13 novembre 1997 |
Le Centre de recherche en infectiologie dispose maintenant d'un budget annuel dépassant les 8 millions de dollars. L'un des projets en cours, le "condom invisible", va lui donner beaucoup de visibilité...
D'importants investissements en provenance de la firme Infectio Diagnostic et du Conseil de recherches médicales du Canada (CRM) ont été annoncés ce matin, 13 novembre, lors de l'inauguration des nouveaux locaux du Centre de recherche en infectiologie (CRI). Pierre Coulombe, président d'Infectio Diagnostic, une compagnie mise sur pied dans la foulée des travaux du CRI, a annoncé que sa compagnie investira un montant de l'ordre de 10 millions de dollars sur trois ans dans le centre de recherche. Par ailleurs, le ministre fédéral Pierre Pettigrew et le président du Conseil de recherches médicales du Canada, Henry Friesen, ont annoncé que le CRI a obtenu le statut de groupe de recherche reconnu. L'organisme subventionnaire devrait verser la somme de 2,5 millions de dollars au CRI au cours des trois prochaines années. Grâce à ces fonds, le CRI disposera d'un budget totalisant plus de 24 millions de dollars sur trois ans pour la poursuite de ses travaux de recherche.
Fondé en 1974 par le professeur Michel Bergeron, qui assume toujours la direction du Centre, le CRI occupe maintenant des locaux fraîchement réaménagés au pavillon CHUL du CHUQ. Grâce à ces travaux, dont le coût est estimé à 600 000 $, le Centre dispose de 33 000 pieds carrés de plancher, répartis sur deux étages. Parmi les nouvelles installations se retrouve un laboratoire, à sécurité maximale, pour les études sur le virus du sida.
Cinquante nouveaux emplois
L'année dernière, le personnel du CRI totalisait 115 personnes
et son budget atteignait 4,1 millions de dollars. À la faveur d'un
vent de financement favorable, l'équipe du CRI compte maintenant
140 personnes et son budget a grimpé à 7,2 millions. "Ces
investissements permettront la création de 50 emplois dans la région",
estime Michel Bergeron. Le centre regroupe présentement 19 chercheurs
principaux, 12 chercheurs post-doctoraux, une quarantaine d'étudiants-chercheurs
au doctorat et à la maîtrise et des assistants de recherche.
"Le CRI est le plus important centre de recherche en infectiologie
au Canada et l'un des plus importants en Amérique du Nord, poursuit-il.
Notre approche est unique; notre champ d'études va du génome
jusqu'au patient, de la recherche fondamentale jusqu'aux travaux appliqués."
Les travaux de recherche du CRI sont financés à 60 % par le
secteur privé. La mise au point de trousses diagnostiques pour la
détection rapide des infections bactériennes constitue un
des volets importants et spectaculaires de leurs travaux.
Le "condom invisible"
Si la recherche en infectiologie a le vent en poupe, c'est que partout dans
le monde, les maladies infectieuses se portent bien. Dans les pays occidentaux,
la mortalité due aux maladies infectieuses a doublé depuis
les années 1950 et les antibiotiques, qui devaient libérer
l'humanité de ces fléaux, montrent de sérieux signes
d'essoufflement. "Les infections occupent le premier rang parmi toutes
les causes de mortalité, dit Michel Bergeron. Dix-sept millions de
personnes en mourront cette année, ce qui représente un décès
sur trois à l'échelle de la planète".
L'un des projet en cours au CRI vise le développement d'un gel pour prévenir la transmission du VIH et des autres MTS. Ce gel, auquel les chercheurs ont donné le nom accrocheur de "condom invisible", établit une barrière physique entre les muqueuses du vagin ou de l'anus et les micro-organismes pouvant être transmis pendant une relation sexuelle. Inodore, incolore et liquide à la température de la pièce, le produit se gélifie instantanément à la température du corps formant sur les muqueuses une membrane imperméable aux agents infectieux. "Il ne s'agit pas d'un médicament mais bien d'un moyen pour prévenir la transmission des MTS, précise Michel Bergeron. Des tests sont prévus pour déterminer si le gel permet également la prévention des grossesses."
Mis à l'essai chez des souris et des lapins, le produit a bloqué le passage des micro-organismes pathogènes sans causer de problèmes de toxicité. "Dans quelques mois, nous allons faire des essais chez des couples où il n'y a pas de risques de transmission de maladies afin d'en évaluer la toxicité et la tolérance, explique Michel Bergeron. Par la suite, si les résultats sont concluants, nous prévoyons le mettre à l'essai chez des prostituées qui n'utilisent pas le condom. Pour les tests contre le virus de l'herpès, les participantes seront recrutées au Canada et pour les tests contre le virus du sida, elles seront recrutées en Afrique ou en Asie."
Le chercheur estime que 500 millions de personnes seraient atteintes de MTS à travers le monde, dont 20 millions par le sida. De plus, chaque jour à travers le monde, plus de un milliard de personnes auraient une relation sexuelle. "En théorie, il existe donc un vaste marché pour un tel produit surtout lorsqu'on considère le pourcentage d'hommes qui ne veulent pas utiliser le condom."