8 février 2001 |
SUR LA MÉTAPHORE DU CLIENT À L'UNIVERSITÉ
La petite note d'Annette Paquot sur la métaphore du
client à l'université ( Au fil des événements,
18 janvier 2001, page 4) cherche de toute évidence à
soulever une discussion. Je m'empresse donc d'y apporter mon grain
de sel, tout en remerciant la directrice du Département
de langues, lingustique et traduction, de m'avoir permis d'approfondir
mes connaissances sur la métaphore et ses qualités,
et d'apprécier son érudition.
La définition du client, d'abord. Malheureusement, tout
le raisonnement ou le développement proposé s'applique
à la définition du consommateur et non à
celle du client. Le Petit Robert effectivement définit
le client comme "celui qui achète", mais ce
n'est qu'une extension ( depuis 1829) du sens premier qui nous
vient de l'Antiquité: "À Rome, Plébéien
qui se mettait sous la protection d'un patricien appelé
"patron" ".
Dans ce premier sens de client, il faut noter qu'il n'y
a aucun élément d'échange d'argent, aucune
action économique directe. On y parle de patronat: un patron
et ses clients. Il est plaisant de voir que tout au long de l'article,
Annette Paquot propose les qualités qui devraient être
recherchées par les clients. Je conviens qu'elles
ne sont pas ce que des consommateurs rechercheraient (bien
qu'inconsciemment c'est souvent l'objet de leur quête).
Alors, la définition moderne de client serait-elle
autre? Je me suis penché sur cette question. Pendant plus
de trente ans, j'ai cherché à exprimer la plénitude
du mot client. Ce n'est qu'en 1987 que j'ai proposé
ma définition et que je la soumets à tous les tests
depuis, sans jamais avoir à la modifier. Mes étudiants,
mes clients, à chaque session et dès son
énoncé, s'acharnent à l'attaquer jusqu'au
jour où ils ou elles savourent enfin tout son sens. L'évolution
de la société lui donne toujours plus de poids et
de valeur.
Voici donc ma définition: "Le client c'est celui
ou celle qui accepte de partager avec vous parce qu'il (ou elle)
vous reconnaît une réelle compétence dans
un domaine particulier, dans un but de croissance mutuelle."
Les deux principaux éléments de cette définition
sont: l'acceptation du partage et le but de croissance mutuelle.
Le ciment qui les unit est la reconnaissance d'une réelle
compétence dans un domaine particulier; cette reconnaissance
est mutuelle et la compétence de chacun empêche de
considérer l'autre comme inférieur, ou subordonné.
En d'autres mots, je n'accepte de partager avec une personne,
ou organisme ou toute autre entité que si je lui reconnais
quelque chose qui nous permette de grandir. Cette autre personne
physique ou morale doit aussi me reconnaître quelque chose
qui nous permette de grandir.
Cet échange dépasse le niveau économique,
sans l'occulter, ni le dénigrer. Il l'enrichit. Ce partage
des "compétences" aide les partenaires à
grandir. Appliquez cette définition à n'importe
quelle situation: elle conserve toute sa richesse.Pour toute
situation complexe et qui semble sans issue, appliquez cette définition,
et la solution apparaîtra.
Les clients de l'Université, maintenant. L'Université
a des clients. Ses clients viennent y chercher des compétences
qui, après analyse, semblent les plus compatibles à
leurs attentes. L'Université se doit aussi de reconnaître
à ses clients des compétences particulières,
à savoir la capacité d'apprendre et de transformer
ces acquis en actions positives pour la société.
La note d'Annette Paquot élabore sur ces sujets. Il faut
donc inviter ceux et celles qui sont intéressé(e)s
par la notion de client à relire son article en
gardant à l'esprit la définition de client que je
propose.
Alors, cet écrit deviendra encore plus éclairant,
métaphores en moins, et guidera les partenaires dans leur
recherche d'une croissance mutuelle.
QUI VA NOUS PROTÉGER CONTRE NOS PROPRES TECHNOLOGIES?
Le 23 janvier dernier, la Chambre des Lords en Angleterre
a approuvé un projet de loi qui permet le clonage de l'être
humain pour des fins dites "thérapeutiques".
On franchit ainsi un pas de plus vers la conversion de l'être
humain en un objet qui peut être manipulé au gré
des scientifiques dans leurs laboratoires. Le procédé
que l'on vient d'approuver vise à obtenir des cellules
- souches totipotentes qui pourraient être greffées
à un patient pour remplacer les cellules malades de certains
organes. C'est un objectif tout à fait valable. Toutefois,
pour obtenir ces cellules, on passe par la création d'un
embryon à partis de cellules prélevées sur
le patient. Cet embryon est créé dans le seul but
de fournir des cellules à ce patient, ce qui implique de
convertir un être humain en un simple fournisseur de pièces
de rechange pour un autre. Une fois cette fonction accomplie,
on le jette à la poubelle.
Cette dévalorisation de l'embryon humain nous atteint tous
personnellement. Si un humain de quatorze jours ou moins est un
objet jetable, nous le sommes tous. Ce qu'on n'accepterait pas
pour soi-même - être traité comme un simple
instrument au service du bien-être d'un autre - comment
pouvons-nous l'admettre dans le cas d'un autre membre de notre
espèce? Surtout lorsque celui-ci n'a pas encore de voix
pour crier ni de mains pour se défendre.
Qui donc va défendre les droits des plus vulnérables
si le seul principe est la loi du plus fort ? Qui va nous défendre
si nous tombons entre les mains d'un plus fort qui veut nous instrumentaliser?
Sont-ce les bioéthiciens ? Ils n'arrivent même pas
à s'entendre entre eux - ce qui ouvre la porte toute grande
aux scientifiques pour faire tout ce qu'ils veulent. Sont-ce les
politiciens ? Ceux- ci sont ballottés au gré des
vents changeants de l'opinion publique et des intérêts
commerciaux. Serait-ce peut-être seulement la voix de notre
créateur qui peut nous dire qui nous sommes et nous signaler
les limites infranchissables posées par notre nature ?
Comme aime à le rappeler Jean-Paul II, seul Dieu révèle
l'homme pleinement à lui-même. Si nous n'écoutons
pas la voix qui nous révèle notre vraie identité,
nous risquons de nous prendre pour un animal quelconque, pur objet
de la science biologique. Notre refus d'être traité
personnellement comme un objet ne révèle-t-il pas
déjà que nous sommes beaucoup plus que cela ?
|