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25 novembre 1999 ![]() |
Les chercheurs Jacques De Guise et Guy Paquette ont analysé 697 émissions totalisant 390 heures et répertorié 10 376 actes de violence.
Les campagnes de dénonciation sur l'omniprésence de la violence à la télévision et les opérations de sensibilisation auprès des télédiffuseurs, qui ont été menées au cours des dernières années, ne semblent pas avoir suscité chez ces derniers une prise de conscience qui les a incités à passer aux actes... non violents.
C'est du moins ce que laisse transparaître une synthèse de quatre études sur la violence télévisuelle menées, entre 1993 et 1998, par les professeurs Jacques De Guise et Guy Paquette, du Département d'information et de communication de la Faculté des lettres. Les résultats de leurs recherches viennent d'être publiés sous le titre La violence à la télévision canadienne, 1993-1998 dans le numéro 9 des Cahiers-Médias du Centre d'études sur les médias de l'Université Laval.
La semaine rouge
"La violence est à la hausse à la télévision
canadienne, particulièrement la violence physique, ont
observé les chercheurs. Les émissions ne sont pas
réellement plus violentes (le nombre d'actes de violence
à l'heure est demeuré stable), mais les réseaux
diffusent un plus grand nombre d'émissions de fiction renfermant
de la violence."
Après avoir analysé une semaine d'émissions de fiction (films, téléromans, téléséries, émissions pour enfants) présentées en mars 1993, 1994, 1995 et 1998 par les réseaux CBC, CTV, Global, SRC, TQS et TVA, les auteurs constatent que Télévision Quatre-Saisons (27,6 %) et TVA (26,6 %) diffusent à eux seuls plus de la moitié des actes de violence physique dénombrés sur l'ensemble des réseaux canadiens de télévision. Ce sont TVA (24,7 %) et CTV (22,9 %) qui dominent cependant au chapitre des actes de violence psychologique. Par ailleurs, Radio-Canada se classe en tête de cette dernière catégorie, en ce qui a trait au nombre d'actes à l'heure (13,4), étant suivie par TVA (12,9), TQS (12,6), CTV (11,1), Global (8,7) et CBC (6,6).
Le corpus dans lequel ont puisé Jacques De Guise et Guy Paquette comprenait 697 émissions (télédiffusées entre 18 h et 23 h en semaine et de 6 h à 23 h les samedi et dimanche) totalisant 390 heures. Les chercheurs de Laval ont répertorié 10 376 actes de violence. "Le nombre brut d'actes de violence présentés est en augmentation constante, passant de 2 639 en 1994 à 2 806 en 1995 et à 4 014 en 1998. Cette croissance est plus marquée pour les actes de violence physique que pour les actes psychologiques; ce type de violence représente 32 % de l'ensemble des actes recensés", signalent-ils.
La grille "horreur"
En 75 pages, comprenant 43 tableaux et 26 figures, l'étude
des deux professeurs du Département d'information et de
communication nous fait syntoniser l'étendue du réseau
de la violence au petit écran. Il ressort, entre autres,
que:
- les réseaux privés diffusent beaucoup plus
d'heures de fiction (77,6 % du total) que les réseaux publics,
mais également davantage de violence: 88,3 % des actes
de violence physique et 79,7 % des actes de violence psychologique.
Qui plus est, le nombre d'actes de violence physique à
l'heure est plus élevé dans les réseaux privés
(21,6) que dans les réseaux publics (9,9), la quantité
d'actes psychologiques s'équivalant (10,3 actes à
l'heure au privé et 10 au public);
- la télévision francophone "accapare"
57,6 % de l'ensemble des actes de violence physique et 53 % des
actes de nature psychologique alors qu'elle représente
48 % du corpus;
- 77,2 % des actes de violence physique sont présentés
avant 21 h tandis que 54,2 % le sont avant 20 h;
- les films (58,4 %) et les téléséries (34,8
%) véhiculent plus de violence physique que les téléromans
(5,4 %) pendant que la violence psychologique est le lot, dans
l'ordre, des téléséries (38,2 %), des films
(37,2 %) et des téléromans (23,2 %);
- la majeure partie de la violence présente sur nos écrans
provient des États-Unis, c'est-à-dire 76,8 % des
actes physiques et 63,6 % des actes psychologiques.
Les chercheurs du Groupe de recherche sur la violence à la télévision sont sur le point de terminer le codage des émissions de l'année 1999. Les résultats de leurs observations devraient être rendus publics au début de l'été 2000. "Il s'agira cette fois d'un bilan sur les tendances qui aura approfondi plus finement la typologie de la violence à travers les actes et les personnages impliqués", a confié au Fil Guy Paquette.