13 novembre 1997 |
Le cinéma québécois: un succès...au petit écran!
Si les films québécois sont boudés par les foules dans les salles de cinéma, il en est tout autrement des téléséries qui elles, attirent des centaines de milliers de spectateurs chaque semaine. En fait, nos cinéastes ont réussi à faire au petit écran ce qu'ils ont été incapables de réaliser au grand écran - accrocher le public - avec le résultat que les salons des chaumières sont davantage bondés que les salles présentant des films québécois. Ces téléséries made in Québec fonctionnent pourtant selon les structures hollywoodiennes, que ce soit dans les techniques de jeu ou de tournage. À leur tour, ces techniques refilent au public ces vieux mythes américains qui fascinent le monde entier, dont entre autres, l'égalité des chances entre les individus, la "réussite" pour ceux qui demeurent dans le droit chemin et "l'échec" pour ceux qui contrecarrent la loi.
Tel est l'un des constats qu'a dressés Paul Warren, professeur de cinéma au Département des littératures (maintenant retraité), lors d'un séminaire organisé récemment par la Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d'expression française en Amérique du Nord. "Le cinéma américain a représenté un remarquable instrument de cohésion pour les Américains, a par ailleurs souligné le conférencier. Aux débuts du cinéma aux États-Unis, ce sont les immigrants qui remplissaient les salles, devenant à leur tour porteurs de mythes. Ceci étant dit, le cinéma québécois d'avant les téléséries a déjà résisté à Hollywood - ce qui a fait sa force et sa grandeur - mais il a fini par tomber dans l'imitation."
Du bon jeu
Selon Paul Warren, l'émission Lance et Compte, présentée
à la fin des années 1980, constitue l'exemple parfait d'une
télésérie empruntant aux structures hollywoodiennes.
Mêlant la fiction et le documentaire, cette série se déroulant
dans le monde du hockey a connu une grande popularité, en partie
grâce à cette fusion - ou confusion - des genres. Ayant participé
au tournage d'une scène tournée au Colisée de Québec,
Paul Warren se rappelle de l'atmosphère enfiévrée qui
y régnait: "Il y avait là près de 12 000 spectateurs-acteurs
jouant le jeu, hurlant et applaudissant à la demande. Parmi la foule
se trouvaient de "vraies" vedettes de hockey. Toute distance était
abolie."
Plus près de nous, la populaire télésérie Omerta ("Le film que vous ne verrez jamais à la télé", dit la publicité) doit son succès populaire non seulement à une mise en scène dynamique, tournée à l'américaine, mais aussi au type de jeu des acteurs, là aussi tout à fait calqué sur le système de jeu des Américains. Bien qu'ils ne bénéficient pas de gros budgets comme leurs voisins du Sud, les Québécois doivent pourtant continuer à faire des films, mais selon leurs moyens, pense Paul Warren: "Il faudrait que notre cinéma s'installe sur petit écran de façon structurée. Par exemple, je verrais très bien la création d'un canal spécialisé à la télévision qui ne diffuserait que des films québécois. Et si on veut projeter du cinéma québécois au grand écran, qu'on le fasse dans les petites salles d'antan."