4 mars 1999 |
Le satellite canadien SCISAT-1 emportera à son bord un projet scientifique auquel collabore le Centre d'optique, photonique et laser
Pierre Tremblay, professeur au Département de génie électrique et de génie informatique, est au septième ciel. En effet, l'Agence spatiale canadienne vient d'annoncer que le projet qu'il a présenté avec une vingtaine de chercheurs canadiens et étrangers est celui qui a été retenu pour la mission du satellite SCISAT-1. Ce satellite scientifique canadien, dans lequel 34 millions de dollars seront investis, doit être lancé en décembre 2001. L'équipement qu'il emportera à son bord servira à la réalisation de l'Atmospheric Chemistry Experiment (ACE). Ce projet a été retenu par l'Agence spatiale canadienne au terme d'un rigoureux processus de sélection. Sept projets scientifiques portant sur les relations Soleil-Terre, les sciences atmosphériques et l'astronomie spatiale étaient dans la course.
La mission ACE vise à mieux cerner les processus chimiques qui provoquent la réduction de la couche d'ozone au-dessus du Canada et de l'Arctique. "Cette recherche devrait nous aider à déterminer si le " trou " de la couche d'ozone de l'Arctique au printemps peut atteindre l'ampleur de celui de la couche d'ozone au-dessus de l'Antarctique", explique Pierre Tremblay. Il n'y a pas encore de trou au-dessus de l'Arctique - on parle plutôt d'une réduction de 45 % de la couche d'ozone au printemps - mais certains chercheurs prédisent que la chose pourrait survenir entre les années 2010 et 2020.
Un peu plus haut
On sait qu'au cours des dernières décennies, certains
polluants chlorés, notamment les CFC, ont contribué à
réduire l'épaisseur de la couche d'ozone dans l'atmosphère.
Un seul atome de chlore peut détruire jusqu'à 100 000 atomes
d'ozone avant qu'il ne se combine à un autre gaz et perde son pouvoir
destructeur. Selon les estimés scientifiques, la couche d'ozone a
diminué d'environ 6 % au-dessus du Canada en 20 ans. Cette situation
crée une certaine inquiétude parce que la couche d'ozone filtre
les rayons ultraviolets (UV-B) du soleil, réputés pour causer
des cancers de la peau et des cataractes. Bien que les CFC soient interdits
depuis 1996, il faudra de nombreuses années avant que la couche d'ozone
ne retrouve son état antérieur, estiment les scientifiques.
Comme la dynamique de la couche d'ozone est difficile à étudier à partir du sol, les chercheurs ont proposé de prendre le problème de plus haut. L'instrument principal et essentiel de la mission ACE est un spectromètre à transformée de Fourier, un appareil servant à mesurer les composantes de la lumière. Les chercheurs l'utiliseront pour comparer la lumière du soleil captée à une altitude très élevée à celle captée après son passage à travers différentes couches de l'atmosphère. "La concentration des composés entre 10 et 100 kilomètres d'altitude pourra ainsi être évaluée", explique Pierre Tremblay.
Un premier prototype du spectromètre a été réalisé par Pierre Tremblay au Centre d'optique, photonique et laser (COPL) en 1998, avec la collaboration de la compagnie Bomem de Québec et des étudiants-chercheurs Jérôme Genest, François Bouffard et Caroline Stéphanie Turcotte. Les résultats ont été présentés à l'Agence spatiale canadienne en octobre dernier. Pierre Tremblay agira d'ailleurs comme responsable principal de l'instrumentation pour la mission ACE.
SCISAT-1 est le premier satellite canadien de sciences spatiales à être lancé depuis ISIS-2 en 1971. Il sera transporté par une fusée Pegasus XL, déployée à partir d'un avion modifié de la NASA. ACE est l'unique expérience qui sera jamais menée à son bord. L'Agence spatiale canadienne exige que la mission produise des résultats pendant au moins deux ans et aucun instrument ne doit flancher avant cinq ans. "Le Canada ne lance pas souvent de satellites scientifiques, observe Pierre Tremblay. Et comme il y investit 34 millions de dollars, il faut que ça marche."