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30 mars 2000 ![]() |
"Dans une société fondée sur le savoir, si la principale chose qui compte pour vous est le contrôle, vous passez à côté." "Le travail n'est plus ce lieu physique où vous êtes payé à l'heure. C'est maintenant un monde où vous êtes payé pour la valeur que vous produisez, sans égard au nombre d'heures que vous y avez consacré." "Assurer l'épanouissement du potentiel créatif de chaque citoyen, voilà le principal défi que devra relever le Canada pour que naisse et grandisse ici une société du savoir." Voilè quelques-unes des formulse chocs lancées par Charles Sirois, diplômé de l'Université Laval, chef de direction de Télésystème et figure de proue du secteur des télécommunications au Canada, lors d'une conférence tenue récemment dans le cadre des fêtes du 75e anniversaire de la Faculté des sciences de l'administration. |
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Photo Marc Robitaille |
"Dans une société fondée sur le savoir, si la principale chose qui compte pour vous est le contrôle, vous passez à côté." "Le travail n'est plus ce lieu physique où vous êtes payé à l'heure. C'est maintenant un monde où vous êtes payé pour la valeur que vous produisez, sans égard au nombre d'heures que vous y avez consacré." "Assurer l'épanouissement du potentiel créatif de chaque citoyen, voilà le principal défi que devra relever le Canada pour que naisse et grandisse ici une société du savoir." Voilè quelques-unes des formulse chocs lancées par Charles Sirois, diplômé de l'Université Laval, chef de direction de Télésystème et figure de proue du secteur des télécommunications au Canada, lors d'une conférence tenue récemment dans le cadre des fêtes du 75e anniversaire de la Faculté des sciences de l'administration.
Au coeur de la société du savoir qui est en train de naître se trouve la créativité. L'émergence de ce type de société entraînerait donc d'importants ajustements dans la façon de gérer l'État, les organisations et les entreprises, puisque la créativité constitue un processus donnant des résultats instables et non contrôlables. Ce caractère chaotique dérangerait plusieurs gestionnaires, mais ceux qui ne s'adapteront pas manqueront le bateau, prévient Charles Sirois.
La question de l'accès de l'ensemble des citoyens aux informations, aux formations et aux ressources, indispensables pour prospérer dans notre monde hyperconcurrentiel, préoccupe le patron de Télésystème: "Une société moderne ne peut pas se permettre de vivre dans un système où l'accès à la connaissance est plus ouvert aux riches qu'aux moins nantis. Nous ne pouvons pas nous permettre non plus que l'accès au savoir soit un phénomène strictement urbain." Le gouvernement doit donc, selon lui, faire de cet accès un droit fondamental et s'assurer que personne n'exerce de contrôle sur la circulation des idées.
Où en est le Canada ?
Le Canada possède-t-il le potentiel nécessaire
au développement de cette société du savoir
? De l'avis de Charles Sirois, le Canada se compare avantageusement
aux autres pays du G-7 dans la plupart des domaines identifiés
comme des facteurs de succès, notamment l'ouverture des
marchés et la solidité des infrastructures de transports
et de télécommunications. Mais son déficit
d'innovation, plus précisément son incapacité
à créer de nouvelles idées génératrices
de croissance économique, constituerait un handicap majeur
à sa compétitivité à long terme.
Comment combler ce déficit ? D'abord, estime Charles Sirois, le Canada doit s'engager résolument dans la globalisation, puis s'approprier la meilleure partie du savoir-faire des Américains. "J'ai beaucoup d'admiration pour le modèle économique américain. C'est une machine extraordinaire de production de richesses, qui fonctionne dans un contexte hautement démocratique. Mais, d'autre part, c'est aussi une société tendue et pas toujours constructive. Le Canada doit tendre vers le dynamisme du modèle américain, tout en préservant l'essentiel de son modèle, surtout au plan social. "
L'erreur des quotas culturels
Pour réussir cette transition vers l'économie
du savoir, le contrôle centralisé de l'État
doit céder le pas à la créativité
entrepreneuriale, fait valoir Charles Sirois. Et l'État
devra, ajoute-t-il, lâcher du lest sur le plan culturel.
À titre d'exemple, il souligne la politique sur le pourcentage
de contenu canadien imposé aux télédiffuseurs
canadiens: "Le problème est que ce genre de protectionnisme
impose des quotas artificiels qui ignorent les deux grands égalisateurs
de l'économie globale: la qualité et l'accès.
Je crois que sans eux, les gens seront tout de même attirés
par les émissions canadiennes, en raison de leur qualité
et de leur pertinence."
Du côté du monde des affaires, la réduction de la taille des entreprises constitue, selon Charles Sirois, l'indicateur le plus probant du passage à l'économie du savoir. Les grosses entreprises, qui représentaient jadis un élément clé de la structure sociale, tentent désespérément de réduire leur taille pour pouvoir jouer sur le terrain des concurrents plus souples. Les petites entreprises, souvent créées dans le cadre de partenariats stratégiques, seront plus performantes dans la nouvelle économie parce qu'on y encouragerait davantage les gestionnaires à prendre des risques et l'échec serait intégré au processus d'apprentissage. "Dans la plupart des grandes corporations, si un gestionnaire ne pense pas pouvoir relever le défi, il n'essaiera même pas de peur d'être associé à un échec. Les grandes entreprises ne disparaîtront pas pour autant, mais leur influence diminuera."
Les travailleurs devront aussi s'ajuster, fait remarquer Charles Sirois, en changeant, entre autres, leur conception du travail. " Les journées de 12 heures ont remplacé le 9 à 5 parce que c'est ce qu'il faut pour se maintenir dans un environnement hyperconcurrentiel. Au Canada notre défi est précisément d'adapter notre main-d'oeuvre à ce nouveau modèle. " Un havre de détente, cette société du savoir ? Absolument pas, affirme-t-il, puisqu'il faudra redoubler d'énergie pour éviter la disqualification à tous les niveaux.
MÉLANIE BRÛLÉ
Programme Études-travail
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