23 avril 1998 |
LE STATUT DE LA LIBERTÉ
Visiblement, plus d'un parmi "nous" ne semblent pas comprendre
que le "nationalisme québécois" ne constitue pas
une cause (notamment celle d'une soi-disant "incertitude" politique
et économique, ainsi que le répète à satiété
et tout à fait erronément M. Jean Charest), mais bien plutôt
un effet. Si le Canada n'était si préoccupé d'étouffer
la moindre velléité de distinction du Québec, depuis
toujours l'idée d'indépendance serait demeurée aux
6 % de l'époque du rin... De ces chiffres initiaux à 40 %
en 1980, puis 50 % en 1995 (moins quelques poussières: dont les votes
frauduleux d'étudiants de Bishop's University...), on est enclin
à ne tirer vraiment aucun enseignement. Et le roc, par son "Canada
arm [e]" que déploie le parlement fédéral
(Stéphane Dion en guise de tête nucléaire, fût-elle
bientôt blonde et bouclée par substitution purement logistique),
s'en-tête (!), contre tout bon sens et la plus élémentaire
logique politique, à continuer d'empiéter sur les pouvoirs
des États constituants du pays. Or de fait, le nationalisme québécois
se dit très concisément dans la jolie formule de Jean Bouthillette
in son Canadien Français et son double: "Volonté de puissance
chez les grands peuples, le nationalisme, chez les petits, est une volonté
d'être."
États constituants, ou constitutifs, du pays. Là réside l'essentiel: dans cet acte-fondement et renié illico par l'un des conjoints, infidèle avant même que d'avoir aimé. Le Canada est depuis lors en sursis parce que en porte-à-faux avec lui-même. Il éclatera de n'avoir jamais existé, existé en conformité avec sa propre essence. Le Québec, faut-il le rappeler ad nauseam, est un "père" de la Confédération, non son fils, sa progéniture ou sa création. Et moins encore son serviteur ou son obligé. Le Canada détient ses pouvoirs par délégation des États fondateurs et de nulle autre source. C'est ce qui en fait très précisément une Confédération c'est-à-dire une réalité théorique sinon virtuelle. Le Québec est une entité temporellement, historiquement, juridiquement, constitutionnellement, politiquement et culturellement antérieure à cette création, seconde et imputable par définition. La préséance du Québec lui est impartie de droit et de fait. Fondamentalement. Voire ontologiquement, dirait même le métaphysicien.
Aussi, la désormais et insidieuse suprématie de l'"enfant" sur le géniteur constitue-t-elle en soi l'une des plus formidables arnaques et usurpations de l'Histoire contemporaine. Le pays des JiCi des Jean Chrétien et des Jean Charest est une monumentale mystification. Et on pousse l'inintelligence (ou la fraude, déterminités d'ailleurs nullement exclusives l'une de l'autre) jusqu'à prétendre que le Québec n'aurait pas le droit, ou très malaisément, de quitter... le fils. En termes concis: le peuple québécois a construit, avec un partenaire d'ascendance britannique, une maison qu'il croyait et espérait sincèrement conviviale. Or on l'a progressivement confiné à un petit studio au sous-sol sans fenêtres en divisant la propriété outre les deux territoires et un pouvoir central tutélaire maintenant au service de... lui-même en dix provinces... égales. Égales! Ce qui implique de facto la plus puissante des inégalités entre les deux peuples. L'assujettissement au nom même de l'égalité: That's canadian Democracy ! Tartuffe et Machiavel tout en un. Brillant certes, et peut-être même génial. Mais profondément malhonnête.
L'Indépendance du Québec est une formalité, le Canada l'ayant d'ores et déjà réalisée. Ab ovo.
RÉPLIQUE À YVON DALLAIRE
J'ai hésité avant de répondre à votre lettre ("Réaction d'un mâle", texte paru dans la section "Courrier" du Fil du 12 mars 1998) mais je me suis senti un devoir de le faire, car plusieurs de vos remarques me sont apparues insultantes, tant à mon endroit qu'à l'égard des femmes en général. J'ai toutefois pris le temps de bien réfléchir pour éviter de répondre sous le coup de l'émotion, comme vous semblez l'avoir fait.
