3 avril 1997 |
Profil
Alexis Turgeon a troqué cette année ses études de médecine pour les illuminations de la Course Destination monde.
Après avoir sillonné la planète d'est en ouest durant six mois, Alexis Turgeon est catégorique: le plus grand choc culturel qu'il a vécu au cours de son périple autour du monde est encore son retour au Québec, survenu à la fin du mois de février. "En mettant le pied à l'aéroport de Mirabel, je me suis senti heureux et triste en même temps, dit-il. Passé l'émouvant moment des retrouvailles, j'ai dû me mettre au travail afin de finir le montage de deux films, la Course en tant que telle n'étant pas terminée. Finalement, la réalité quotidienne a vite repris ses droits."
À l'instar des sept autres participants à la Course, émission présentée le dimanche soir à la télévision de Radio-Canada, cet étudiant de la Faculté de médecine a quitté le Québec en août dernier, pour partir à la découverte de ses terres promises. Premier arrêt: le Yukon, "le plus bel endroit du monde, avec ses milliers d'ours et de loups lâchés en pleine nature". Puis c'est le grand saut en Mongolie, dans le désert de Gobi, immensément peuplé de collines herbeuses. Deux ou trois films plus tard, Alexis se rend au Nord du Japon, dans la grande île de Sakhaline, réputée pour son climat froid et brumeux, avant d'atterrir à Vladivostok, en Sibérie. Brrr...
Coups de foudre
Viennent ensuite la Chine, le Sikkim, le Turkménistan et la Géorgie,
ces deux derniers pays étant d'anciennes républiques socialistes
soviétiques. En fin de parcours, le globe-trotter se rend en Afrique,
plus précisément en Ouganda, au Soudan et en Éthiopie.
Dernière destination: le Maroc, un pays qu'il connaît bien
pour y avoir vécu durant trois ans, son père ayant déjà
été coopérant pour un organisme humanitaire. Pourquoi
avoir choisi ces destinations plutôt que d'autres? Alexis Turgeon
n'en sait trop rien. Grand amateur de bandes dessinées, il affirme
avoir voulu voir de ses propres yeux certains pays découverts au
cours de ses lectures, comme par exemple le Sikkim. Dans ce petit état
himalayen de l'Inde, situé entre le Népal et le Bhutan, le
jeune homme a tourné un film sur le bouddhisme qui a d'ailleurs suscité
certaines réactions chez les téléspectateurs de la
Course. Sans vouloir régler ses comptes à cette doctrine religieuse,
Alexis y laisse entendre que la notoriété dont bénéficie
en Occident cette religion millénaire est peut-être surfaite
et pas aussi "pure" qu'on le croirait...
Ses sujets de prédilection? La vie, dans son plus simple appareil. "En Géorgie, j'ai fait la connaissance d'un homme de 103 ans qui gardait depuis 91 ans les ruines d'une église. J'avais beau lui poser des questions sur lui-même, sur l'importance de cette église dans sa vie, rien n'y faisait; il ne répondait pas à mes questions. Alors, je l'ai laissé parler." Quand on demande à Alexis Turgeon de parler du moment le plus fort de la Course, de cet instant où on se pince pour savoir si c'est vrai, il répond tout bonnement avoir vécu des moments intenses lors de ses nombreux voyages en taxi où il laissait son esprit vagabonder au gré de son imagination... et de paysages à couper le souffle. "Je me souviendra toujours de cet instant magique où, en plein désert de Gobi, dans une voiture toute bringuebalante, j'ai entendu les Colocs jouer à la radio..."
Les pas perdus
À côté de ces coups de foudre et aussi de toutes ces
révélations sur lui-même reçues en plein coeur,
l'étudiant de médecine avoue bien sûr quelques moments
creux, comme ces innombrables heures passées dans les ambassades
à attendre des billets d'avion et des visas (il a dû se rendre
en Égypte pour acheter un visa éthiopien) et tous ces pas
perdus dans les aéroports à attendre des vols annoncés
qui n'arrivent jamais. Mais tout cela constitue de l'histoire ancienne;
pour Alexis demeure en effet le souvenir d'une expérience ancrée
à tout jamais dans sa mémoire. Troisième au classement
de la course, ce qui lui vaut un stage de trois mois comme réalisateur
aux émissions jeunesse de Radio-Canada, cet aventurier dans l'âme
s'interroge sur son avenir de jeune médecin, à qui il reste
une année d'externat à compléter avant d'entrer dans
le "système". Toubib or not toubib? L'avenir (et le destin)
le diront.
"Participer à la Course m'a fait découvrir que je serais capable de vivre partout dans le monde, lance Alexis. Je sais aussi que les habitants de cette planète, où qu'ils vivent, souhaitent en fin de compte une seule et même chose: être heureux."