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13 mai 1999 ![]() |
Comme un essaim d'insectes bourdonnants qui s'éveille à l'arrivée du printemps, et avant de se disperser et d'envahir le marché du travail, la nuée des 31 finissants en arts visuels de l'Université Laval présente l'exposition L'Invasion ("la plus grande en art actuel au Québec cette année", font-ils valoir) regroupant plus d'une centaine de leurs oeuvres, créées au cours de leur formation de baccalauréat en arts plastiques. Une belle occasion pour le public de visiter l'École des arts visuels, qui s'est parée pour l'événement de ses plus beaux atours, et d'admirer les créations de cette mouture inspirée qui fait mouche avec chacune des pièces. "Nous sommes en effet comme des mouches, certes un peu dérangeantes, mais essentielles à la chaîne alimentaire, et nous nous apprêtons à prendre notre place dans la société. De là le choix du titre de cette exposition collective que nous présentons au public avant de voler de nos propres ailes", explique Nancy Saint-Hilaire, présidente de l'Association des finissants en arts plastiques, au cours d'une conférence de presse annonçant justement le début de cette invasion.
Un événement dynamisant
"L'exposition de fin d'études des étudiants
au baccalauréat en arts plastiques est toujours pour nous
un événement heureux, rafraîchissant et dynamisant,
fait valoir Marie-Andrée Dorand, directrice adjointe de
l'École. Il s'agit d'une manifestation artistique d'importance,
tant par l'énergie et le temps investis par les étudiants
pour sa préparation, que par l'intensité de la démarche
de création de chacun de ces jeunes artistes. Nous sommes
très fiers d'eux et nous leur souhaitons de continuer à
s'affirmer dans la démarche artistique qui leur est propre
et d'oser prouver à la société québécoise
qu'elle a largement besoin des arts pour l'affirmation de son
identité". Le doyen de la Faculté d'aménagement,
d'architecture et des arts visuels, Claude Dubé, tenait
quant à lui à faire le parallèle entre cette
colonie d'étudiants qui s'apprête à déployer
ses ailes et l'institution qui, elle aussi, continue à
déployer les siennes. Au cours des dernières années,
dit-il, l'École est passée par différentes
mutations et a tissé des liens importants avec ses partenaires
naturels. Aujourd'hui, poursuit-il, l'École des arts visuels
constitue la figure de proue de l'Université Laval au centre-ville.
Dix salles en enfilade
C'est donc à travers un circuit d'une dizaine de salles
fraîchement repeintes et réaménagées,
nommées tantôt "Suspension", "Nuevo
Mundo", "Terre infinie", "Cabinet des estampes"
ou "Luxomanie", que les visiteurs peuvent déambuler
et admirer les créations de ces artistes talentueux. Ils
se frotteront à différentes formes d'arts, de la
sculpture à l'installation, en passant par la peinture
et la photographie. Dans l'atrium, au rez-de-chaussée,
ils rencontreront au passage les sculptures intrigantes de Laurent
Gagnon, faites essentiellement de bois et de métal. "Je
travaille avec la poésie du matériau, rappelle-t-il.
Une façon, en somme, de faire parler la matière,
tant par la qualité de celle-ci, c'est-à-dire dans
son état pur, sans peinture ni vernis, que par son aspect
référentiel. Nous vivons sous une pluie d'objets
et de matériaux oubliés. Sans vouloir à tout
prix me faire l'apôtre d'un message écologique, je
crois tout de même que ces objets ont encore beaucoup à
offrir." C'est ainsi que dans sa sculpture Cité
lumière, des centaines de pièces de métal
désuètes - des parties de machines à écrire,
en fait - s'élèvent en une tour imposante et majestueuse,
nous rappelant que les objets autrefois essentiels mais qui ont
aujourd'hui perdu de leur intérêt, peuvent retrouver
une place privilégiée au coeur d'une oeuvre artistique.
Les sculptures et les tableaux-objets éclatants de couleurs de Nancy St-Hilaire semblent, quant à eux, tout droit sortis de la nature. Cartes topographiques, images satellites et photographies de cellules, entre autres, constituent le moteur de son inspiration. "J'aime à utiliser les principes actifs de la nature dans ma création. Mes oeuvres se veulent des représentations géomorphologiques des espaces qui nous entourent. Elles peuvent tantôt exprimer l'érosion et les différents mouvements de la nature et tantôt imiter les organismes sous-marins." Rosalie Dumont-Gagné fait, elle aussi, dans la représentation de l'être vivant. Elle qualifie d'ailleurs ses sculptures en métal et en vert soufflé de "métaphores de l'humain". L'eau colorée contenue dans des récipients de verre et prisonnière de sa cage de métal rappelle les battements du coeur humain de même que les mouvements des corps organiques.
Interrogés sur leurs projets futurs, ces artistes ne semblent pas s'inquiéter outre mesure de la place que leur réserve le marché du travail. Certains d'entre eux songent à voyager à l'extérieur du pays afin de se frotter à d'autres cultures et de continuer à parfaire leur technique, d'autres rêvent de leur première exposition solo. Certains ont déjà des contrats qui les attendent, en scénographie notamment. Quoi qu'il en soit, la qualité et l'originalité des oeuvres exposées laissent à coup sûr présager d'un bel avenir.
Avant que cette colonie de mouches inspirées ne s'éparpille et ne sème ses créations à tous vents, vous avez rendez-vous à l'Édifice La Fabrique, au 255, boulevard Charest Est. L'exposition, qui se tient sous la présidence d'honneur de Louis Garneau, se poursuit jusqu'au 30 mai, du lundi au vendredi de 11 h à 17 h et du samedi au dimanche de 13 h à 16 h.