6 février 1997 |
Les habitudes de vie de la mère pendant la grossesse ont un impact sur le degré d'exposition au plomb de son enfant
La concentration de plomb dans le sang des nouveau-nés est jusqu'à 50 % plus élevée lorsque la mère fume ou consomme de l'alcool pendant la grossesse, révèle une étude menée auprès de 430 femmes de la région de Québec. Comme le plomb peut occasionner des retards de développement chez l'enfant, cette étude vient renforcer les recommandations des organismes de santé publique concernant les effets néfastes de la cigarette et de l'alcool pendant la grossesse.
Le plomb contenu dans le tabac proviendrait des fertilisants, des pesticides ou encore de la pollution atmosphérique. Par ailleurs, les boissons alcoolisées, et en particulier le vin, contiennent des concentrations appréciables de plomb provenant des pesticides, des cuves de fermentation, du verre des bouteilles et de l'enveloppe métallique recouvrant les bouchons de liège.
Dans l'article qu'ils publient cette semaine dans l'American Journal of Epidemiology , les auteurs de l'étude, Marc Rhainds (Centre de santé publique de Québec) et Patrick Levallois (Département de médecine sociale et préventive, Faculté de médecine), constatent l'existence d'un lien direct entre la quantité de cigarettes fumées par la mère et la concentration de plomb chez l'enfant. Chaque dizaine de cigarettes consommées augmente de 15 % la concentration de plomb dans le sang du nouveau-né. Dans l'ensemble, la plombémie des enfants de mères fumeuses est de 18 % à 49 % plus élevée que celle des enfants de mères non-fumeuses. Les chercheurs ont mesuré la concentration de plomb à l'aide d'échantillons de sang prélevés dans les cordons ombilicaux à la naissance.
Près de 21 % des femmes participant à l'étude ont fumé pendant leur grossesse. La consommation moyenne pendant cette période se situait à 13 cigarettes par jour alors qu'elle était de 19 auparavant. La quantité de cigarettes fumées variait de 1 à 25. Les enfants de mères non-fumeuses dont le conjoint fumait avaient un taux de plomb 9 % plus élevé que les enfants dont aucun parent ne fumait à la maison. "Ce n'est pas très élevé mais le plomb n'est pas le seul élément nocif contenu dans la fumée de tabac, précise Patrick Levallois. Il serait donc faux de conclure que la fumée secondaire n'a pas d'effet sur les enfants".
Par ailleurs, le taux de plomb augmente de façon proportionnelle à la consommation d'alcool. Environ le quart des mères ont consommé de l'alcool pendant leur grossesse mais la majorité d'entre elles prenaient moins d'un verre de vin ou de bière par semaine. La plombémie de leurs enfants dépassait tout de même de 17 % celle des enfants de mères abstinentes.
Les taux de plomb retrouvés au Canada se situent parmi les plus bas au monde, en raison du retrait de ce métal de l'essence et d'autres produits de consommation. "L'alcool et le tabac ne sont pas les principaux facteurs d'exposition au plomb, mais leur effet vient s'ajouter aux autres sources. Comme il n'y a pas de seuil minimal connu à partir duquel le plomb n'a pas d'effet sur l'organisme, mieux vaut éviter de fumer et de boire pendant une grossesse", conclut Patrick Levallois.