23 avril 1998 |
Les gens de la grande région de Québec consomment le même volume d'eau qu'il y a vingt ans mais ils s'abreuvent maintenant à différentes sources.
Le robinet constitue encore la principale source d'eau potable consommée par la population de la grande région de Québec mais 56 % des gens consomment maintenant, exclusivement ou à l'occasion, de l'eau embouteillée ou de l'eau filtrée. C'est de que révèle une étude pilote menée par des chercheurs de la Faculté de médecine et du Centre de santé publique de Québec auprès de 125 personnes, de 20 à 64 ans, résidant dans la grande région de Québec.
Chaque participant consommait en moyenne 1,6 litre d'eau par jour; de ce volume, 68 % est de l'eau du robinet, 23 % de l'eau embouteillée et 9 % de l'eau filtrée. Environ la moitié de cette eau est consommée nature (par exemple un verre d'eau); l'autre moitié est prise mêlée à une boisson (thé, café, jus) ou à des aliments tels que de la soupe par exemple. L'eau contenue dans les aliments est négligeable dans la consommation totale. Le volume d'eau consommée ne change pas selon l'âge des répondants mais les personnes âgées prennent davantage d'eau sous forme de boissons chaudes ou de soupes.
Les chercheurs rapportent également qu'il n'y a pas de différence significative dans la quantité totale d'eau consommée quotidiennement par les gens qui boivent l'eau du robinet (1,5 litre) et par ceux qui consomment de l'eau embouteillée ou de l'eau filtrée (1,7 litre). Par contre, ces derniers prennent deux fois plus d'eau sous forme naturelle (1 litre) que ceux qui prennent leur eau du robinet (0,5 litre). "Lorsque l'eau a bon goût, on la consomme davantage sous sa forme naturelle", explique simplement le responsable de l'étude Patrick Levallois, professeur au Département de médecine sociale et préventive. Autre tendance observée par les chercheurs: 25 % de la consommation d'eau a maintenant lieu à l'extérieur de la résidence. "Toutes ces données révèlent que les modèles utilisés dans les études d'exposition au risque comportent certaines lacunes, note Patrick Levallois. Ces modèles présument que les gens consomment toute leur eau à la maison et que cette eau provient du robinet. On voit bien que ce n'est plus conforme à la réalité."
Patrick Levallois, Nathalie Guévin et Robert Letarte de la Faculté de médecine et leurs collègues du Centre de santé publique de Québec, Suzanne Gingras, Benoît Lévesque et Jean-Philippe Weber présentent les résultats de cette étude dans le dernier numéro de la revue scientifique The Science of the Total Environment. "Il s'agit d'une étude pilote, prévient cependant Patrick Levallois, et les résultats doivent être analysés dans cette perspective." Pour confirmer les tendances observées, le chercheur souhaite reprendre l'étude à grande échelle avec des participants provenant de toutes les régions du Canada. La dernière étude pan-canadienne sur la consommation d'eau date de 20 ans et les choses ont bien changé depuis, estime-t-il.
"Il faudrait aussi s'attarder à la qualité de l'eau embouteillée. Les analyses indiquent qu'à la source, cette eau est de bonne qualité mais une fois rendue chez le consommateur on n'en sait rien. Il peut y avoir une forme de contamination si les contenants sont mal nettoyés." Une étude publiée en 1994 par Benoît Lévesque avait montré que le tiers des refroidisseurs d'eau contenaient des bactéries coliformes ou des bactéries pathogènes. Ces refroidisseurs étaient mal nettoyés ce qui favorisait la prolifération des bactéries et leur ingestion par des gens qui croyaient pourtant s'offrir une eau naturelle et pure.