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26 novembre 1998 ![]() |
CRI D'ALARME AU SUJET DU BUDGET D'ACQUISITION DE LA BIBLIOTHÈQUE
La Bibliothèque de l'Université Laval traverse une crise sans précédent. Son budget d'acquisition qui atteignait près de 6 M $ au cours des dernières années est passé cette année à 4 M $. Le Conseil d'administration de l'Université demande aux facultés de fournir 1 M $ et s'engage à donner l'autre million sous forme d'appariement. Pour chaque dollar provenant des facultés, elle donnera l'équivalent. Jusqu'à maintenant, quelques facultés ont répondu favorablement dans une proportion de 25 % (250,000 $). Cet effort est très important puisque, dans ces unités du moins, on pourra minimiser une partie des dommages. En ajoutant l'appariement à cette somme, le budget d'acquisition de la Bibliothèque passe de 4 M $ à 4,5 M $. Cela représente un manque à gagner de 1,5 M $.
Cette situation amène des conséquences extrêmement dramatiques. Une telle orientation nous ferait passer du 6e au 16e rang parmi les bibliothèques des 27 universités canadiennes qui offrent des programmes de 2e et 3e cycles. Serons-nous encore longtemps une grande université de recherche quand on sait la place accordée aux bibliothèques dans les classements du magazine Maclean's (Canada) et du Chronicle of Higher Education (Amérique du Nord)? Le processus d'accréditation de programmes et facultés par des organismes externes sera inévitablement compromis. Le rapport de la Commission d'orientation (mars 1998) propose d'"accroître le recrutement d'étudiants de haut niveau aux plans régional, national et international". L'appauvrissement de la Bibliothèque compromet cet idéal. Qui viendra étudier ou enseigner à Laval si la Bibliothèque n'offre plus un soutien adéquat à l'enseignement et à la recherche? Depuis 1994, la Bibliothèque supprime à chaque année de plus en plus d'abonnements à des périodiques de recherche. La situation actuelle amplifie ce mouvement. Cette année, la Bibliothèque procède à l'annulation de la moitié des abonnements qui lui restent et réduit dans une proportion encore plus forte les achats de livres et autres documents.
La formule d'appariement amène plusieurs facultés à exiger que leur contribution soit consacrée à des achats spécifiquement rattachés à leur domaine. La Bibliothèque consacre 20 % de son budget à l'acquisition de documents multidisciplinaires: journaux, encyclopédies, dictionnaires, données statistiques, films et vidéos, cédéroms, etc. Peut-on se passer de ces outils consultés abondamment et tous les jours par notre clientèle? Le budget consacré à l'achat des films et vidéos a été coupé de 55 % en 1997 et d'un tiers en plus cette année.
Au début des années 1990, l'Université a investi un montant substantiel dans les collections de la Bibliothèque. Le budget est passé de 3,6 M $ en 1990/1991 à près de 6 M $ en quelques années. Cela nous a permis de rattraper une partie du retard accumulé pendant la décennie précédente. Par contre, les publications scientifiques connaissent un taux d'inflation annuel de 10 % depuis deux décennies. Depuis 1986, le coût des abonnements aux périodiques a augmenté de 147 % et celui des volumes de 63 %. Au Canada, il faut ajouter la dévaluation du dollar et les taxes. On voit donc que ce rattrapage est insuffisant.
La situation actuelle ne peut plus durer. À l'instar du Comité conseil de la Bibliothèque, nous demandons avec insistance que l'Université maintienne au moins le budget d'acquisition de la Bibliothèque au niveau de 1997/1998. D'ailleurs, le Rapport d'évaluation du service de la Bibliothèque, remis au Comité exécutif de l'Université Laval le 25 avril 1996, présentait trois recommandations relatives au budget d'acquisition: 1, que soit poursuivi l'effort de rattrapage pour améliorer le fonds documentaire; 2, que les budgets d'acquisition soient maintenus au niveau actuel; 3, que le développement de la Bibliothèque inscrit à l'énoncé des priorités de la Campagne Défi soit maintenu.
Ces recommandations formulées par le Comité d'évaluation furent transmises au Conseil Universitaire à la séance du 11 juin 1996 et le Conseil d'administration de l'Université à la séance ordinaire du 19 juin 1996 (CA-96-94) en a fait la proposition et la résolution 4, "de maintenir la priorité budgétaire déjà accordée à l'acquisition des fonds documentaires et des collections." Et pourtant...
