30 janvier 1997 |
C0NSEIL D'ADMINISTRATION
L'Université en déficit
à compter de cette année
Le vice-recteur exécutif, Jacques Racine, a profité de la séance du Conseil d'administration du mercredi 29 janvier pour dresser un portrait clair de la situation financière actuelle de l'Université Laval, et indiquer les orientations budgétaires pour 1997-1998. Il a rappelé que l'Université prévoyait initialement un déficit de 9,4 millions de dollars en 1996-1997, l'année présentement en cours; ce déficit a été réestimé à la hausse à 16 millions au moment des projections budgétaires du 31 octobre dernier, pour diverses raisons dont le retard dans les économies sur les masses salariales du personnel enseignant et administratif dans les facultés, la difficulté de replacement de ce dernier personnel, les coûts beaucoup plus importants causés par les départs à la retraite, etc. Jacques Racine a expliqué que c'est face à cette perspective que le Conseil d'administration décidait, en décembre, de mesures visant à limiter à 10 millions le déficit de l'année en cours. Cependant, le succès des programmes de retraite provoquera, à court terme, des dépenses additionnelles de plus de 1,5 million non considérées aux projections budgétaires de la fin d'octobre 1996.
UN CONTEXTE PLEIN D'INCONNUES
Avant de passer à la situation budgétaire pour l'année 1997-1998, le vice-recteur exécutif a rappelé que bien des facteurs inconnus risquent d'avoir des effets sur l'Université: il a signalé les comités créés par le ministère de l'Éducation et la CRÉPUQ (le groupe de travail sur le financement des universités qui doit faire rapport le 30 mars 1997; le comité qui a pour objectif d'examiner les modalités du remboursement de la dette étudiante; l'élaboration d'une politique des universités que la ministre de l'Éducation définit comme "une sorte de nouveau contrat" à convenir entre le gouvernement et les universités; le comité de la CRÉPUQ sur la rationalisation des activités universitaires).
À cela, de dire Jacques Racine, s'ajoutent ce qu'il a appelé les insistances du discours ministériel, c'est-à-dire les rappels d'un enseignement supérieur qui comprenne à la fois les cégeps, les collèges et les universités; le désir du gouvernement de diminuer la durée des études et de récompenser la diplomation; l'insistance également sur la qualité de la formation assurée par une présence et un encadrement adéquat des étudiantes et des étudiants par le personnel enseignant; enfin, les thèmes de la régionalisation et de la rationalisation des programmes font partie du langage courant du gouvernement. Or les universités en région ne pourront survivre aux compressions si les règles de financement demeurent les mêmes: ceci risque d'amener un redéploiement des ressources financières à l'intérieur d'une enveloppe fermée. D'autre part, la rationalisation des programmes ne peut apporter de fortes économies à court terme, étant donné la permanence d'emploi du personnel des universités.
UNE SUBVENTION EN CHUTE LIBRE
A ce contexte jalonné d'inconnues, il faut ajouter, selon Jacques Racine, la chute draconienne de la subvention du gouvernement aux universités. À Laval, de 1994-1995 à 1997-1998, on estime que la subvention totale du gouvernement sera passée de 275 millions à 208 millions. C'est une perte de revenus de plus de 66 millions de dollars ou 24,1% de la subvention. Le vice-recteur exécutif a expliqué que les deux principaux facteurs de cette diminution sont les compressions (-18,2 %) et la baisse de la subvention liée aux pertes de clientèle ( -4,9 %). Par rapport à la seule subvention de base, le pourcentage des compressions s'élève à 20,8 % et pour les clientèles à 5,5 %. Dans ce calcul, pour l'année 1997-1998, à la suite des indications du ministère et de la connaissance de l'évolution de la clientèle, on a évalué à 10,4 % les compressions et à 2 % l'effet des baisses de clientèle sur la subvention, soit une baisse de la subvention totale de -12,4 % comparativement à -9,7 % en 1996-1997 (7,2 % et 2,5 %). De plus, tout en réduisant sa subvention, le ministère a aussi décidé du gel des droits de scolarité des étudiants pour toute la durée du mandat du présent gouvernement. La hausse annoncée des droits de scolarité des étudiants étrangers et des étudiants canadiens non québécois est faite sous forme forfaitaire de telle sorte que toutes les recettes retournent à l'État. En conclusion, on peut affirmer que la seconde plus importante source de revenus des universités est aussi gelée. Dans ce contexte, la baisse du nombre d'étudiants et d'étudiantes conduit ainsi à une baisse globale de ce revenu des droits de scolarité.
