8 octobre 1998 |
Le financement de la recherche médicale vivra un moment crucial à la fin octobre alors que les conclusions du Groupe de travail sur les Instituts canadiens de recherche en santé seront présentées au ministre Allan Rock
La croisée des chemins approche pour le projet d'Instituts canadiens de recherche sur la santé (ICRS). En effet, à la fin octobre, le ministre fédéral de la santé, Allan Rock, rencontrera le Groupe de travail qui planche depuis plusieurs mois sur le dossier des ICRS; c'est alors qu'on saura si le concept passe ou casse. "D'ici là, il faudra avoir atteint un consensus parmi nous. S'il n'y a pas de position d'unité devant le ministre, ce sera facile pour lui de nous dire que le projet est intéressant mais qu'il faudrait le retravailler et venir le présenter à nouveau une autre année", a déclaré le président du Conseil de recherches médicales du Canada (CRM), Henry Friesen, lors d'une visite éclair effectuée sur le campus le 1er octobre.
Le projet des ICRS, dont Henry Friesen est le principal promoteur, promet de chambarder toute la structure fédérale de financement de la recherche en santé. "Si nous maintenons le statu quo, dit-il, le CRM aura un budget qui augmentera de 20 millions de dollars d'ici trois ans. Si nous faisons de gros efforts pour accroître le financement, nous estimons que le budget grimperait de 90 millions. Avec les ICRS, c'est 950 millions de dollars (150, 300 et 500 millions) que nous demandons au gouvernement dans les trois prochains budgets."
Le grand coup
Si le président du CRM a décidé de faire cette
demande d'augmentation en apparence énorme - le budget du CRM est
présentement de 260 millions - c'est qu'il sent que le Canada doit
donner un grand coup de barre pour demeurer compétitif au plan international
en recherche médicale. Après trois années de vaches
maigres pendant lesquelles le budget du CRM a été amputé
de 10 %, le gouvernement a redressé le tir en 1998. Rien de miraculeux
toutefois puisque le budget a été ramené au niveau
de ce qu'il était en 1994, ce qui laisse le Canada loin derrière
des pays comme les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France.
Henry Friesen est convaincu que les ICRS constituent la voie d'avenir pour la recherche, pour la santé des Canadiens et pour la prospérité économique du pays. Les instituts, dont les contours demeurent encore flous pour le moment, rassembleraient des chercheurs fondamentaux, appliqués et cliniques des quatre coins du pays qui travailleraient à une problématique commune au sein d'un réseau. Il pourrait y avoir, par exemple, un institut sur le cancer, un autre sur la génomique, le vieillissement, la médecine générale, etc. Le nombre d'instituts n'est pas arrêté pour l'instant. L'échéancier de travail prévoit la mise en oeuvre des instituts dès juin 1999. Les détails sur le projet des ICRS devraient être disponibles sur le site web du CRM (www.mrc.gc.ca) dans la semaine qui vient.
Si le plan des ICRS passe la rampe, le CRM semble appelé à disparaître. "Le Conseil gère présentement 2 000 subventions et nous allons respecter nos engagements pendant la période de transition, a déclaré Henry Friesen. Par contre, à plus long terme, je verrais mal comment on pourrait justifier le maintien du CRM et des ICRS."
De 1% à 100%
Personne à Ottawa n'ignore qu'une forte proportion des Canadiens
souhaitent voir les surplus budgétaires investis dans des réductions
d'impôts et dans la santé. Le CRM, sentant que le fer était
chaud, a lui-même commandé un sondage, en août dernier,
dans lequel il demandait aux gens d'indiquer, parmi un choix de réponses,
comment ils utiliseraient une somme de 500 millions de dollars s'ils étaient
à la place du gouvernement. Les deux choix les plus fréquemment
retenus touchaient directement la santé. En effet, 75 % des répondants
consacreraient cet argent au régime d'assurance-maladie et 69 % augmenteraient
le financement de la recherche en santé. Seulement 11 % ont dit souhaiter
que le Canada laisse à d'autres pays le soin de faire de la recherche
médicale.
Par un heureux concours de circonstances, les conclusions du Groupe de travail sur les ICRS, dont sont membres le recteur François Tavenas et le professeur Michel G. Bergeron, seront présentées au ministre Rock pendant la Semaine de la sensibilisation à la recherche en santé. Au même moment, le CRM mènera une opération "J'appuie 1 % à 100 %" dans 71 hôpitaux canadiens dans le but d'associer la population à ses démarches pour générer de nouveaux fonds pour la recherche médicale. Les gens seront alors invités à expédier une carte postale d'appui aux politiciens fédéraux. "La campagne demande que 1 % des dépenses faites dans le domaine de la santé au Canada soit alloué à la recherche médicale, dit Marcel Chartrand, directeur des communications du CRM. Les gens pensent que, présentement, le Canada consacre plus de 4 % de ce budget à la recherche mais dans les faits, c'est environ 0,3 %."