11 novembre 1999 |
Fidèle à une tradition amorcée il y
a une vingtaine d'années, l'École d'architecture
de l'Université Laval a permis, l'été dernier,
à 24 de ses étudiants de parcourir la Suisse, l'Allemagne,
l'Espagne et la France, et de réaliser des projets architecturaux
à Cirié, en banlieue de Turin, en Italie, ainsi
que dans la vallée d'Aoste-Saint-Rémy-en-Bosse,
un petit village du Piémont. Cette expérience les
a enrichis, tant sur le plan académique que personnel,
puisqu'elle leur a donné l'occasion de concrétiser
leur savoir théorique, de s'imprégner de nouvelles
cultures et, aussi, de se découvrir eux-mêmes.
Ce stage à l'étranger, d'une durée de dix semaines, s'inscrivait dans le cadre de deux cours optionnels offerts par l'École d'architecture à ses étudiants ayant complété au moins deux années du baccalauréat. Notons qu'en plus des frais de scolarité, chacun a dû défrayer sa part des coûts supplémentaires liés au voyage. Jan B. Zwiejski, professeur d'architecture, Gianpierro Moretti et Anne Vallières, tous deux architectes chargés de formation pratique, ont coordonné ce projet qui comportait deux volets: un voyage d'étude architecturale de quatre semaines à travers une partie de l'Europe et six semaines de travail en Italie sur des problématiques architecturales réelles.
Une pratique débordant les frontières
Les responsables du projet désiraient avant tout offrir
la chance à des étudiants d'acquérir, du
point de vue académique, de riches connaissances, mais
aussi de leur transmettre le goût de découvrir et
de s'ouvrir sur le reste du monde. "Si on demeure limité
à son milieu, on reste pauvre", fait remarquer Anne
Vallières. D'autant plus que dans la perspective où
l'architecture devient une pratique internationale, "l'architecte
doit s'adapter aux autres cultures et aux autres milieux, s'il
veut percer ", renchérit Hugues Desbiens, un participant
au projet. La réalisation de travaux sur des cas réels,
supervisés par des intervenants du milieu, a donc été
privilégiée parce qu'elle représente, selon
ces derniers, "la meilleure façon de plonger dans
une autre culture".
Ce stage visait aussi, précise Gianpierro Moretti, à créer un climat d'échanges entre deux peuples distincts: d'un côté, le Québec qui baigne dans une culture nord-américaine avide de nouveautés et, de l'autre, l'Italie, un pays qui vit encore à certains égards dans des traditions anciennes. "Souvent, un regard nouveau sur un environnement permet d'innover", fait valoir Anne Vallières. D'ailleurs, ajoute-t-elle, le maire de Cirié, en Italie, a trouvé dans les projets d'étudiants de Laval une solution à un problème de circulation entre les voitures et les piétons qu'aucune étude en urbanisme commandée par sa ville n'était parvenue à résoudre jusqu'à ce jour. En effet, la façon dont les apprentis-architectes du Québec ont proposé, ingénieusement, de réaménager une allée piétonnière en la raccordant à la place du marché, n'avait pas été envisagée. "Les Italiens nous ont permis de mettre notre grain de sel ", explique Anne-Marie Laplante.
À Cirié, d'autres étudiants devaient choisir de travailler, seul ou en groupe, sur plusieurs types de projets, comme la mise en valeur d'une tour romaine perdue dans le tissu urbain, la réhabilitation d'une manufacture désaffectée, l'attribution d'une identité permanente à une place publique servant parfois de place de marché mais plus souvent de stationnement. C'est ainsi que Mélanie Pouliot a travaillé sur la mise en valeur de la Torre Romana.. Et proposé de dégager les habitations à proximité de la tour et de mettre ce monument historique dans une boîte de verre intégrée dans un musée. Les membres d'un groupe qui se sont penchés sur le cas de la manufacture ont, quant à eux, opté pour sa transformation en quartier résidentiel.
Des souvenirs et des connaissances
La participation à ce stage a exigé de la part
des étudiants une année complète de préparation.
En plus de suivre des cours d'italien, chacun a dû effectuer
une recherche sur une ville italienne où le groupe comptait
séjourner et présenter les résultats aux
autres avant le départ. De plus, chaque auteur d'une recherche
servait de guide dans la ville sur laquelle il avait travaillé.
"On voulait que les étudiants soient actifs sur le
terrain, qu'ils n'écoutent pas passivement un seul commentateur
décrire les monuments ", explique Gianpierro Moretti.
Les participants reviennent avec de beaux souvenirs, certes, mais aussi avec un bagage inestimable de connaissances. Visiter l'Europe permet, soulignent-ils, de concrétiser le savoir théorique. Entre autres, tout l'aspect de la transformation des villes au cours des siècles peut être abordé plus facilement. "La création de certaines villes remonte à l'Empire Romain et les étudiants n'ont pas la chance de voir ça ici", explique Anne Vallières. De plus, cette partie du monde recèle des trésors architecturaux hérités de plusieurs époques. "Quand on étudie en architecture, c'est important d'avoir une connaissance générale de tout ce qui s'est fait ailleurs en urbanisme", ajoute Anne Deschênes.
Les étudiants ne signalent qu'une ombre au tableau, la vie de groupe. C'est difficile de partager le quotidien de 24 personnes sur une aussi longue période, ont constaté certains participants. Lorsqu'on dort dans des chambres communes, le manque d'intimité se fait vite sentir. Par ailleurs, cette proximité leur a permis d'apprendre à mieux se connaître. "Nous avons beaucoup appris sur l'architecture, mais aussi sur nous même. On a découvert nos valeurs et nos limites", confie Mélanie Pouliot.
On peut voir les photos de voyage et les plans des projets des étudiants jusqu'au 12 novembre à l'École d'architecture, 1 côte de la Fabrique.