J'ai été très surprise par vos commentaires. J'ai relu l'article initial par dans le Fil du 29 janvier et votre réponse à plusieurs reprises pour essayer de comprendre votre réaction. Je crois d'abord qu'il y a un malentendu, attribuable au fait que vous avez lu dans le Fil des événements non pas un texte que j'ai écrit, mais le compte-rendu qu'un journaliste a fait d'un de mes articles et d'une entrevue que je lui ai accordée. La nuance m'apparaît assez importante... Je ne fais pas ce commentaire pour blâmer le journaliste, mais pour remettre les choses en perspective. Par exemple, on peut penser que vous réagissez au titre de l'article ("Mâles en fuite") quand vous utilisez l'expression "femelles" dans votre dernier paragraphe. Or, je n'ai pas choisi ce titre et je n'ai jamais employé l'expression "mâle", que je trouve très péjorative dans ce contexte (tout comme l'utilisation du mot "femelle" d'ailleurs). Par ailleurs, vous réagissez vivement aux propos suivants rapportés par le journaliste: "Les deux membres du couple ont des habiletés à développer pour apprendre à mieux communiquer ensemble... mais surtout les hommes". Il est vrai que j'ai dit cette phrase en entrevue. Il aurait peut-être fallu mentionner cependant que la dernière partie était une boutade, accompagnée d'un grand éclat de rire...
Passons maintenant à des commentaires spécifiques. Vous vous emportez parce que j'ose dire que comme clinicienne, je me sens plus sensible aux femmes, plus proche de leur réalité. Où est le problème? Oui, je me sens plus touchée émotivement par les difficultés des femmes (peut-être parce que j'en suis une?). Par exemple, à chaque fois que je lis dans le journal qu'une femme a été assassinée par un ex-conjoint, je me sens profondément bouleversée. Quand un agresseur sexuel s'en tire avec une peine ridicule, je suis en colère... Cela ne signifie pas que je sois insensible à la souffrance des hommes. Tout ce que ça signifie, c'est qu'il m'est plus facile d'entrer en contact avec celle des femmes. Nous avons tous et toutes, comme thérapeutes, des préférences, des sensibilités particulières, des limites. C'est une réalité dont il faut prendre conscience puisque l'objectivité, si tant est qu'elle puisse être possible, commence par la reconnaissance de sa propre subjectivité.
Vous m'accusez par ailleurs de présenter les hommes comme des "gros méchants", seuls responsables des conflits conjugaux. Je me demande bien d'où vous tirez cette information, car je n'ai jamais prétendu cela. Je suis partie d'une réalité connue des cliniciens depuis longtemps et confirmée par la science depuis moins longtemps: les hommes malheureux, comparativement à leurs conjointes, ont plus tendance à se retirer, à s'échapper, lorsque survient un conflit dans le couple. Si vous désirez plus de détails sur ce que j'ai fait et dit, je vous suggère de lire deux articles que j'ai écrits, ou bien ma thèse (voir références en fin de texte). Vous y verrez alors que je n'adresse aucun blâme à l'égard des hommes (ni à l'endroit des femmes d'ailleurs!). J'émets cependant des suggestions, tant à l'égard des hommes que des femmes, afin qu'ils trouvent une meilleure harmonie dans leurs relations amoureuses. Ces suggestions proviennent à la fois des recherches antérieures dans le domaine, ainsi que de mes propres travaux et expériences. Par exemple, je suggère aux femmes d'apprendre à exprimer leurs demandes, plaintes et critiques de façon constructive, pour éviter d'entraîner le retrait de leurs partenaires. Je suis donc bien loin de "blâmer" uniquement les hommes...
Dans votre dernier paragraphe, vous dites que les hommes évitent peut-être de s'engager à fond dans leurs relations amoureuses parce que les femmes sont trop envahissantes. Vous auriez probablement beaucoup de plaisir à lire La déroute des sexes de Denise Bombardier, car elle y tient un discours semblable. Selon elle, les femmes demandent trop, sont trop menaçantes... Un psychologue américain (Neil Jacobson) disait par ailleurs il y a quelques années que les femmes doivent accepter ce qu'elles ne peuvent changer. Je suis en total désaccord avec ces points de vue. Vous avez probablement déjà entendu parler du double emploi (i.e. le fait que plusieurs femmes occupent un emploi rémunéré à temps plein et un autre, non rémunéré à la maison, à temps plein également)? Que proposez-vous aux femmes pour régler cette situation, de se taire et d'arrêter de demander à leurs conjoints de faire leur part des tâches domestiques et de l'éducation des enfants, afin de ne pas paraître envahissantes?
