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12 novembre 1998 ![]() |
Un beurre modifié contenant moins de cholestérol et d'acides gras indésirables pourrait sortir des labos de la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation.
Selon le dicton, on ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre. Pourtant, des chercheurs de la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation sont en voie de démontrer qu'on pourrait avoir un beurre au goût de beurre, sans les problèmes de santé associés au gras du beurre, et ainsi pouvoir continuer à récolter l'argent du beurre. En effet, Armand Boudreau (maintenant retraité), Joseph Arul et Paul Angers ont mis au point un procédé qui permet de fabriquer du gras laitier modifié, contenant moins de cholestérol et d'acides gras néfastes pour la santé. D'ici quelques années, ce gras amélioré pourrait servir à la fabrication d'un beurre modifié ou de produits tels que des croissants, des biscuits et même des chocolats. Ce procédé fait présentement l'objet d'une demande de brevet.
La nouvelle a de quoi réjouir les producteurs et les transformateurs de lait puisque les consommateurs sont plus méfiants vis-à-vis les produits laitiers depuis que des études ont associé le cholestérol et certains gras animaux aux maladies cardio-vasculaires. D'ailleurs, deux grands organismes du domaine laitier - les Producteurs laitiers du Canada et Novalait - ont investi des fonds dans les travaux portant sur ce produit prometteur. Novalait vient d'ailleurs de financer un projet de trois ans qui devrait conduire à la mise au point de produits commercialisables possédant les propriétés visées. "Grâce au procédé, on peut diminuer de 90% le contenu en cholestérol du beurre", fait valoir Paul Angers.
Fabriquer un beurre modifié constitue un défi beaucoup plus complexe que de produire du lait écrémé ou du fromage léger. Alors que pour obtenir des produits maigres, il suffit de diminuer la quantité de matières grasses utilisées, dans le cas du beurre, il faut remplacer les gras indésirables par des gras possédant les propriétés recherchées. "Un beurre doit contenir au moins 80% de gras pour pouvoir légalement porter cette appellation", explique Paul Angers.
Les chercheurs doivent garder à l'oeil l'impact de ces substitutions sur la structure du produit; sa physico-chimie peut être altérée au point où le beurre se liquéfie à la température de la pièce! Le goût du beurre ne devrait pas être touché par ces transformations, prévoit Paul Angers. Par contre, le coût pourrait grimper de quelques sous le kilo.
Mieux que le beurre
Une équipe du Département des sciences des aliments et
de nutrition, composée de Hélène Jacques, Nathalie
Bergeron, Karine Thibault et Annie Gascon, a testé le produit mis
au point par leurs collègues sur un groupe de 21 personnes. Chaque
sujet était soumis, pendant une période de quatre semaines,
à un régime contenant soit du gras laitier normal (beurre),
de la margarine molle (du genre Becel) ou du gras laitier modifié.
Après un retour à une alimentation normale pendant six semaines,
les sujets étaient soumis successivement aux deux autres régimes.
Les mesures du cholestérol et des triglycérides sanguins effectuées chez les sujets au début et à la fin de chaque régime révèlent, sans surprise, que le beurre ordinaire ne produit aucun changement. De son côté, le régime margarine abaisse le cholestérol total, le mauvais cholestérol et l'apolipoprotéine B, un indicateur du risque de maladie cardio-vasculaire. Cependant, les chercheurs n'ont décelé aucun changement du côté des triglycérides. Enfin, le gras laitier modifié ne provoque pas de changement dans le cholestérol total mais il réduit les triglycérides de façon importante.
"Selon nos résultats, la margarine molle serait bonne pour les personnes qui ont des problèmes de cholestérol alors que le gras laitier modifié donnerait de bons résultats pour les gens qui ont un taux de triglycérides trop élevé, résume Hélène Jacques. Je pense qu'on peut encore améliorer les propriétés du beurre modifié mais il s'agit tout de même de résultats prometteurs."