Cette étape franchie, elle se tourne maintenant vers
Montréal, plus précisément vers l'INRS-Urbanisation,
où elle vient d'entreprendre un post-doctorat. "La
mobilité est souhaitée par le cursus universitaire,
précise-t-elle. Il est toujours bon de changer d'université."
Les femmes et le changement
La thèse de Marie-Hélène Vandersmissen
porte sur une période marquée par de profonds changements
sociaux et économiques. La place croissante occupée
par les femmes sur le marché du travail et l'explosion
du secteur tertiaire, c'est-à-dire des services, figurent
au nombre de ces mutations.
"Dans les années 1970, rappelle-t-elle, bien des
femmes commençaient à travailler, puis elles avaient
des enfants. Celles, nombreuses, qui vivaient en banlieue, se
retrouvaient captives, sans automobile parce que le conjoint
l'utilisait pour se rendre à son travail, et avec peu
ou pas de transport en commun. Elles prenaient donc les emplois
disponibles à proximité, des emplois bien souvent
à temps partiel, mais qui leur permettaient de rester
disponibles à leurs enfants."
Les données obtenues lors de deux vastes enquêtes,
menées en 1977 et 1996 par la Société de
transport de la Communauté urbaine de Québec (STCUQ),
ont servi de base à l'étude. Leur analyse a donné
les principaux résultats suivants. Les femmes ont maintenant
davantage accès à l'automobile familiale, mais
les hommes en demeurent les premiers utilisateurs. En ce sens,
on continue à voir plus de femmes que d'hommes se rendre
à leur travail en autobus ou à pied. En outre,
les femmes parcourent de plus grandes distances qu'avant pour
aller travailler, mais ces distances sont plus courtes que celles
couvertes par les hommes.
Ces résultats révèlent un gain de mobilité
global pour les femmes puisqu'elles parcourent une plus grande
distance, et en moins de temps, qu'elles le faisaient en 1977
pour se rendre au travail. Quant à savoir pourquoi les
femmes parcourent des distances plus courtes que les hommes,
les hypothèses abondent: revenus plus faible, difficulté
d'accès au transport, responsabilités domestiques,
etc.
Un écart persiste
Malgré le rattrapage observé, une mobilité
inégale persiste donc entre hommes et femmes, ce qui se
traduit par une aire d'emploi féminine réduite
comparée à sa contrepartie masculine. Marie-Hélène
Vandersmissen croit que la solution ne se trouve pas dans une
augmentation de la durée des déplacements et de
la distance parcourue et ce, afin d'élargir l'aire d'emploi.
Cette approche entraînerait, selon elle, une augmentation
de la pollution de l'air et amènerait les personnes à
dépasser leur "budget-temps". L'idée
de densifier les secteurs résidentiels et économiques
apparaît, quant à elle, difficilement réalisable.
Il est maintenant loin le temps où un professeur de l'Université
de Sherbrooke demandait à Marie-Hélène Vandersmissen
pourquoi elle ne ferait pas un doctorat. "Pour moi, se souvient-elle,
c'était quelque chose d'énorme." Son post-doctorat
devrait lui permettre de pousser plus loin certains aspects de
sa thèse de doctorat. "Je vais voir si je ne pourrais
pas monter une enquête parallèle dans le cadre de
la prochaine enquête de la STCUQ à l'automne, conclut-elle.
J'aimerais interroger les femmes qui seront rejointes afin d'avoir
une compréhension plus fine de leur mobilité."
YVON LAROSE
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