2 avril 1998 |
Le ministre fédéral Stéphane Dion vient rappeler aux étudiants de Laval que le couple Québec-Canada a beaucoup à gagner en restant uni.
"En politique comme dans la vraie vie, le divorce est plus compliqué que le mariage. En fait, la question n'est pas tant de savoir comment le gouvernement fédéral pourrait retenir le Québec dans la fédération canadienne, mais bien comment le gouvernement québécois pourrait intégrer les institutions constitutionnelles, advenant une victoire des séparatistes."
Tel est l'un des messages qu'a livrés Stéphane Dion, président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, aux étudiants venus l'entendre, le 27 mars, dans une petite salle remplie à craquer du pavillon Alphonse-Desjardins. Organisé par le Club des Étudiantes et des étudiants libéraux fédéraux de l'Université Laval (CELFUL), ce "moment d'échange non partisan" a vu ce grand défenseur d'un Canada uni brandir la menace désormais classique des bureaux de poste fermés au lendemain d'un oui au référendum, ou pire, du passeport confisqué sans autre forme de procès. On aurait pu entendre une mouche voler dans la salle, tant les personnes présentes buvaient littéralement les propos de Stéphane Dion, qui s'est défini d'entrée de jeu comme "le ministre de l'unité canadienne"
"Pourquoi le Canada est-il la seule unité démocratique au monde à vouloir se séparer?", a lancé Stéphane Dion. "Ceux qui prônent la sécession avancent le fait que la fédération canadienne est trop centralisée, alors que c'est l'une des plus décentralisées au monde. D'autres disent que la langue française est menacée - c'est vrai dans certaines provinces - mais nos concitoyens anglophones n'ont jamais été aussi bilingues. D'autres affirment manquer d'autonomie en restant à l'intérieur du Canada et vouloir devenir une majorité. Face à toutes ces affirmations, je vous demande: pourquoi devrions-nous laisser détruire un pays reconnu internationalement pour sa qualité de vie et son taux de criminalité très bas? Le Canada n'est pas un pays parfait, je vous l'accorde; par contre, il fonctionne beaucoup mieux que d'autres."
Deux poids, deux mesures
Commentant la récente décision de Jean Charest de se porter
candidat à la direction du Parti libéral du Québec,
Stéphane Dion s'est dit heureux que "le jeu de la popularité
des personnalités serve l'option canadienne": "Jean Charest
possède des qualités personnelles évidentes ainsi qu'un
bon jugement. De plus, il connaît bien les forces du Québec
et du Canada. Il a compris que c'est en travaillant ensemble, au sein d'un
Canada uni, qu'on pourra faire avancer les choses." En revanche, Stéphane
Dion s'est montré beaucoup moins bienveillant envers Lucien Bouchard
qui, au lendemain d'un oui éventuel, "partirait au bout de quelqus
années après avoir été le responsable de la
sécession du Canada, laissant la République du Québec
au bord du gouffre économique". "Je ne voudrais pas que
l'importance des personnalités diminue le poids des choix fondamentaux",
a insisté Stéphane Dion.
Convaincu qu'il faut aider financièrement les étudiants "pour que le Canada reste compétitif", Stéphane Dion a rappelé que la création récente du Fonds canadien de dotation de bourses d'études du millénaire par le gouvernement fédéral constituait un exemple parmi tant d'autres des bienfaits du fédéralisme. "Actuellement, 28 $ sur 100 $ proviennent du fédéral. Dans quelques années, ce sera 40 $ ", a-t-il lancé, avant de souligner qu' "en bon patriote, Lucien Bouchard devrait cracher sur les milliards qui viennent d'Ottawa". "Avec la passion de la raison, on arrive à faire du millage en politique. Surtout, ne perdez jamais votre curiosité intellectuelle", a recommandé Stéphane Dion aux étudiants de Laval.