"L'État est la loi de la Liberté / Der Staat ist das Gesetz der Freiheit", a écrit Hegel dans Die Geschichte der Philosophie. Par-delà toute partisanerie, je suis extrêmement déçu de l'invraisemblable démagogie dont fait preuve Jean Charest depuis qu'il vise à devenir chef de l'État québécois. Il me semblait, depuis René Lévesque, et incluant même le Robert Bourassa post-1976, qu'on avait développé chez nous un haut sens de la crédibilité politique.
Si on excepte le refrain anti-souveraineté (d'un ridicule qui, en effet, ne trompe presque plus personne), on avait en général pour le reste, depuis une vingtaine d'années, cessé de dire n'importe quoi, n'importe comment. Or avec ce "jeune homme" de 40 ans, nous revenons littéralement... 40 ans en arrière dans les mentalités et les comportements - le cri, le salissage, le dénigrement, la fausse indignation et la mauvaise foi faisant de nouveau office d'idées et de projet politique.
C'est le simple citoyen en moi qui exprime ici sa tristesse et son désarroi, et non le souverainiste convaincu par ailleurs. M. Charest est affligeant. À telle enseigne que même s'il devenait subito un promoteur avoué de l'indépendance, je serais à tout jamais incapable, désormais, de lui accorder la moindre confiance. Ce bagarreur de bas-de-ceinture en fond de ruelles n'a pas l'ombre de l'envergure d'un chef d'État. Et, pour la qualité et l'intelligence du débat politique québécois, je le regrette bien sincèrement.
Il faut plus qu'une élocution correcte et un vocabulaire bien garni pour incarner, essentiel/le à l'État québécois, une femme ou un homme de grande noblesse.
UN NATIONALISME POUR TOUS LES QUÉBÉCOIS?
Lorsqu'il s'agit du nationalisme québécois, c'est un secret pour personne de dire qu'il ne jouit pas de beaucoup de sympathie et de soutien de la part de l'ensemble des anglophones et des allophones du Québec. La raison? Il y en a plusieurs. Mais la plus plausible réside dans sa dimension ethnique et politique.
En fait, le Québec d'aujourd'hui, en raison de la présence d'une minorité anglophone importante et du nombre sans cesse croissant des nouveaux arrivants issus des diverses origines ethniques et culturelles, n'est plus peuplé par une population homogène fortement francophone, comme il l'était il y a à peine quelques décennies. C'est en ce sens qu'il importe de repenser à la raison d'être du nationalisme québécois par rapport à l'ensemble de cette démographie hétérogène. Quelle est donc la forme de nationalisme québécois qu'il faut pour l'ensemble des populations du Québec? Pour répondre à une telle question, on me permettra d'avancer la proposition suivante.
Si le nationalisme québécois s'appuie sur la notion de l'appartenance démographique et territoriale et qui vise à défendre les intérêts communs du Québec et l'ensemble de sa population, un tel nationalisme jouit naturellement de l'appui de tous (francophones, anglophones et allophones). Quant à sa dimension culturellement francophone, c'est un fait qui va de soi. Quoi de plus normal, pour les francophones du Québec, que de préserver et de protéger leur langue et leur culture québécoises et de chercher à s'épanouir socialement et culturellement (comme le nationalisme québécois au temps de la Révolution tranquille, par exemple)? Personne ne conteste là-dessus.
Reste le nationalisme québécois dans sa dimension ethnique et politique, qui vise essentiellement à réaliser un Québec souverain (ou indépendant). S'il n'est pas à exclure, il doit être appliqué dans le sens d'un "choix personnel" par rapport à une "option politique" donnée, et non pas une manifestation nationale au sens unique par rapport à une seule "option politique". Car, s'il y a des gens qui sont partisans d'un Québec souverain, il y a aussi d'autres qui sont partisans d'un Québec francophone dans un Canada uni.