Enfin, traitant de l'évolution des inscription étudiantes, Jacques Racine a noté l'effet des chutes des inscriptions des dernières années, chutes qui ont privé l'Université de droits de scolarité en plus d'affecter à la baisse la subvention gouvernementale. Pour 1997-1998, a expliqué le vice-recteur exécutif, une baisse de 1 % de la population étudiante est prévue. La chute rapide des dernières années semble corrigée. Mais ce redressement n'est possible qu'à efforts constants de la part de tous car on se bat contre une courbe démographique qui ne se corrigera ni à court terme, ni à moyen terme.
LES FONDS REQUIS EN 1997-1998
À partir des résultats réels de l'année en cours (1996-1997), Jacques Racine a par la suite utilisé un scénario qui stipule d'une part que l'Université terminera l'année 1996-1997 avec un déficit accumulé de 7,260 millions (grâce au surplus accumulé de 4,9 millions enregistré à la fin de l'an dernier) et, d'autre part, que l'on requiert 45 millions pour équilibrer le budget 1997-1998. Dans le contexte où nous vivons, de dire le vice-recteur exécutif, la commande d'équilibre est impossible à réaliser peu importe les hypothèses soulevées, peu importe la sévérité et le leadership des responsables. L'Université a des engagements à respecter envers son personnel et envers les étudiants et les étudiantes; elle a une responsabilité en regard de sa mission. "Elle ne peut accepter sans dire un mot, une diminution de l'ordre de 25 % de la subvention totale du gouvernement en trois ans, alors même que les orientations des grands comités ministériels ne sont pas connues et que l'on proclame que l'éducation est une priorité", a-t-il expliqué.
"L'Université ne peut se laisser dépecer morceau par morceau sans une réflexion sur les conséquences. Elle a fait des efforts importants de réduction de dépenses au cours des dernières années, se montrant attentive à la crise financière de l'État, mais elle ne peut pas se mettre dans une situation où elle devrait renoncer à des objectifs nécessaires au développement de sa propre société. Elle doit, pour une part, laisser passer la tempête, et encaisser un déficit en se fiant à sa situation financière à ce jour, à sa capacité de se donner les orientations adéquates au cours des prochaines années et à la collaboration de ses membres et de leurs syndicats et associations", a-t-il conclu.
Rappelant les efforts déjà réussis, tels la privatisation
ou l'abolition de sept services et d'une direction générale,
l'abolition ou fusion de huit départements, la réorganisation
des régimes de retraite, la responsabilisation des différents
groupes, la disparition des appoints de rente chez le groupe des professeurs,
les programmes spéciaux de retraite, la diminution des planchers
d'emploi de 140 professeurs d'ici 1999, la diminution des professeurs-administrateurs
de 163 à 134 de 1992 à 1996, la diminution du personnel administratif
de 2,298 à 2,084 de 1992 à 1996, les efforts de recrutement
des étudiantes et des étudiants, etc., Jacques Racine a précisé
que ces opérations doivent se continuer sans mettre en péril
la qualité de la formation et de la recherche.
