11 mars 1999 |
Le Québec afficherait le plus bas taux au monde au chapitre de la contamination au plomb, au mercure, aux BPC et au DDT.
La qualité de l'environnement serait-elle un autre trait distinctif du Québec? On serait porté à le croire à en juger par une étude qu'une équipe du Département de médecine sociale et préventive vient de publier dans Archives of Environmental Health. En effet, Marc Rhainds, Patrick Levallois, Éric Dewailly et Pierre Ayotte ont mesuré, dans le sang des nouveau-nés, la concentration de quelques polluants tristement célèbres et, surprise!, les taux de plomb, de mercure, de BPC et de DDT obtenus comptent parmi les plus bas de tous les pays industrialisés.
Les chercheurs ont effectué leurs analyses à partir d'échantillons de sang provenant de plus de 1 100 enfants nés dans dix hôpitaux de dix régions du sud du Québec. "Les taux obtenus sont des indicateurs de l'exposition du nouveau-né aux différents polluants, explique Patrick Levallois. Cette valeur est elle-même un indicateur de la contamination de la mère et, par conséquent, de la population en général."
Selon les données disponibles, la concentration de plomb dans le sang des bébés est environ cinq fois plus faible que celle mesurée dans des pays comme la Belgique, l'Australie, l'Allemagne, le Japon, la Suisse et les États-Unis. Quant à la concentration de mercure, elle est de 2 à 80 fois inférieure à celle rapportée ailleurs dans le monde. Pour les BPC, les concentrations sont de 2 à 10 fois plus faibles qu'ailleurs alors qu'elles sont de 8 à 100 fois plus faibles pour le DDE, un dérivé du DDT.
Ces résultats dénotent une amélioration de la qualité globale de l'environnement dans le sud du Québec suite aux interventions visant à réduire l'usage de produits contenant ces polluants, estime Patrick Levallois. "Il y a une diminution majeure des concentrations de plomb dans la population depuis que le plomb est interdit dans l'essence", signale-t-il. Même scénario pour les BPC et le DDT dont l'interdiction dans les années 1970 commencerait à livrer ses fruits après un long délai attribuable à leur résistance à la biodégradation. Le mercure serait également moins utilisé depuis quelques années.
Certains changements dans les habitudes personnelles pourraient aussi expliquer les faibles taux de contamination observés. "On sait que le taux de plomb chez l'enfant est directement proportionnel à la consommation de cigarettes par la mère, souligne Patrick Levallois. La consommation d'alcool a aussi un lien avec la contamination au plomb. Mais, en général, les habitudes personnelles ont un effet plutôt faible comparé à l'environnement global."
La face cachée
Dans une perspective de santé publique, il est important de suivre
l'évolution de ces polluants, insistent les chercheurs. En effet,
ces contaminants franchissent allègrement la barrière placentaire
et leurs propriétés neurotoxiques peuvent affecter le développement
de l'enfant pendant une période cruciale. Le plomb, en particulier,
peut occasionner des problèmes neurologiques et éventuellement
provoquer des problèmes de développement et d'apprentissage.
Si le Québec obtient une bonne note pour la qualité de l'environnement dans le sud de son territoire, il en va tout autrement au Nord, ont révélé les travaux de l'équipe d'Éric Dewailly. En effet, en raison de la contamination de l'écosystème arctique par des polluants provenant des régions industrialisées, les Inuits du Québec peuvent revendiquer le triste titre de population la plus contaminée au monde.