11 juin 1998 |
L'interféron ne serait pas plus efficace qu'un placebo dans le traitement du cancer du rein à un stade avancé, révèle une étude publiée dans un récent numéro du New England Journal of Medicine. C'est la conclusion à laquelle sont arrivés le professeur Yves Fradet, du Centre de recherche en cancérologie et 18 autres chercheurs canadiens qui ont évalué l'efficacité de l'interféron chez une groupe de 181 patients souffrant d'un cancer du rein, découvert après que les tumeurs se soient propagées à d'autres parties du corps (métastases).
Le cancer du rein est le dixième cancer en importance dans les pays occidentaux. Environ 3 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année au Canada et 1 200 personnes en meurent. Le tiers des cas sont découverts une fois que le cancer a envahi des organes autres que le rein. La chimiothérapie, la radiothérapie et l'hormonothérapie donnent peu de résultats contre ce type de cancer de sorte que 50 % des patients décèdent au cours de la première année suivant le diagnostic et que seulement 10 % des patients survivent plus de deux ans.
Le système immunitaire réagit
L'évolution irrégulière des métastases du
cancer du rein, marquées par des périodes de stabilisation
et même de régression, suggère que le système
immunitaire parvient parfois à en contrôler la progression.
Cette particularité a incité certains médecins à
traiter les patients avec des produits qui stimulent le système immunitaire,
notamment l'interleukine et l'interféron. La Food and Drug Administration
(USA) a d'ailleurs approuvé l'usage de l'interleukine dans le traitement
du cancer du rein avec métastases sans qu'aucune étude avec
groupe témoin n'ait été réalisée. Les
essais cliniques (sans groupe témoin) menés avec l'interféron
ont produit des résultats encourageants quoique variables; dans l'ensemble,
jusqu'à 22 % des patients répondent au traitement (réduction
des métastases) et 7 % des patients répondent de façon
complète et durable (disparition des métastases).
Au terme de la première étude scientifique contrôlée sur l'utilisation de l'interféron dans le traitement du cancer du rein avec métastases, Yves Fradet et ses collègues constatent une réduction partielle ou complète des métastases chez 4,4 % des patients qui ont reçu de l'interféron contre 6,6 % dans le groupe témoin. Dans les deux groupes, la maladie a repris sa progression de façon notoire environ deux mois après le début du traitement. Les patients du groupe interféron ont survécu en moyenne 12,2 mois contre 15,7 mois pour ceux du groupe témoin.
"Ces résultats viennent nous rappeler l'importance d'interpréter avec beaucoup de précaution les résultats d'essais cliniques non contrôlés et l'importance d'avoir un groupe témoin lorsque l'efficacité d'un produit immunomodulateur est testée", concluent les chercheurs.