14 novembre 1996 |
Zoom
Si des spécialistes en planification de carrière devaient ébaucher le parcours idéal à suivre pour former des écologistes, ils auraient beaucoup à apprendre en suivant les chemins empruntés par Micheline Manseau. Pourtant, le grand plan qui l'a conduit de technicienne de la faune à docteure en biologie, de l'est à l'ouest du continent américain et des Tropiques au grand Nord, a été improvisé de toutes pièces. "Tout ça, c'était du court terme, j'ai fait ce qui me tentait, ce qui me faisait plaisir", dit simplement la chercheure.
Au milieu des années 80, Micheline Manseau, alors diplômée en technique de la faune, retourne aux études, en Colombie britannique, pour obtenir un bac en biologie. Deux ans plus tard, elle arrête tout et part explorer la côte ouest américaine. Arrivée en Californie, elle s'arrête un bon jour, sans invitation, à un centre sur les oiseaux marins et offre ses services comme assistante de recherche. Elle y passera six mois. Les contacts qu'elle établit alors avec des chercheurs américains lui ouvrent de nouveaux horizons qui l'amènent à étudier les tortues de mer aux Galápagos et l'oiseau berceau en Australie. De plus, elle collabore pendant cinq ans aux recherches sur l'oie blanche menées au Département de biologie à l'Université et travaille pendant l'été comme naturaliste dans les parcs nationaux des Maritimes."Je trouvais de l'emploi assez facilement parce que j'avais une approche de technicienne et que j'étais inventive, ce dont rêvent tous les chercheurs."
Comme ces expériences lui donnent la piqûre de la recherche, elle termine son bac à Rimouski en 1989 et entreprend aussitôt une maîtrise sur l'oie blanche qui la conduit à l'Île Bylot dans l'Arctique canadien. En 1991, maîtrise en poche, elle accepte un emploi de professeur au cegep de Sherbrooke... qu'elle abandonne après un trimestre pour reprendre le large. Destination, le Nouveau-Québec pour un doctorat en biologie sur les caribous de la rivière George (voir Fil du 7 novembre, p. 6). Docteur ès sciences depuis quelques mois, elle a commencé l'été dernier un post-doctorat à la Faculté de foresterie et de géomatique, sur les loups de la Réserve faunique des Laurentides.
Contrairement aux chercheurs frileux qui préfèrent demeurer dans le confort douillet de leur spécialité plutôt que d'affronter des eaux inconnues, Micheline Manseau prend plaisir à embrasser toujours plus large en changeant continuellement de sujets et de milieu de recherche. À ses yeux, ces changements ne sont pas d'éternels recommencements, mais plutôt sa façon bien personnelle d'approcher l'écologie. "Ça me permet de diversifier les approches d'un problème et d'avoir une vision plus globale. En plus, ça stimule la créativité" Qu'est-ce qui la passionne tant en recherche? Plutôt du genre à carburer à l'action qu'à l'introspection, elle admet avoir peu réfléchi à la question. "Dans la vie, laisse-t-elle tomber finalement, la plupart des gens se posent des questions sans avoir les moyens d'y répondre. En recherche, notre travail consiste justement à trouver des réponses. C'est un chance inestimable."