16 janvier 1997 |
Dans ce qui est en voie de devenir une tradition, le magazine Québec Science fait paraître, dans son numéro de février, un palmarès des dix grandes découvertes de l'année au Québec. Quatre découvertes effectuées par des chercheurs de l'Université figurent au "top ten 1996" du magazine. Il s'agit de la mise au point d'une technique permettant de reconstituer, chez la souris, un foie complet à partir de quelques cellules modifiées génétiquement (Robert Tanguay, Médecine), de la découverte d'une étoile massive d'un type très rare (Laurent Drissen, Jean-René Roy et Carmelle Robert, Physique), de l'élucidation de la cause du syndrome du X fragile, une maladie provoquant le retard mental (Édouard Khandjian, François Corbin et François Rousseau, Médecine) et de la première description de la structure d'une enzyme bactérienne capable de dégrader les BPC (Lindsay Eltis, Biochimie). Enfin, l'étude réalisée par l'équipe de Jean-Pierre Després sur l'insuline comme facteur de risque des maladies cardio-vasculaires obtient une mention honorable.
Le palmarès des découvertes de l'année est dressé par une équipe de Québec Science à partir d'une consultation auprès des universités et des centres de recherche et de la recension de nombreux quotidiens, revues spécialisées et publications gouvernementales. "Toutes les découvertes retenues ont fait l'objet d'une publication dans une revue savante et ont donc été évaluées par les pairs des chercheurs. Elles ont aussi contribué, chacune à sa façon, à faire avancer la recherche dans leur domaine respectif." Québec Science confesse d'emblée la subjectivité de sa démarche "tant la variété et le nombre de découvertes faites l'an dernier étaient grands." Selon le magazine, les découvertes retenues "témoignent le mieux de la vigueur et de la diversité de la science d'ici."
Les quatre découvertes
Robert Tanguay et ses collègues américains ont mis au point
une technique qui permettrait, par thérapie génique, de reconstruire
un foie complet à partir de cellules modifiées génétiquement.
La technique a été éprouvée avec succès
chez des souris présentant une déficience de la FAH (fumarylacétoacétate
hydrolase), une enzyme impliquée dans la dégradation de l'acide
aminé tyrosine. Cette déficience enzymatique reproduit la
situation retrouvée chez les personnes qui souffrent de tyrosinémie
héréditaire, une maladie fréquente au Québec
(1 cas par 16 000 naissances) et tout particulièrement dans la région
du Saguenay-Lac-Saint-Jean où son incidence est la plus élevée
au monde avec 1 cas par 1846 naissances. Cette découverte laisse
entrevoir une alternative à la transplantation d'organe pour les
personnes atteintes de certaines maladies hépatiques.
Laurent Drissen, Carmelle Robert et Jean-René Roy, trois astrophysiciens du Département de physique, ont découvert, en janvier 1996, un objet céleste très rare: une étoile lumineuse bleue variable. Jusqu'à maintenant, seulement cinq étoiles de ce type ont été répertoriées dans notre galaxie et, au total, on n'en connaît qu'une vingtaine dans tout l'Univers. Située à 10 millions d'années-lumière de la Terre, cette étoile porte désormais le nom de NGC 2363-V1. Sa masse atteint environ 60 fois celle du Soleil et sa luminosité s'est accrue d'au moins 25 fois depuis 1992, ce qui en fait l'étoile la plus lumineuse de toute sa galaxie.
Édouard Khandjian, François Corbin et François Rousseau du CHUQ (Centre hospitalier universitaire de Québec, pavillon Saint-François d'Assise), et leur collègue Stéphane Woerly d'Organogel Canada ltée, ont démontré que le syndrome de retard mental du X fragile dépendait d'un problème touchant les ribosomes, ces petites structures cellulaires intervenant dans la synthèse des protéines. Il s'agit de la première maladie héréditaire humaine liée au fonctionnement des ribosomes. À noter, le doublé du chercheur François Rousseau qui, pour une deuxième année d'affilée, compte parmi l'une des équipes ayant réalisé une découverte retenue par Québec Science.
Lindsay Eltis, du Département de biochimie (Faculté des sciences et génie) et quatre chercheurs américains et allemands ont élucidé la structure d'une enzyme bactérienne jouant un rôle clé dans la dégradation de certains composés chimiques apparentés aux biphényls polychlorés (BPC). Cette découverte constitue une étape importante dans la recherche de solutions aux problèmes causés par les BPC et d'autres polluants similaires très peu biodégradables. La connaissance détaillée de cette enzyme laisse entrevoir la possibilité d'en modifier la structure de façon à la rendre capable d'attaquer efficacement une gamme de BPC ainsi que les dérivés de dioxines. Une fois ces modifications apportées, les chercheurs croient pouvoir introduire le gène codant pour cette enzyme améliorée dans le bagage génétique d'une souche de bactéries et ainsi créer une solution verte pour l'élimination de ces dangereux polluants.
Enfin, Québec Science souligne, parmi les six découvertes importantes qu'il "ne pouvait se résigner à laisser tomber", les travaux de Jean-Pierre Després, Benoît Lamarche, Pascale Mauriège, Bernard Cantin, Sital Moorjani (aujourd'hui décédé) et Paul-J. Lupien. Ces chercheurs du Centre de recherche sur les maladies lipidiques de la Faculté de médecine ont démontré qu'un taux élevé d'insuline doit être considéré comme un important facteur annonciateur de maladies cardio-vasculaires, au même titre que le cholestérol.