9 novembre 2000 |
Le concept de résistance induite, une approche naturelle
et efficace, gagne du terrain dans le débat qui entoure
l'usage de produits chimiques polluants pour lutter contre les
maladies des plantes cultivées. Cette approche originale a fait l'objet d'un article de synthèse
d'une trentaine de pages dans l'édition d'avril 2000 de
la revue scientifique Phytoprotection sous le titre: "La
résistance induite: une nouvelle stratégie de défense
des plantes contre les agents pathogènes". La coauteure,
la professeure Nicole Benhamou, du Département de phytologie
et du Centre de recherche en horticulture de l'Université
Laval, a publié une cinquantaine d'articles scientifiques
sur le sujet dans des revues américaines spécialisées.
"Nos connaissances actuelles permettent d'affirmer que la
résistance induite, à la manière d'un vaccin
chez l'être humain, sensibilise une plante à répondre
plus rapidement et efficacement à la maladie, explique-t-elle.
Il s'agit donc d'un concept très prometteur pour l'avenir
et qui permettra, sans nul doute, de réduire considérablement
les doses massives de pesticides couramment utilisées et
qui polluent notre environnement." Induire la résistance chez une plante, cela consiste à
agir sur sa capacité naturelle à résister
aux substances toxiques émises par des microorganismes
pathogènes tels que virus, bactéries ou champignons.
Ce concept retient de plus en plus l'attention du secteur agroalimentaire,
un secteur d'activité confronté, entre autres problèmes,
à l'accumulation de résidus toxiques dans les différents
organismes de la chaîne alimentaire.
Un arsenal défensif complexe
Les réactions de défense des plantes sont complexes
et font appel à des mécanismes cellulaires, biochimiques
et moléculaires. Lorsque la stratégie de protection
se met en branle, la plante attaquée se lance dans la production
coordonnée et séquentielle de molécules défensives.
Tandis que les unes renforcent la paroi végétale,
les autres agissent comme agents antimicrobiens directs.
Jusqu'à présent, les chercheurs ont réussi
à induire la résistance chez des plantes de trois
manières différentes: avec une substance biologique
(le chitosane), avec des microorganismes bénéfiques
(rhizobactéries de type PGPR ou champignons antagonistes
tels Trichoderma harzianum et Pythium oligandrum)
et avec un produit de synthèse (le BTH).
Le chitosane est un polymère linéaire que l'on retrouve
en grande quantité dans la carapace des crustacés,
qui est la principale source de déchet pour l'industrie
de la pêche. Il s'agit d'un biofongicide naturel très
efficace envers le Fusarium oxysporum, un champignon qui
cause la pourriture racinaire des tomates cultivées en
serre et en plein champ. D'autres agents de lutte biologique sont
certaines souches de rhizobactéries de type PGPR. Plusieurs
études ont fait la preuve que ces bactéries diminuent
l'impact de plusieurs maladies racinaires en plus de promouvoir
la croissance des plantes. Les champignons antagonistes, eux,
attaquent directement l'agent pathogène à l'aide
d'enzymes hydrolytiques et d'antibiotiques. Ils agissent ainsi
de façon complémentaire à la résistance
induite. Quant au composé chimique BTH, il se distingue,
en raison de son action protectrice étendue, des autres
produits chimiques capables d'induire la résistance chez
des plantes.
Vers la lutte biologique intégrée
Les recherches actuelles sur la résistance induite
portent sur les composts d'origine végétale et animale.
"Les composts issus de déchets contiennent une flore
microbienne importante parmi laquelle se retrouvent beaucoup de
champignons et bactéries antagonistes, précise Nicole
Benhamou. Par ailleurs, il y a aussi dans les composts des substances
susceptibles de stimuler le "système immunitaire"
de la plante. La combinaison des deux mécanismes fait que
la protection des plantes envers diverses maladies est amplifiée."
Les travaux de recherche menés par Nicole Benhamou sur
le chitosane et les rhizobactéries bénéfiques
ont fait beaucoup de bruit dans le monde scientifique. Actuellement,
un des collaborateurs américains de la chercheure est en
voie d'obtenir l'homologation d'un produit à base de chitosane
et de Bacillus pumilus.
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