7 décembre 2000 |
Parmi combien de caribous le Père Noël choisit-il son attelage chaque année? S'il est assez facile de répondre à cette question depuis que les biologistes de la faune effectuent des inventaires aériens, il en va tout autrement avant les années 1950, alors que les seules données disponibles sur les effectifs de cette espèce proviennent des écrits - plus ou moins scientifiques - laissés par les responsables des missions et des postes de traite de la compagnie de la Baie d'Hudson. Deux chercheurs du Centre d'études nordiques annoncent cependant, dans le dernier numéro de la Revue canadienne de zoologie, qu'ils ont trouvé un moyen fiable pour estimer l'abondance relative des populations de caribous qui ont vécu dans le passé. Les effectifs historiques de ce cervidé seraient tout simplement écrits dans les branches et les racines d'épinettes noires! |
|
Coupe transversale d'une racine d'épinette noire montrant des cicatrices de piétinement datant de 1904 (1), 1914 (2), 1931 (3), 1973 (4) et 1988 (5). |
Sonder l'espace-temps
Les chercheurs ont mis leur technique à l'essai en
échantillonnant les arbres de trois formations d'épinettes
noires retrouvées dans l'habitat fréquenté
par le troupeau de la rivière George. Dans ces formations,
distantes d'au moins 100 km et âgées de plus de 200
ans, ils ont dénombré quelque 1 800 cicatrices,
dont trois dataient de plus de 150 ans! Les variations annuelles
du nombre de cicatrices suivent de près les tendances enregistrées
lors des inventaires aériens effectués depuis 50
ans. Les cicatrices ont également permis de confirmer la
plupart des données historiques disponibles et elles révèlent
même des fluctuations plus fines jamais rapportées
auparavant. "Si on trouvait des arbres plus vieux, on pourrait
remonter encore plus loin dans le temps et obtenir d'autres informations
inédites sur la dynamique du troupeau", signale Claude
Morneau.
Cette technique est plus qu'un simple outil de recensement historique,
ajoute le chercheur. "Les cicatrices de piétinement
offrent l'opportunité d'évaluer les fluctuations
de population du caribou aussi bien dans l'espace que dans le
temps. Ainsi, on pourrait utiliser cette technique pour déterminer
l'impact de la construction de barrages hydroélectriques,
de grands feux de forêts ou des vols militaires à
basse altitude sur la fréquentation de certaines régions
nordiques par les caribous ou sur les routes de migration qu'ils
empruntent."
|