En terminant, je réitère ma suggestion de lire ce que j'ai écrit. De cette façon, vous pourrez vraiment savoir si vous êtes en désaccord avec mes idées. Si c'est le cas, c'est un droit fondamental que je ne saurais vous nier. Je me permets toutefois de vous rappeler que dans nos relations professionnelles comme dans nos relations amoureuses, il est possible d'exprimer nos désaccords sans être injurieux et tenter de dénigrer l'autre, comme vous l'avez fait à mon endroit en remettant en question mon intégrité scientifique. Je vous souhaite tout de même bonheur et harmonie, tant dans votre vie professionnelle qu'amoureuse...
Références:
Turgeon, L. (1996). Le rôle du pouvoir conjugal comme variable prédictive du retrait des hommes lors de situations conjugales conflictuelles avec leurs conjointes. Thèse de doctorat inédite. École de psychologie. Université Laval.
Turgeon, L., & Boisvert, J.-M. (1997). Le pouvoir conjugal et l'évitement des conflits chez les hommes. Revue Canadienne des Sciences du Comportement, 29 (2), 112-121.
Turgeon, L., Julien, D., & Dion, É. (1996). Le patron de poursuite/retrait: analyse des comportements des femmes et des hommes lors d'un conflit conjugal. Science et Comportement, 25 (1), 95-111.
MISE AU POINT
SUR LA RÉGION DES GRANDS LACS AFRICAINS
Le journal Impact Campus du 24 mars 1998 a publié une synthèse de la conférence organisée ici à l'Université Laval au pavillon Charles-De Koninck par le mouvement Alternative sur le thème de la "Région des Grands lacs africains". Cette synthèse a été signée par un Monsieur J. M. qui, par ces initiales, s'est gardé de s'identifier.
Dans le texte "Conférence mouvementée", en page 8 (voir les quatre dernières lignes de la synthèse présentée), Monsieur J. M. limitait la "région des Grands lacs africains" à ces trois pays que sont le Congo (ancien Zaïre), le Rwanda et le Burundi. Voici repris son propos: "La conférence abordait le thème de la violence et des crises qui ont secoué dernièrement la région des Grands lacs africains, région formée des trois pays que sont le Rwanda, le Burundi et le Congo."
Je formule ici deux remarques à titre de mise au point:
1. La première touche à l'affirmation même qui limite la "région des Grands lacs africains" aux trois pays susmentionnés. Cette affirmation de J. M. n'est pas juste. Et tous les Africains qui connaissent bien cette région et liront cette observation, conviendront avec moi là-dessus. Pour qui connait les Grands lacs africains, les pays attenants sont plutôt au nombre de cinq: le Congo, le Rwanda, le Burundi (ex-colonies belges et pays francophones), l'Ouganda, la Tanzanie (ex-colonies britanniques et pays anglophones).
Dire "pays des Grands lacs africains", c'est viser directement ces cinq pays. Cette réalité demeure, et toute argumentation contraire ne peut que succomber à la moindre vérification, même s'il arrivait qu'on adopte définitivement aujourd'hui cette nouvelle expression "région des Grands lacs africain " à peine couramment en usage. Je mets l'accent sur le terme "région", puisque c'est l'expression "pays des Grands africains" qui est habituellement d'usage courant, en raison de la référence expresse à la "Communauté Économique des pays des Grands lacs" (C.P.G.L) qui n'a regroupé dans ce cas précis que les trois anciennes colonies belges que sont le Congo, le Burundi et le Rwanda, sans inclure les deux pays anglophones attenants, eux aussi, aux Grands lacs, à savoir: l'Ouganda et la Tanzanie. Autrement dit, dire "région des Grands lacs africains", c'est dire "pays des Grands lacs africains", comprenant les cinq pays ci-haut mentionnés, et, dès lors, poser réellement l'équivalence, la synonymie entre ces deux expressions.
