9 novembre 2000 |
Selon l'Institute for Scientific Information (ISI), l'Université
Laval se classe au premier rang mondial au chapitre de l'impact
de ses publications en biologie moléculaire et génétique.
Dans l'édition de septembre-octobre de sa publication Science
Watch, l'organisme américain dresse la liste des universités
et centres de recherche qui ont produit les articles les plus
fréquemment cités dans les revues scientifiques
de génétique, de biologie cellulaire et moléculaire
et dans les revues multidisciplinaires comme Science, Nature
et Proceedings of the National Academy of Science. Dans
le monde de la recherche, plus un article est fréquemment
cité, plus son impact sur l'évolution de la science
est jugé marquant.
L'ISI a compilé les 200 articles les plus cités
chaque année, parmi ceux produits entre 1994 et 1998, dans
des revues scientifiques publiées entre 1994 et 1999. Ces
données ont servi à constituer une liste des 1 000
titres les plus marquants dans la mer de publications savantes
parues pendant cette période. Lorsque le nombre total de
références est considéré, le Howard
Hughes Medical Institute, le plus grand centre privé de
recherche aux États-Unis, arrive bon premier avec 244 articles
récoltant 76 554 références. Viennent ensuite
Harvard avec 122 articles pour 37 118 références
et le MIT avec 48 articles et 5 996 références.
À ce palmarès, l'Université se classe au
20e rang avec 7 268 références. Fait à signaler,
elle obtient ce total plus qu'honorable, qui la place au premier
rang des établissements canadiens, avec seulement 14 articles.
Lorsque le facteur d'impact (nombre de références
divisé par le nombre d'articles) est calculé pour
chaque institution ayant 10 articles ou plus, Laval se hisse alors
au premier rang au monde avec 519 références par
article. Elle devance alors le projet Généthon et
des établissements aussi réputés que le Salk
Institute, la Rockefeller University, le Sloan-Kettering Cancer
Center, le MIT, la John Hopkins University et le National Cancer
Institute des États-Unis. Le seul autre établissement
canadien parmi les 25 premiers est le Mount Sinai Hospital de
Toronto qui décroche la 10e place.
Six francs-tireurs
Les 14 publications de fort impact relevées par l'ISI
sont l'oeuvre de six chercheurs. Un article de Jacques Simard
et de Fernand Labrie, du Centre de recherche du CHUL, paru en
1996 dans Nature Genetics, a récolté 244
références. Un article de Jacques Côté,
du Centre de recherche de l'Hôtel-Dieu de Québec,
publié dans Nature en 1998, a obtenu 68 références
jusqu'à présent. Deux articles signés par
Guy Poirier et Serge Desnoyers sur la mort cellulaire, parus
dans Nature (1994) et Cell (1995), ont généré
1 777 références. Deux autres articles sur le même
sujet, publiés par Guy Poirier dans les Proceedings
of the National Academy of Science en 1995 et en 1996, ont
produit 456 références. Enfin, si l'Université
Laval a décroché le premier rang au palmarès
de l'impact des publications, elle doit une fière chandelle
à Jean Morissette du Centre de recherche du CHUL, qui a
signé huit articles, cités à 4 723 reprises.
"J'ai simplement eu la chance d'être au bon endroit
au bon moment, commente le bioinformaticien. J'ai surtout eu la
chance de participer à un projet emballant, le plus excitant
en 30 ans de carrière en recherche." Entre 1991 et
1995, Jean Morissette a été l'un des chercheurs
seniors du projet français Généthon, dont
l'objectif était de cartographier le génome humain.
Spécialiste de la génétique des populations
et de la statistique génétique, il s'est initié
à l'informatique "sur le tas". "Je n'étais
extraordinaire dans aucun domaine, mais je m'y connaissais dans
les trois, ce qui était rare en France au début
des années 1990. J'ai choisi de travailler avec Généthon
que je percevais ce projet comme la NASA du génome humain.
À titre de responsable de la bioinformatique, j'assurais
l'interface entre les spécialistes des différentes
disciplines, explique-t-il humblement. J'ai eu à bâtir
une usine de traitement de données parce que, pour cartographier
5 000 gènes en trois ans, les chercheurs ont travaillé
à un train d'enfer."
Le marathon de Généthon
Généthon a réalisé la carte totale
du génome humain. Cette carte a servi et sert encore aux
autres travaux de cartographie physique du génome et au
séquençage des gènes, d'où le nombre
élevé de références générées
par les publications de Généthon. "Les trois
quarts des gènes de la carte du génome humain que
les chercheurs américains ont dévoilée il
y a quelques mois sont, en fait, le travail des chercheurs de
Généthon", signale-t-il. La course à
la cartographie du génome humain, survenue dans les années
1990, a contribué à la croissance phénoménale
des publications dans ce domaine, souligne le chercheur pour expliquer
sa performance. "D'ailleurs, ajoute-t-il aussitôt en
coiffant son chapeau de statisticien, notre première position
au palmarès dépend d'un jeu de statistique qui nous
a favorisés. Nous avons peu de publications à fort
impact dans la liste et celles que nous avons sont très
souvent citées."
Les publications de Généthon constituent un élément
clé pour tout ce qui touche les travaux récents,
actuels et futurs portant sur le génome humain, estime
le bioinformaticien. "Je crois que Jean Weissenbach, le chercheur
derrière le projet Généthon, sera éventuellement
candidat au prix Nobel pour cette réalisation grandiose."
Et ses proches collaborateurs? Jean Morissette préfère
laisser la question en suspens...
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