10 juin 1999 |
SOMMES-NOUS DES COCHONS?
Le cochon est réputé animal sale. Il n'est pourtant
que la pauvre victime de sa physiologie. Comme il ne possède
ni glandes sudoripares comme les humains ni halètement
comme le chien, pour lutter contre la chaleur de l'été
il doit utiliser son comportement et mouiller sa peau pour se
refroidir par évaporation. Pour cela, il se roule volontiers
dans la boue, d'où sa mauvaise réputation. Le pauvre
cochon n'a donc pas le choix d'être sale. Mais nous, avons
le choix.
L'autre jour je suis allé à travers notre campus, du pavillon Ferdinand-Vandry au Pavillon Pollack-Desjardins. Hélas, le trajet était constellé de papiers divers, paquets de cigarettes, bouteilles, feuilles et canettes d'aluminium, plastiques, capsules. Devant le pavillon Jean-Charles-Bonenfant une fumeuse disciplinée terminait sa cigarette en plein air. Au moins cent mégots-filtres décoraient l'abord immédiat. Je lui ai demandé comment elle allait disposer de son mégot. "Par terre", me répondit-elle. Courageusement à l'abri de mon anonymat de passant inconnu, j'ai abordé le respect de l'environnement. "Ça donnera du travail aux nettoyeurs" m'a répondu cette belle âme altruiste. Selon un raisonnement similaire on pourrait se donner pour devoir de commettre délits et crimes pour donner du travail aux policiers, de mettre le feu aux pavillons pour occuper les pompiers, etc. Réciproquement, on pourrait aussi créer des emplois pour des policiers avec mandat de distribuer des amendes à la minorité polluante qui dégrade l'environnement.
Trève de bêtises, l'Université ne roule pas sur l'or et nettoyer coûte cher. Il y a des manières plus intelligentes de dépenser son argent que de payer pour nettoyer. La façon la plus simple de conserver un environnement civilisé pour le bénéfice de tous est de garder, chacun pour soi, nos déchets et d'en disposer quand nous passons devant une poubelle. Lorsque chacun se sentira concerné le résultat sera spectaculaire et notre cadre de travail en sera embelli. Si nous ne le faisons pas pour le plaisir de jouir d'un environnement net et joyeux, faisons le pour notre réputation. Des étrangers en nombre sont chez nous en ce moment, rapporteront-ils chez eux l'image d'une Université Laval de cochons?
VOUS AVEZ DIT: GOUVERNEMENT "CHRETIEN"?
Je me pose, peut-être comme vous, de très sérieuses
questions sur la décadence morale de notre gouvernement
fédéral. Tout d'abord, au cours des dernières
années, ce "bon" gouvernement a détourné
graduellement par le biais de la Caisse d'assurance-emploi des
dizaines de milliards de dollars appartenant aux employeurs et
aux employés canadiens. Cette seule mesure a créé
une spirale de pauvreté sans précédent au
pays et ce, sur le dos des travailleurs saisonniers, des travailleurs
à statut précaire et des plus démunis de
la société. De plus, nous venons tout récemment
d'apprendre officiellement que ce même gouvernement (même
s'il niait les faits) menaçait ses fonctionnaires de congédiement
s'ils ne récupéraient pas, dans une période
précise, par tous les moyens possibles, légaux ou
autres, des millions de dollars d'éventuels fraudeurs.
À mon avis, c'est comme si la mafia elle-même demandait
à d'honnêtes policiers de faire appliquer ses propres
lois de façon légale dans la population (quand on
vole, on voit des voleurs partout).
