4 septembre 1997 |
Des chercheurs démontrent qu'une intervention chirurgicale augmente les chances de grossesse chez des femmes souffrant d'endométriose
La lueur d'espoir créée par une chirurgie pratiquée depuis quelques années chez des femmes souffrant d'infertilité n'était pas un mirage. Dans la livraison du 24 juillet du New England Journal of Medicine, Rodolphe Maheux, du CHUQ (Saint-François d'Assise), Sylvie Marcoux et Sylvie Bérubé, du Groupe de recherche en épidémiologie, rapportent que le taux de grossesse augmente de 72 % chez des femmes infertiles à la suite de l'ablation de l'endométriose par laparoscopie.
Cette découverte, également annoncée par Rodolphe Maheux lors d'un congrès international de médecine, a été qualifiée "d'historique pour le domaine de la gynéco-obstétrique" par certains participants. "Les résultats sont très concluants, dit le médecin, de sorte que l'efficacité de la chirurgie ne peut plus être mise en doute."
Au Canada, on estime qu'entre 2,5 à 3,3 % des femmes en âge de reproduction doivent composer avec l'endométriose. Le problème se caractérise par la présence, sur les trompes et les ovaires, de tissus originant de cellules de l'utérus. "Le phénomène est causé par des menstruations rétrogrades, explique Rodolphe Maheux. Au lieu d'être évacuées lors des menstruations, certaines cellules de la paroi intérieure de l'utérus sont refoulées vers les trompes où elles se développent. Bien des femmes ont de l'endométriose sans le savoir et il n'y a pas lieu d'intervenir si elles n'éprouvent pas de problèmes. Cependant, chez un certain pourcentage de femmes, l'endométriose provoque des douleurs au ventre ou encore des difficultés à devenir enceinte. Entre 20 et 68 % des femmes infertiles sont atteintes d'endométriose."
L'ablation par laparoscopie de l'endométriose est pratiquée depuis quelques années dans les centres spécialisés mais les preuves en démontrant l'efficacité faisaient défaut. "Pour cette raison, il y avait beaucoup de variations d'un hôpital à l'autre, dit Rodolphe Maheux. Par exemple, à Dalhousie, on n'opérait pas et à Montréal ça dépendait des médecins. Moi, j'avais recours à la chirurgie parce que mon expérience me portait à croire que ça marchait."
L'étude des trois chercheurs de la Faculté de médecine vient trancher la question. Réalisée grâce au soutien financier (750 000 $) du Conseil de recherches médicales et de Santé Canada, la recherche a porté sur 341 Canadiennes, dont les deux tiers du Québec, recrutées dans 25 centres de fertilité. Les participantes souffraient d'endométriose minime ou légère et elles étaient toutes infertiles. Cent soixante-douze d'entre elles ont subi l'ablation de l'endométriose et, dans les 36 semaines qui ont suivi, 50 (29 %) ont eu une grossesse. L'ablation de l'endométriose, pratiquée par laparoscopie à l'aide d'une caméra et d'un laser, dure environ 20 minutes. Le taux de grossesse chez les femmes du groupe témoin (examen laparoscopique sans chirurgie) n'a atteint que 17 % (29 sur 169).
"Je pense que ces résultats vont définitivement changer la pratique médicale, estime Rodolphe Maheux. Il reste cependant un pourcentage élevé de femmes chez qui la chirurgie n'a aucun effet et nous poursuivons des travaux afin de savoir pourquoi." Un Congrès mondial sur l'endométriose, organisé par Rodolphe Maheux et son collègue André Lemay, aura lieu à Québec en juillet 1998. Une société internationale d'endométriose devrait voir le jour à cette occasion.