12 octobre 2000 |
Tout "film de sous-marin" qui se respecte comporte
au moins une scène où les réserves d'air
atteignent un seuil critique forçant le commandant à
choisir entre la lente asphyxie de son équipage ou une
remontée en surface sous le feu de l'ennemi. Les cinéphiles
qui avaient l'habitude de retenir leur souffle pendant ces interminables
minutes respireront désormais plus à l'aise grâce
à des chercheurs de Laval qui ont mis au point un appareil
permettant d'accroître l'autonomie en air respirable des
sous-marins.
Ce système est un bioréacteur qui capte le gaz carbonique
de l'air ambiant et le transforme en bicarbonate. "C'est
l'accumulation de CO2 qui limite la durée de plongée
des sous-marins, explique l'un des chercheurs associés
au projet, Pierre-Mathieu Charest, du Département de phytologie.
Il existe déjà des systèmes pour capter le
CO2 dans les sous-marins mais le nôtre présente l'avantage
d'être peu coûteux et de prolonger considérablement
la durée d'immersion. L'autonomie d'un sous-marin pourrait
être portée de deux jours à deux mois!"
Ce bioréacteur fait intervenir une enzyme retrouvée
chez tous les êtres vivants mais dont le chercheur ne peut
révéler l'identité; comme toutes les personnes
associées au projet, il a signé un accord de confidentialité.
À cheval entre la recherche industrielle et militaire,
ce projet est financé par la firme EnviroBio qui a versé
plus de 300 000 $ jusqu'à présent à l'Université
Laval. Cette compagnie reçoit elle-même des fonds
de la Défense nationale.
Cap sur Toronto
La conception et la mise au point du bioréacteur mettent
à profit l'expertise des chercheurs Pierre-Mathieu Charest,
René Gaudreault (Médecine), Jean Ruel (Génie
mécanique), René Lacroix (Génie chimique)
et de sept employés. La Défense nationale suit de
très près les recherches. "Il ne s'agit pas
d'une étude exploratoire mais bien de contrats au terme
desquels il y a un produit à livrer, signale Pierre-Mathieu
Charest. On rencontre les gens de la Défense tous les six
mois pour faire le point sur l'évolution des travaux."
De toute évidence, les travaux progressent bien puisqu'un
prototype est présenté à Toronto cette semaine
à l'occasion d'une conférence de l'OTAN.
Le bioréacteur pourrait également se révéler
utile dans des secteurs non militaires mais tout aussi stratégiques
pour l'avenir de la planète. "On pourrait l'adapter
pour filtrer les émanations des usines qui produisent des
gaz à effet de serre ou encore les gaz d'échappement
des automobiles, estime le chercheur. Mais, on parle ici de travaux
à plus long terme."
Pour l'instant, le chercheur et sa collègue Louise Brisson,
du Département de biochimie et de microbiologie, espèrent
surtout obtenir une réponse positive à une demande
de subvention université-industrie adressée au CRSNG.
L'objectif de leur projet consiste à améliorer le
bioréacteur en produisant, par recombinaison génétique,
des enzymes plus efficaces et moins coûteuses. Le bioréacteur
utilise présentement des enzymes provenant du sang de boeuf
qui coûtent 450 $ le gramme.
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