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10 octobre 1996 ![]() |
Pour les pays en voie de développement, le nombre élevé
d'enfants nés prématurément représente un important
problème de santé. Généralement, ces nouveau-nés
de petits poids à la naissance (moins de 2 500 grammes) sont mis
en couveuse afin de recevoir la chaleur nécessaire à leur
survie et sont traités selon les pathologies qu'ils présentent
en relation avec leur prématurité. L'utilisation de soins
intensifs de ce type implique des coûts financiers élevés,
en plus de constituer une séparation dommageable pour l'équilibre
psycho-affectif de la mère et de l'enfant, surtout pendant la période
dite d'élevage de l'enfant, où on le garde simplement pour
lui faire prendre du poids.
Pour pallier ces problèmes, des pédiatres colombiens de Bogota
ont inventé et développé, à la fin des années
1970, la méthode Kangourou, une technique consistant à maintenir
l'enfant de faible poids, peau à peau contre le thorax d'un adulte,
un peu à la manière des kangourous, et ce, 24 heures sur 24.
Dans le cadre des conférences du Groupe de recherche sur les inadaptations
psychosociales chez l'enfant, de l'École de psychologie, deux chercheuses
colombiennes, Nathalie Charpak, pédiatre, et Zita de Calume, néonatologue,
ont présenté récemment les résultats d'une recherche
entreprise en 1993 à la Clinique San Pedro Clever de Bogota, où
l'intervention kangourou est utilisée depuis trois ans. (Programme
Kangourou ISS-World Laboratory)
«Il n'y a pas plus de mortalité dans le groupe Kangourou que
dans le groupe témoin, composé d'enfants placés en
couveuse, a souligné Zita de Calume. De même, la croissance
des enfants des deux groupes est identique. En revanche, on a observé
moins d'infections graves chez les enfants kangourous; étant nourris
au sein, ils sont moins exposés aux germes infectieux. En outre,
le contact peau à peau allonge la durée de l'allaitement maternel
et accroît par conséquent la protection immunitaire de l'enfant.
Finalement, le Programme Mères Kangourou a pour effet d'alléger
les coûts financiers en diminuant le temps de l'hospitalisation néonatale
et le temps de présence en incubateur.»
Des pères engagés
Participant à cette recherche, Réjean Tessier, professeur
à l'École de psychologie, a observé que le programme
permet le développement d'une relation plus satisfaisante entre la
mère et son enfant. «Par rapport au groupe témoin, les
enfants kangourous donnent davantage de réponses à leur mère,
soutient-il. De la même façon, les mères kangourous
parlent davantage à leur bébé.» Selon lui, l'un
des grands avantages du programme réside dans l'implication des pères
colombiens qui portent leur enfant à un moment ou l'autre de la journée,
et ce, dans une proportion allant jusqu'à 50 % et plus.
«Dans la société colombienne, le rôle du père
en ce qui a trait au développement du bébé est très
limité. Le programme leur donne la chance de jouer un rôle
de premier plan dans le développement de leur enfant, et non plus
un rôle de substitution. »
Afin de faire connaître le Programme Mère Kangourou au Québec,
Réjean Tessier effectue présentement une tournée de
conférences dans les hôpitaux du Québec, en compagnie
des chercheuses. Après quoi, il compte mettre sur pied un comité
de travail pour préparer un projet-pilote visant trois hôpitaux
du Québec.