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9 novembre 2000 ![]() |
Les soupçons qu'entretenaient les chercheurs du Centre
de recherche en biologie forestière (CRBF) quant à
la proche parenté de l'épinette rouge et de l'épinette
noire viennent d'être confirmés. Les analyses génétiques
qu'ils ont effectuées sur près de 300 spécimens
provenant de différentes régions d'Amérique
du Nord démontrent que l'épinette rouge serait une
descendante directe de l'épinette noire. Elle serait, de
plus, la benjamine des conifères d'Amérique du Nord
puisque son apparition serait survenue récemment, à
la faveur de la dernière glaciation.
En comparant 26 séquences d'ADN des deux espèces,
Martin Perron, Daniel Perry, Christophe Andalo et Jean Bousquet
ont établi que la diversité génétique
de l'épinette rouge était plus pauvre que celle
de sa proche parente. En fait, l'épinette rouge ne possède
aucun gène qui lui soit unique; son matériel génétique
semble être un échantillon du génome de l'épinette
noire, signalent les chercheurs du CRBF dans un article paru dans
l'édition du 10 octobre de la revue scientifique américaine
Proceedings of the National Academy of Science. Par ailleurs,
le coefficient d'identité génétique entre
les deux espèces s'établit à 0,92, une valeur
qui dépasse celle rapportée pour la plupart des
autres espèces qui possèdent un lien de filiation.
Selon les chercheurs du CRBF, l'épinette rouge aurait vu
le jour à partir d'une sous-population d'épinette
noire qui aurait été isolée géographiquement
dans une zone exempte de glace, lors de la dernière glaciation.
Attention au petit-dernier!
La proche parenté génétique des deux
essences était déjà soupçonnée
parce que, dans les zones où elles cohabitent, elles produisent
régulièrement des hybrides. Le profil écologique
de l'épinette rouge appuie également l'hypothèse
de filiation, signalent les chercheurs. Comme elle est moins hétérogène
sur le plan génétique, cette espèce serait
moins adaptable. Ainsi, comparée à l'omniprésente
épinette noire, l'épinette rouge a une aire de répartition
géographique plus limitée en Amérique du
Nord, elle se retrouve dans moins de milieux et elle est moins
abondante.
Surexploitée dans la vallée du Saint-Laurent au
siècle dernier, l'épinette rouge subirait maintenant
les assauts des pluies acides et du longicorne brun, un insecte
nuisible récemment arrivé d'Europe. L'essence serait
en déclin partout où elle pousse à l'état
naturel. Selon les chercheurs du CRBF, la faible diversité
génétique de cette espèce la prédispose
mal à affronter de fortes perturbations dans son habitat
naturel. "Comme un dernier-né, l'épinette rouge
est toute fraîche sortie de la genèse biologique
et à ce chapitre, elle commande encore plus notre respect
et notre attention", concluent-ils.
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