Quant à considérer les anglophones (pour ne pas dire les Anglais) comme des ennemis potentiels et à courtiser les allophones (à la manière d'un renard qui courtise un corbeau qui a un morceau de fromage dans le bec) avant de décharger sur le dos de ces derniers l'odieux fardeau de l'échec du référendum du 30 octobre 1995, une telle manière d'agir ne suscite que l'animosité des anglophones et des allophones. C'est cette forme de nationalisme qui est rejetée par l'ensemble des anglophones et des allophones du Québec et même par beaucoup de francophones, parce qu'elle frôle le nationalisme étroit ethnocentrique. Or, dans le contexte spécifique du Québec, le nationalisme étroit ethnocentrique ne contribue qu'à diviser les francophones en deux fractions: celle des gens qui s'ouvrent sur le monde et celle des gens qui pratiquent le renfermement sur soi. Il favorise surtout la méfiance des anglophones et des allophones vis-à-vis des francophones.
Enfin, c'est aussi cette forme de nationalisme qui est condamnée à tourner en rond, parce qu'elle ne jouit du soutien qu'un peu plus d'un francophone sur deux. En attendant, elle entraîne la vie sociale, culturelle et économique du Québec dans un climat de stagnation lamentable.
QUI, DE BOUCHARD OU CHAREST, DÉFENDRA LE MIEUX LES INTÉRÊTS DU QUÉBEC?
Monsieur Bouchard se dit le mieux placé pour défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Je me permets d'en douter... et je ne suis pas la seule... Comment un premier ministre qui préconise la séparation d'avec le Canada peut-il avoir l'esprit assez ouvert, pour faciliter le renouvellement de la fédération? C'est un non sens, une incohérence flagrante, puisque son option prône justement la brisure, le démantèlement du Canada! Il y a donc une fermeture systématique à toute négociation.
Il a intérêt à entretenir une confrontation continuelle, afin de justifier la séparation. Il se doit de tout faire, pour que ça ne marche pas. Le PQ a développé un antagonisme perpétuel et une lutte acharnée contre le gouvernement fédéral. Son objectif est, de prouver que la fédération ne fonctionne pas, et ensuite de tout faire pour le démontrer aux Québécois pas trop avertis. Dans ce sens, il pratique une opposition systématique, des tergiversations, des discussions stériles sur le vocabulaire en parlant de foyer culturel, de société distincte, de caractère unique.
Plusieurs Québécois en ont ras-le-bol. Ils ne se demandent pas chaque matin: "Qui suis-je?" A-t-on jamais vu un Américain discuter indéfiniment des questions suivantes: "Suis-je américain? Suis-je américain hispanophone, suis-je américain de souche ou d'ailleurs?" Ils ne perdent pas leur temps dans des subtilités de vocabulaire, mais ils bâtissent, construisent et développent leur pays. Voilà leur priorité, et ils réussissent car ils sont la première puissance mondiale.
La politique de la "chaise vide", pratiquée assez régulièrement par le PQ lors des discussions fédérales-provinciales, prouve que l'option séparatiste bloque tout effort de rapprochement, de consensus avec les partenaires provinciaux. Il ne faut pas croire que l'autre option laissera tout tomber pour s'enfoncer dans le statu quo éternel. Il y a aussi des "bons Québécois" qui peuvent défendre les intérêts du Québec, avec plus de chances de réussir, n'étant pas aveuglés par l'obsession de la séparation.
Donc, affirmer que, seul de PQ est compétent pour défendre les intérêts des Québécois dans la fédération est une fausseté, puisqu'il ne veut absolument pas que ça marche, et fera tout pour rendre crédible son option. Il s'acharnera à mettre des bâtons dans les roues.
Affirmer que, tout autre parti (le Parti libéral) est incompétent pour s'occuper des intérêts québécois parce qu'il est fédéraliste est un mensonge encore plus grand. Pourquoi? Parce qu'il suppose et insinue que l'option fédéraliste enlève tout esprit de revendication et de contestation de certaines politiques inacceptables pour le Québec.
Celui ou celle qui accepte de voir réalisera que nous avons obtenu des changements, et cela malgré le PQ qui s'est efforcé de les mettre en sourdine, de ne pas les proclamer trop fort. Car ça met de l'ombrage sur son projet. Les irritants, les difficultés, les conflits sont claironnés bien haut! Encore une fois pour justifier l'option séparatiste. Avez-vous déjà entendu un séparatiste affirmer que la fédération canadienne est une bonne chose ?