre d'Isabelle Hubert révèle aussi le caractère
pathétique que prennent parfois les relations humaines.
Le dialogue de sourdes entre une jeune fille anorexique et sa
mère, dans un des tableaux, en est un exemple patent, comme
le souligne Caroline Stephenson: "D'un côté,
on voit Maude se faire vomir et amincir, à l'aide d'un
rouge à lèvres, les formes de son corps, et de l'autre,
on entend sa mère, qui s'affaire aux préparatifs
de Noël, parler sans cesse de bouffe et implorer sa fille
de venir lui prêter main-forte à la cuisine. En un
mot, elles se parlent, sans s'entendre, elles vivent sous le même
toit, mais dans des univers totalement différents."
La séduction et la crédulité sont également
des thèmes abordés dans cette pièce. Pour
en traiter, l'auteure a choisi les toilettes d'un bar comme toile
de fond à une scène dégradante impliquant
un jeune homme et une jeune femme que le hasard a réunis.
"Roxanne rencontre un soir celui qu'elle croit être
l'homme idéal, souligne Marianne de Bonville, une des comédiennes.
Par naïveté ou par souci de plaire, elle accomplit
les quatre volontés de sa nouvelle flamme. Elle se sent
comblée. Mais la lune de miel tourne rapidement au cauchemar,
quand Alex, en apparence gentil et attentif, dévoile sa
vraie nature." Enfin, s'ajoutent à cette série
de tableaux des "info-pubs" dans lesquelles on démontre
les mille et une vertus du couteau. Tout est donc en place pour
plonger dans l'univers à la fois absurde et réaliste
d'Isabelle Hubert, et, surtout, pour rire un bon coup des travers
du monde.
On peut se procurer des billets en prévente, au coût
de 8 $, au Service des activités socioculturelles, 2344,
pavillon Alphonse-Desjardins, ou les soirs de spectacle, au coût
de 10 $. Renseignements: 656-2765.
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