Aussi, quand ce même gouvernement s'est glorifié publiquement de l'atteinte de son déficit zéro, réalisé en bonne partie par sa déresponsabilitsation sociale face à la pauvreté massive qu'il engendrait lui-même, il nous a montré ainsi sans le reconnaître le vrai visage de son "déficit humanitaire". Bien plus, quand l'ONU a dévoilé dernièrement des statistiques économiques accablantes sur l'accroissement de la pauvreté au Canada, notre "bon" gouvernement a continué de jouer à l'autruche en prétextant pour se justifier des nécessités économiques nationales, sans jamais avouer sa stratégie de toujours tenir en otages les plus vulnérables qui n'ont ni les ressources financières, ni les puissants lobbies politiques pour vraiment bien pouvoir défendre efficacement leur cause. C'est toujours le même langage politique à sens unique pour obtenir "des voix aux urnes qui rapportent aux riches" au détriment "des cruches sans voix qui se font vider sans pouvoir parler". On ne consulte que pour se faire élire.
Effectivement, quand le premier ministre d'un pays prend à la gorge pour l'étouffer un chômeur qui manifeste légitimement, ce geste démontre bien symboliquement le mépris d'une certaine idéologie, miroir d'une pensée unique, face à des citoyens anonymes coûteux, de plus en plus nombreux, qui sont un reflet contraire de l'image de ce que doit être un bon "contribuable" pour l'État. Curieusement, chez nous, plus on divise les pauvres entre eux en les marginalisant, plus on les multiplie en nombre et plus on les soustrait des statistiques, moins ils consomment et plus ils se reproduisent: ils sont toujours les grands coupables de tous les maux de notre économie, selon un État qui en engendre le plus grand nombre en les abandonnant de plus en plus à leur naissance. Au nom de l'économie mondiale et de son culte suprême du profit à n'importe quel prix, nouveau veau d'or moderne qu'on a déifié et auquel on sacrifie de plus en plus de victimes par la mondialisation de la pauvreté, notre gouvernement "chrétien" prêche ses vertus (appelées réalisations politiques) par un pharisaïsme éhonté de ses vices cachés (appelés nécessités économiques nationales). Au nom de la supposée "rentabilité" du pays, on appauvrit sournoisement davantage les plus vulnérables tout en prenant bien soin de les culpabiliser sur la place publique afin d'en faire des boucs émissaires chroniques et ainsi se donner bonne conscience.
Comment ce gouvernement, qui refuse son mandat de partager les richesses et qui fraude des avoirs économiques ne lui appartenant pas, peut-il faire respecter auprès des entreprises privées des lois du travail prônant l'intégrité, la transparence et la dignité humaine? On dit qu'on juge du degré de civilisation d'une société par sa façon de traiter ses citoyens les plus vulnérables. Peut-on, chez nous, à l'aube de l'an 2000, vraiment appeler progrès ce qui sert le profit et rend l'homme esclave? Pour terminer, j'aimerais citer ici les propos du grand écrivain libanais Khalil Gibran qui disait au début du siècle cette vérité très actuelle: "On donne le fouet et la prison aux petits délinquants et les plus grands honneurs aux plus grands des pirates".
Membre de la petite équipe du Rectorat d'où émanent et vers laquelle convergent d'innombrables communications de toute nature avec, d'une part, une communauté interne d'environ 40 000 personnes et, d'autre part, un environnement externe aux dimensions très vastes, allant du local à l'international, Christiane LeBel y a partagé la très lourde pression de tâches exigeantes où les erreurs ne sont pas permises. Et elle le faisait avec une parfaite aisance, une élégance qui ne caractérisait pas que son travail et un calme imperturbable. C'est avec un doigté et un savoir-faire sans pareils qu'elle accueillait les nombreux visiteurs qui se présentent chez le recteur.
Son bonheur dans son milieu de travail, et le climat de bonne entente qu'elle maintenait avec ceux qui l'entouraient, dénotent que pour elle, sa présence à l'Université était plus qu'un emploi et correspondait à un engagement personnel et à une participation à une oeuvre à laquelle elle croyait profondément. C'était un modèle de distinction, de discrétion, de sens du devoir et de respect des personnes.
Sa famille perd un être cher, cruellement enlevé. Ses proches au travail perdent une compagne dont le souvenir sera impérissable. La communauté universitaire perd un membre dévoué, discret et engagé qui a contribué, dans toute la mesure de ses moyens, au progrès et à l'avancement de l'Université.