29 avril 1999 |
Contrairement à ce que peut prétendre une croyance fort répandue, la publicité sur l'automobile aurait peu d'impact sur le comportement des jeunes conducteurs au Québec.
C'est la conclusion à laquelle en arrive Guy Paquette, professeur au Département d'information et de communication de la Faculté des lettres. Les résultats de la recherche qu'il a dirigée, intitulée "L'impact de la publicité à risque sur le comportement des jeunes conducteurs", ont été rendus publics à l'occasion du Colloque sur la recherche en sécurité routière qui s'est tenu à l'Université Laval les 22 et 23 avril.
"Il est généralement postulé que les publicités axées sur les performances et la conduite sportive sont susceptibles d'influencer le comportement des jeunes conducteurs. Pareille relation de causalité n'a jamais été établie et pose des difficultés méthodologiques particulières", fait remarquer le chercheur de Laval.
Aussi ce dernier a-t-il décidé d'évaluer les répercussions, sur les plans cognitif et émotionnel, de divers messages publicitaires sur l'automobile ainsi que de messages de prévention produits par la Société de l'assurance-automobile du Québec (SAAQ) chez deux groupes de jeunes conducteurs, l'un étiqueté "à risque" et l'autre qualifié de "normal". Sa recherche a été menée avec l'aide du professeur Jacques de Guise, chercheur associé, et de Nathalie Beaulieu, professionnelle de recherche au Département d'information et de communication. Le projet a bénéficié d'une subvention dans le cadre du Programme de recherche universitaire en sécurité routière (PRSUR) dont les partenaires sont le fonds FCAR, la SAAQ et le ministère des Transports du Québec.
Comme à la télé
L'investigation s'est déroulée en deux étapes.
Il a d'abord fallu administrer un questionnaire comportant 84
questions à 174 étudiants universitaires pour en
arriver, entre autres, à établir un échantillon
final de 93 répondants incluant des conducteurs manifestant
une prédisposition au risque. Dans un second temps, deux
groupes de 12 sujets ont été constitués en
tenant compte de leur profil de conduite et de leur propension
au risque.
"L'étude a été menée en laboratoire dans un contexte visant à reconstituer l'écoute normale de la télévision sans que les sujets ne connaissent les objectifs véritables de leur participation au cours de laquelle ils ont eu à visionner individuellement un documentaire de 50 minutes entrecoupé de publicités", précise Guy Paquette. Celles-ci étaient divisées en quatre catégories: sécurité routière ("La vitesse tue" et "L'alcool au volant" de la SAAQ), automobile (Néon et Maxima), performance (Prélude et Sunfire) et autres (huit annonces diverses).
Les réactions émotionnelles des "cobayes" ont été évaluées par une mesure psychophysiologique, la réponse électrodermale de conduction. Les effets cognitifs ont pour leur part été examinés au cours d'une entrevue postexpérimentale où l'on a notamment eu recours à la méthode des réponses cognitives pour expliquer le mécanisme d'acceptation ou de rejet des publicités présentées.
Peu de différence
"L'analyse des principaux résultats ne permet
pas de soutenir les hypothèses étudiées,
entre autres celle supposant que les publicités automobiles
axées sur la performance exercent un renforcement des attitudes
néfastes à la sécurité routière
chez les jeunes conducteurs déjà prédisposés
à adopter des comportements à risque, juge Guy Paquette.
On n'observe que peu de différence entre les sujets du
groupe contrôle et ceux du groupe expérimental. L'impact
émotionnel des publicités évaluées
se révèle faible en regard des valeurs habituellement
retenues, mais ce phénomène peut être attribuable
à une familiarité élevée résultant
des expositions antérieures."
Aux dires du chercheur du Département d'information et de communication, les sujets "à risque" font montre de valeurs d'énoncés plus élevées dans le cas des publicités de la SAAQ (2,34 contre 2,08 pour les sujets normaux) et de celles des automobiles non axées sur la performance (2,26 par rapport à 1,18). "Contrairement à ce qui était attendu, les sujets "normaux" présentent des valeurs plus élevées (1,25) que les sujets "à risques" (1,07) pour les publicités automobiles axées sur la performance", de constater Guy Paquette.