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5 décembre 1996 ![]() |
Résistance aux antibiotiques
Une proportion grandissante de bactéries seraient porteuses d'un segment d'ADN, appelé intégron, qui contribuerait au phénomène de multirésistance aux antibiotiques. "Il y a quelques années, on retrouvait surtout les intégrons dans les souches types de bactéries (celles étudiées en laboratoire) mais maintenant, il y a de plus en plus de souches cliniques de bactéries porteuses d'intégrons", dit Paul Roy, professeur au Département de biochimie (Sciences et génie) et membre du Centre de recherche en infectiologie. L'intégron commanderait la synthèse d'une enzyme, l'intégrase, qui assemble les gènes de résistance aux antibiotiques dans une même unité.
L'intégron est situé sur des petits fragments d'ADN, indépendants des chromosomes, que les bactéries d'une même espèce ou d'espèces différentes peuvent s'échanger en s'accolant les unes aux autres. "Certaines personnes transportent, pendant des années, des bactéries inoffensives mais résistantes à certains antibiotiques et cette résistance peut éventuellement être transférée à des bactéries pathogènes avec qui elles viennent en contact, explique Paul Roy. Nous n'aurons bientôt plus d'antibiotiques à notre disposition pour lutter contre un nombre croissant de microorganismes résistants", craint le chercheur.
Plusieurs facteurs ont contribué à l'émergence de la résistance, notamment l'usage inadéquat d'antibiotiques (dans certains pays, ils sont distribués sans ordonnance), la prescription excessive de ces médicaments par les médecins et les pressions exercées par les patients pour se voir prescrire ces médicaments. Cet usage tous azimuts des antibiotiques a favorisé la sélection de souches résistantes de bactéries qui s'échangent maintenant l'information génétique renfermant leurs secrets.
"Il faut présentement entre deux et trois jours pour identifier la souche de microorganisme responsable d'une infection, explique Paul Roy. Comme les médecins ne veulent pas prendre de chances, ils prescrivent des antibiotiques avant d'avoir reçu le diagnostic." Grâce, entre autres, à l'appui financier du Conseil de recherches médicales du Canada, Paul Roy et ses collègues Michel Bergeron et Marc Ouellette, tentent de mettre au point des tests de diagnostic rapide pour l'identification d'espèces bactériennes et pour l'identification des gènes de résistance aux antibiotiques. Un de ces outils, testé en laboratoire, a permis d'obtenir des résultats en une heure. Ces tests, espère-t-on, aideront les médecins à prescrire des antibiotiques mieux ciblés pour chaque cas d'infection et ainsi éviter de gaspiller les précieuses munitions d'antibiotiques encore efficaces.