Gisèle Côté-Harper, médaillée Pearson pour la paix
Profil
La personne d'abord
Gisèle Côté-Harper devient la première
femme francophone à mériter la médaille Pearson pour
la paix
«La question des droits de l'homme constitue une préoccupation
de tous les jours pour moi. J'ai profondément confiance en l'être
humain; seulement, il y a des choses que je ne peux pas accepter, comme,
par exemple, la violence des adultes envers les enfants», déclare
avec fougue Gisèle Côté-Harper. Professeure titulaire
à la Faculté de droit, cette femme à la poignée
de main chaleureuse et au sourire tranquille est, en 1995, la lauréate
de la médaille Pearson pour la paix.
Institué en 1979 par l'homme d'État canadien Lester B. Pearson
- Prix Nobel de la paix en 1957 - cet honneur est décerné
annuellement par l'Association canadienne pour les Nations-Unies (ACNU)
à un Canadien ou à une Canadienne ayant contribué,
par ses efforts personnels, à l'avancement de causes humanitaires,
comme par exemple la médiation entre les pays belligérants
et l'évolution pacifique de l'humanité grâce au droit
international et aux organisations mondiales. Fait à souligner, Gisèle
Côté-Harper est la première femme francophone à
mériter cette illustre décoration depuis sa création,
il y a 16 ans.
La cause des enfants
Après avoir terminé son droit à l'Université
Laval, en 1965, et fait l'École du Barreau, Gisèle Côté-Harper
oeuvre comme procureure au Tribunal de la jeunesse où elle plaide
des causes de meurtres, de viols et d'incestes perpétrés par
des adultes envers des enfants. Dans le cadre de la maîtrise en droit
criminel qu'elle entreprend à l'Université Harvard en 1969,
l'avocate se penche sur les différentes étapes de la vie de
l'enfant, s'interrogeant notamment sur la question suivante: à quel
moment ce dernier est-il capable d'évaluer le bien et le mal? «Il
n'y a rien de pire qu'un enfant trahi par abus psychologique, constate-t-elle.
L'étouffement intérieur cause une blessure qui ne se colmate
jamais.»
Au fil des années, cette préoccupation pour les droits de
l'enfant s'est étendue aux droits de la personne. Gisèle Côté-Harper
a ainsi exercé diverses fonctions juridiques au sein d'organismes
internationaux et nationaux, notamment la Commission des droits et libertés
de la personne, le Comité des droits de l'homme des Nations Unies
et la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du
Canada. Depuis 1990, la juriste est présidente fondatrice du Conseil
d'administration du Centre international des droits de la personne et du
développement démocratique, dont le siège est à
Montréal.
Considérée comme une sommité dans son domaine, Gisèle
Côté-Harper siège au conseil d'aministration de divers
organismes s'occupant des droits de la personne et du développement,
dont Entraide universitaire mondiale Canada (EUMC) et l'Institut interaméricain
des droits de l'homme. En septembre dernier, elle a fait partie de la délégation
canadienne officielle qui s'est rendue à la Quatrième Conférence
sur les femmes, à Beijing.
Dénoncer l'injustice
Interrogée sur le sort réservée aux fillettes chinoises
dans les orphelinats et le battage médiatique entourant cette situation,
Gisèle Côté-Harper répond qu'«il y a des
choses qu'on ne peut définitivement pas taire: il faut sensibiliser
non seulement les chefs d'États mais aussi la population à
ces injustices flagrantes; en tout cas, on doit briser la loi du silence.
Dans le cas présent, le rôle des médias demeure fondamental.
En revanche, il est important que les médias ne tombent pas dans
le sensationnalisme et l'exploitation à des fins de marketing.»
Estimant que la situation des droits de la personne a évolué
dans certains pays tandis qu'elle a reculé dans d'autres, Gisèle
Côté-Harper croit que la création de conventions et
de textes juridiques signés entre les pays assure une certaine stabilité
aux droits de la personne dans le monde. «Chose certaine, nous avons
plus d'outils d'alerte préventive qu'il y a 50 ans. Par exemple,
l'ONU est parfois critiquée, mais c'est pourtant le seul organisme
au monde ayant la possibilité d'envoyer des gardiens de la paix dans
les pays où sévit un conflit majeur.»
Dans ses relations quotidiennes avec les étudiants, Gisèle
Côté-Harper ne déroge pas de la ligne de pensée
qui est sienne depuis plus de 25 ans: les droits de la personne - et par
là, le bien-être de l'étudiant - constitue une priorité.
Si son mandat consiste essentiellement à transmettre des connaissances,
cette femme de coeur tient à ce que l'étudiant sache qu'il
possède un appui en sa personne. «On ne peut pas vivre à
la place des autres, se plaît-elle à dire. Toutefois, une écoute
attentive a toujours un impact sur la qualité de vie des gens. Cela
rend le quotidien plus agréable, et ce, en dépit des coups
durs que la vie peut porter.»
RENÉE LAROCHELLE
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