19 juin 1997 |
Le premier Colloque international sur l'avenir des biens d'Église a fait ressortir l'urgence d'une vision cohérente dans ce dossier patrimonial
"Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il y a désordre dans l'intervention gouvernementale. Pire, il y a fort à parier que les investissements massifs consentis par l'État le soient à fonds perdus si aucune vision cohérente ne vient les appuyer."
Luc Noppen a défendu la cause de la conservation des églises dans les villes-centres avec sa passion patrimoniale habituelle, à l'occasion du premier Colloque international sur l'avenir des biens d'Église, qui se tenait à l'hôtel Ramada Québec Centre-ville, les 5 et 6 juin. La rencontre, rappelons-le, était organisée par la Ville de Québec en collaboration avec le Centre d'études sur la langue, les arts et les traditions populaires des francophones en Amérique du Nord (CÉLAT) de l'Université Laval.
"Il est important d'arrimer les effets de la Loi sur les biens culturels et ses dispositions permettant l'engagement des municipalités en matière de patrimoine (la citation, la déclaration de site du patrimoine) et l'action de la Fondation du patrimoine religieux du Québec", a soutenu le professeur de l'École d'architecture, qui est également chercheur au CÉLAT et l'un des responsables scientifiques du colloque.
Des classes d'églises
Assis autour de la même table, en cette fin de matinée du vendredi
6 juin, son collègue Jean Simard, professeur au Département
d'histoire de l'Université Laval et membre de la Commission des biens
culturels du Québec, a souhaité pour sa part que les autorités
diocésaines et municipales s'entendent pour que les bâtiments
les plus significatifs, c'est-à-dire ceux qui répondent à
la fois aux critères de reconnaissance des experts en patrimoine
et des groupes d'appartenance, soient reconnus et protégés.
"En fin de compte, le seul patrimoine qui vivra, c'est celui que l'on
revendiquera. Il est comme la Loi 101: plus on le défendra, plus
il deviendra incontournable au regard des gestionnaires", a-t-il prétendu.
Dans le but de protéger le plus grand nombre possible de temples, Jean Simard va jusqu'à proposer la création de trois classes d'églises: celles qui relèvent totalement du patrimoine et qui sont intouchables, d'autres dont l'extérieur seul a une valeur patromoniale et se trouve protégé, une troisième classe "dont l'intérêt et le valeur fluctuent comme notre dollar". "Nul ne peut encore prédire l'hécatombe qui découlerait d'une telle proposition", devait-il souligner.
Pédagogie-la-charrette
Pendant que débats et discussions battaient leur plein, deux autres
activités, mettant à contribution architectes et étudiants
d'architecture, se tenaient en marge du colloque: une "charrette"
et un concours de modélisation.
Dans le langage de la profession, "faire charrette" est synonyme de travail intense en atelier, avec obligation de résultat. Cinq équipes, composées d'architectes, de stagiaires et d'étudiants et étudiantes d'architecture, se sont ainsi penchées, trois jours durant, sur le cas de cinq églises désaffectées de Québec. Les projets qu'elles ont soumis - et exposés dans l'église Notre-Dame-de-Grâce - devaient explorer le potentiel d'utilisation/réutilisation de ces bâtiments.
Deux des projets sont sortis gagnants ex aequo de l'exercice: l'un, prônant la reconversion socio-culturelle de l'église Notre-Dame-de-Grâce, présenté par l'équipe formée des architectes Pierre d'Anjou, Pierre André Marquis et Daniel Pearl, et des stagiaires Schohraya Spahis et Danny Langevin; l'autre, convertissant en hôtel l'ancienne chapelle des Franciscaines missionnaires de Marie, imaginé par l'équipe de Gavin Affleck, Marie Aubé (architectes), Jean-François Julien (stagiaire) et Guillaume Clément (étudiant).
Le concours de modélisation de l'église Notre-Dame-de-Grâce a couronné, de son côté, l'oeuvre de l'équipe constituée de Le Hoang Khanh, Anne-Marie Ouellette et Mathieu Paradis. Cinq étudiants et étudiantes de l'École d'architecture de l'Université Laval ont relevé avec brio le défi de taille qui leur était lancé: celui de créer une maquette informatique permettant d'explorer l'espace architectural de l'église, construite en 1925 et sur le point d'être désaffectée.