15 janvier 1998 |
L'holographiste Marie Andrée Cossette expose ses lumineuses photographies en trois dimensions au prestigieux MIT Museum de Cambridge.
Nous sommes en 1976, au moment où la grève des professeurs de l'Université Laval bat son plein. Faisant du "piquetage" avec ses collègues de travail, Marie Andrée Cossette, alors jeune professeure de photographie à l'École des arts visuels - où elle enseigne toujours - est abordée par un ami qui lui offre de visiter le Département de physique de l'Université. C'est là que Marie Andrée Cossette découvre le rayon laser et ses possibilités artistiques. À partir de ce moment, sa carrière prend un tournant différent: s'éloignant peu à peu de la photographie traditionnelle, elle devient la première artiste femme canadienne à expérimenter la photographie en trois dimensions: l'holographie. En 1983, elle est également la première à obtenir une maîtrise en Beaux-Arts, spécialité en holographie et photographie, de l'Université du Québec à Montréal. Littéralement envoûtée par son art, cette alchimiste de la lumière est devenue depuis une sommité en la matière. En témoigne sa participation à une importante exposition présentée jusqu'au 22 février au prestigieux Massachussetts Institute of Technology (MIT), à Cambridge, près de Boston.
Intitulée Unfolfind Lights -The Evolution of Ten Holographers, l'exposition regroupe les oeuvres des dix meilleures holographes du continent; cinq d'entre eux proviennent des États-Unis, trois d'Europe et une du Japon. Seule Canadienne à figurer à cette exposition, Marie Andrée Cossette y présente quatre oeuvres, dont deux ont été créées au début des années1980 (Intimate et Metamorphosis), tandis que les deux autres (Memoire et Hommage à Chagall) l'ont été à la fin de cette même décennie. Selon l'artiste, les pièces exposées illustrent à merveille l'évolution de son travail.
Un halo de mystère
"Au début de mes recherches, je m'appliquais à reproduire
fidèlement l'objet en trois dimensions, explique Marie Andrée
Cossette. Progressivement, je me suis éloignée de la simple
représentation pour me diriger vers une forme d'abstraction. Si les
couleurs sont devenues plus subtiles et plus étendues, les sujets,
eux, sont devenus plus symboliques. En fait, le déclic s'est produit
en 1988, à l'occasion d'un stage au Massachusetts Institute of Technology,
avec Stephen Barton: j'ai décidé de laisser tomber la technique
et d'être complètement à l'écoute du laser, pour
enfin laisser parler mon intuition."
À cet égard, Le Seigneur des Anneaux constitue un hologramme représentatif de cette période. Avec ses trois cylindres et ses lignes droites baignant dans des couleurs variant du bleu à l'orange - selon l'angle où il est abordé - ce tableau abstrait peint au rayon laser se situe à des années-lumière de l'hologramme classique imitant le réel. Présenté au MIT, l'Hommage à Chagall suggère pour sa part un étrange personnage roulant à bicyclette vers une destination inconnue. Enveloppée d'une lumière surnaturelle, l'oeuvre est véritablement électrisée d'une ligne rouge, dans sa partie inférieure. Tous ces hologrammes prêtent évidemment à interprétation, l'artiste laissant planer un halo de mystère sur son travail, préférant la souplesse de l'imagination à la rigidité du sens. Tout au plus dira-t-elle qu'elle laisse parler la lumière "afin que se révèle la vie": "Je trouve extraordinaire de travailler au laser, dit-elle. C'est un univers d'énergie incomparable qui me nourrit constamment."
Les îles de son coeur
Au cours des prochains mois, Marie Andrée Cossette fera la lumière
- c'est le cas de le dire - sur des photos prises dans les îles volcaniques
de Lanzarote et de El Hierro, dans l'archipel des Canaries, en Espagne,
l'an dernier. "J'ai pu y enregistrer d'impressionnants phénomènes
géologiques et des vues éblouisssantes, uniques au monde",
dit l'artiste, qui fera porter ce projet de création, intitulé
"Les îles de mon coeur", sur le thème du paysage
onirique. On sait d'ores et déjà que le public pourra voir
les résultats de cette réflexion luminescente au Musée
canadien de la photographie contemporaine, à Ottawa, du 20 mai au
13 septembre. En attendant, le public peut visiter l'exposition Unfolding
Lights qui se tient au MIT, jusqu'au 22 février. Rappelons enfin
qu'en 1990, Marie Andrée Cossette a créé l'Institut
holographique et médiatique de Québec, où elle enseigne
cet art qui la fait toujours vibrer, même après plus de 20
ans de découvertes et de travail acharné.