2. Ma deuxième remarque est de l'ordre d'une hypothèse. Admettons que l'on veuille bien, par cette expression "région des Grands lacs africains", exprimer un nouveau concept qui, du point de vue de sa quintessence, transcende l'espace géographique qui circonscrit les cinq pays concernés pour viser ou entrevoir un possible marché économique sous-régional, selon bien sûr ce qu'on laisse entendre actuellement avec, certes, toute l'ambiguïté, le flou et les ambitions suspectes inavouées qui accompagnent un tel projet. Ici encore, on ne peut faire l'économie de ces cinq pays que sont le Burundi, le Congo, l'Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie. Toute réduction de ce nombre de cinq pays, dans l'usage de l'expression "région des Grands lacs africains", "pays des Grands lacs africains" aliène forcément et complètement cette dernière et procède, dès lors, par voie de conséquence, d'une divagation et donc d'une cacophonie.
Cette mise au point sert à attirer l'attention de tous ceux qui veulent informer l'opinion publique universitaire ou canadienne en général sur une conception particulière, un point de vue précis inhérent à l'Afrique, sur l'importance de livrer - exigence d'objectivité scientifique oblige - une information sûre, bien vérifiée. Cela éviterait bien toute information non fondée et surtout éviterait à l'auteur de cette information de succomber dans le ridicule.
Ceci dit, j'espère que Monsieur J. M. en prendra bonne note.
IKONGA WETSHAY
Étudiant à la Faculté de théologie
APPEL EN FAVEUR D'UN CANADA UNI
Le Groupe Unity de Lunenburg est composé d'un nombre de résidents du comté de Lunenburg, Nouvelle-Écosse, qui sont reliés par l'amour pour le Canada et par une inquiétude profonde à l'égard de son bien-être. Les membres du groupe partagent aussi un amour pour le Québec né assez souvent des liens étroits et personnels avec des personnes dans la province. De là arrive, dans le débat au sujet de l'avenir, un désir profond de travailler avec les gens du Québec pour accomplir nos aspirations mutuelles dans un Canada uni.
Nous croyons que le Canada doit rester uni, qu'un aspect essentiel du Canada est la diversité culturelle fondée dans son histoire, et que la société du Québec, sa majorité francophone, sa culture et sa tradition de loi civile contribuent des éléments vitaux au caractère et à la qualité de la vie canadienne. Donc, nous appuyons tout effort pour assurer que la culture française fleurisse et reste partie intégrale à l'identité du Canada.
Nous croyons qu'une fracture dans la continuité géographique du Canada aurait des conséquences sérieuses pour l'esprit national de tous les Canadiens avec un impact particulier, matériel et symbolique, sur les provinces atlantiques. Nous nous inquiétons beaucoup du fait que ces considérations ont reçu si peu d'attention du public.Nous croyons enfin que le Canada a une position favorable et unique parmi les nations du monde et que le meilleur moyen pour tenir et améliorer cette position dans le vingt-et-unième siècle est de rester uni en gardant toute la diversité qui contribue à la croissance et au prestige du Canada.
Nous faisons donc un appel à l'action.
Les débats doivent être résolus par des négociations ouvertes et légales car autrement c'est le chaos. L'ambiguïté, le vague et la contradiction dans la rhétorique des débats du passé sont inacceptables parce qu'ils rendent impossibles de décisions valides.
Nous encourageons tous les participants à discuter franchement les problèmes, le options et les risques avec insistance toujours sur la clarté, la précision et l'honnêteté. En particulier, si un autre référendum arrive, la question doit être précise et posée d'une façon sans ambiguïté. Il faut établir d'avance les conditions sous lesquelles des négociations auraient lieu après.
Nous faisons appel au gouvernement fédéral de mener le débat avec détermination forte sous l'obligation constitutionnelle de préserver "la paix, l'ordre et le bon gouvernement". Le gouvernement doit en même temps chercher le conseil et l'appui des provinces tout en renseignant tous les Canadiens et Canadiennes afin d'avoir leurs contributions