LES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES 1997-1998
Quant aux orientations budgétaires 1997-1998, le vice recteur exécutif a indiqué qu'il faut d'abord procéder à la consolidation des plans de compressions des unités et fixer des objectifs qui tiennent compte de diverses réalités dont les compressions ministérielles. Ainsi, lors d'une première approximation en février 1996, on avait évalué à près de 10 millions les économies que les unités s'étaient engagées à réaliser en 1997-1998. Le nouvel objectif global, à ce moment-ci, devrait être porté à 20 millions, a-t-il dit. Dans la répartition de cet objectif entre les unités, de préciser le vice-recteur exécutif, il faudra tenir compte des résultats 1996-1997 de chaque unité et des possibilités réelles d'économie. Il faut se rappeler que ce montant de 20 millions permettra d'atteindre l'objectif de compressions de 15 % en deux ans.
Différentes autres mesures devront être prises qui auront pour objectif de réduire d'un autre 5 millions de dollars les dépenses ou encore d'augmenter les revenus d'un montant identique ou complémentaire. Au niveau des revenus, on cherchera à augmenter ceux qui sont liés à la recherche contractuelle et à mieux tirer profit des activités de formation continue. Au niveau des dépenses, on réduira les budgets des ressources matérielles d'un pourcentage égal au pourcentage de compressions du MEQ, on cherchera à imputer certaines dépenses actuellement liées au budget de fonctionnement soit à la Fondation de l'Université Laval, soit à Vie étudiante; on reverra l'ensemble des budgets spéciaux.
L'UNIVERSITÉ EN DÉFICIT
Jacques Racine a conclu son exposé en expliquant que si on résume les effets des orientations budgétaires présentées au Conseil, on doit projeter un déficit accumulé de 27,3 millions au 31 mai 1998. Ce montant est composé d'un déficit accumulé de 7,3 millions au 31 mai 1997 et d'un déficit d'opération de 20 millions en 1997-1998. Le vice-recteur exécutif a qualifié ce dernier déficit de structurel. Non seulement, il se répétera année après année s'il n'y a pas de changement, mais il s'accroîtra d'au moins trois millions de dollars par année par les effets combinés de la progression dans les échelles salariales, de l'augmentation de l'indice des prix à la consommation et des coûts des politiques sociales. Malgré son ampleur, de direJacques Racine, ce déficit structurel indiquerait néanmoins que l'on aurait réussi à absorber en trois ans une réduction de plus de 15 % de la subvention totale du gouvernement soit près de 40ainsi que les autres augmentations récurrentes.
AUTRES SUJETS
Au cours de cette séance, le Conseil d'administration
a reçu le rapport d'évaluation du Service des terrains et
bâtiments et approuvé l'orientation générale
de ce rapport, ainsi que le nouveau mandat de ce service dont l'appellation
sera désormais celle de "Service des immeubles".Il a approuvé
la création de la Chaire en développement international et
accepté que la salle 3460 du pavillon Alphonse-Desjardins porte dorénavant
le nom de "Salle Meloche-Monnex", en reconnaissance d'un don de
100 000 $ remis dans le cadre de la Campagne Défi. De plus, le Conseil
a adopté les lettres d'entente portant sur les ententes de transfert
entre les administrateurs de régimes de retraite des établissements
universitaires québécois, de la CRÉPUQ et de la Commission
administrative des régimes de retraite et d'assurance, ainsi que
l'annexe à cette entente "Entente de transfert intra-universitaire".
Il a aussi approuvé la lettre d'entente portant sur la prolongation
du lien d'emploi des chargées et chargés de cours. Enfin,
il a approuvé les mesures prise concernant l'impact sur les conditions
de retraite de certains professeurs-administrateurs, dans le cadre du Régime
renouvelé de retraite et approuvé également les recommandations
proposées par le Comité sur les conditions d'emploi du recteur,
des vice-recteurs, des vice-recteurs adjoints et du secrétaire général.
MICHEL HÉROUX
Le texte intégral de l'Exposé
du vice-recteur exécutif sera publié dans le Fil de la semaine prochaine