11 septembre 1997 |
Les étudiants en médecine choisissent leur modèle de rôle parmi leurs professeurs-cliniciens
Malgré le pouvoir de séduction de la télévision, les finissants en médecine ne cherchent pas leur modèle de rôle parmi tous les docteurs Daniel Trudeau (Serge Postigo), Michèle Imbeault (Marina Orsini) ou Marcus Welby (Robert Young) qui peuplent les séries télévisées. Leurs modèles, leurs vrais modèles, existent en chair et en os et ils les côtoient quotidiennement pendant leurs années de résidence, révèle une étude que Luc Côté, professeur au Département de médecine familiale, a menée auprès de 400 finissants en médecine.
Le professeur Côté et ses collègues montréalais, Brigitte Maheux et Claude Beaudoin, ont sondé les coeurs afin d'identifier les modèles des finissants en médecine familiale et en spécialités médicales des universités Laval, de Montréal et de Sherbrooke. Leur premier constat: 85 % des étudiants ont au moins un modèle de rôle (role model) alors que 15 % n'en ont aucun. La majorité (52 %) des répondants identifient au moins trois personnes les ayant fortement influencés pendant leur formation. "La pluralité de modèles, c'est bien, dit Luc Côté. On a tous des qualités et des défauts et on admire les gens pour différentes raisons qui changent avec le temps. Ce qui me trouble, ce sont les gens qui disent ne pas en avoir. Comment développer son identité professionnelle si on n'est pas capable de trouver autour de soi des personnes qui nous inspirent?".
L'idole d'à côté
Dans la majorité des cas, le modèle est tout bonnement
un médecin, de sexe masculin, âgé de 50 ans ou moins,
qui agit comme professeur ou comme superviseur clinique et qui pratique
la même spécialité médicale que l'étudiant,
apprend-on dans l'article publié sur la question dans le numéro
de mai de la revue Le médecin de famille canadien.
L'apprentissage du rôle du médecin s'étale sur plusieurs années, signale Luc Côté, mais c'est principalement pendant la formation clinique que l'étudiant apprend à l'exercer. Dans le contexte de technologie et de surspécialisation des hôpitaux universitaires où "la dimension biomédicale de l'acte médical occulte souvent la dimension psychosociale du problème du patient", les enseignants-cliniciens font-ils de bons modèles? Pour le savoir, les trois chercheurs ont questionné les étudiants sur les qualités qu'ils appréciaient chez leur modèle. Résultat? L'expertise clinique, la simplicité, l'humanisme et les qualités de pédagogue du professeur viennent en tête de liste. Les finissants en médecine familiale, et surtout les femmes, apprécient plus que leurs collègues des autres spécialités les qualités humaines du professeur et son intérêt pour la prévention et la promotion de la santé.
La force de l'exemple
Les modèles exercent principalement leur influence en stimulant
les étudiants sur le plan professionnel et en influençant
leur façon de pratiquer la médecine. "Les enseignants
doivent prendre conscience qu'ils jouent un rôle de modèle
et réfléchir aux valeurs qu'ils transmettent. Ils doivent
s'assurer qu'il y a concordance entre leurs propos et leurs comportements,
dit Luc Côté. Certains sous-estiment l'influence qu'ils ont
auprès des étudiants, surtout pour l'apprentissage de la relation
patient-médecin où la force de l'exemple est prépondérante."
Cette remise en question du rôle du professeur déborde le cadre de la médecine, ajoute celui qui assume également la direction du programme de maîtrise en pédagogie universitaire des sciences de la santé. "Dans un contexte où l'enseignement devient de plus en plus sophistiqué et informatisé, il est pertinent de se questionner sur le rôle du professeur comme guide, comme motivateur et comme modèle sur le plan des relations interpersonnelles, où rien, heureusement, ne remplace un être humain."