Un Musée Félix-Leclerc?
DIPLÔMÉS
Bientôt un Musée Félix-Leclerc?
«J'avais seize ans, et je regardais par la fenêtre de la maison
mon père marcher sous les pommiers à l'île d'Orléans,
en me disant qu'un jour il faudrait que je fasse quelque chose pour faire
connaître son oeuvre aux jeunes. Simplement pour le remercier de mon
enfance.»
Onze ans plus tard, Nathalie Leclerc, qui étudie actuellement en
orientation après une mineure en psychologie à l'Université
Laval, va peut-être franchir le pas qui sépare le rêve
et la réalité. La fille du poète de l'île tente
avec son conjoint, Christian Bilodeau, de mettre sur pied un musée
pour présenter l'oeuvre de Félix Leclerc. Un musée
qui ferait revivre dans une exposition permanente le chanteur, le poète,
le dramaturge, mais qui donnerait aussi l'occasion aux jeunes d'accomplir
leurs premières armes sur la scène d'un petit café-théâtre
attenant.
Les deux animateurs du projet souhaitent bien sûr établir leur
musée vivant sur l'île d'Orléans, peut-être même
à Saint-Pierre, le village d'élection de Félix puisqu'il
y a élevé ses enfants. L'exposition permanente présentant
les disques, la correspondance, les manuscrits, les photos s'appuierait
en grande partie sur les biens conservés par la famille, mais également
sur l'exposition Félix Leclerc ou l'aventure qui s'est déroulée
au Musée de l'Amérique française l'an dernier. Le Musée
Félix-Leclerc ferait appel également à d'autres donateurs
éventuels comme Jacques Canetti, l'impresario français du
chanteur, qui possède certains documents comme les premiers contrats
de l'artiste ou Claude Gauthier qui conserve l'une de ses guitares.
Des conférences, des marionnettes, des stages...
Nathalie Leclerc ne souhaite pas pour autant transformer le musée
en mausolée à la gloire du grand poète défunt.
Consciente par exemple des défauts de certaines pièces de
théâtre de jeunesse, l'étudiante en orientation souhaite
jeter des ponts entre la présentation de l'oeuvre de son père
et le contexte historique et social de l'époque. Le musée
pourrait ainsi accueillir des conférenciers comme Aurélien
Boivin ou André Gaulin, tous deux professeurs au Département
des littératures, qui ont étudié en détail les
textes du chansonnier. Certaines oeuvres comme Addagio et Allegro se prêteraient
bien également à une adaptation en théâtre de
marionnettes pour les tout-petits.
Pour l'instant, le projet présenté au ministère de
la Culture et des Communications ne vit que dans la tête de Nathalie
Leclerc et de Christian Bilodeau qui recherchent activement des fonds auprès
des deux gouvernements, provincial et fédéral, de l'entreprise
privée et de divers organismes. Ils travaillent d'ailleurs à
la relance de la Fondation Félix-Leclerc, qui a pour but notamment
de venir en aide aux jeunes artistes québécois de talent,
et imaginent le futur musée comme un des moteurs économiques
de l'île d'Orléans. «Chaque année, près
de 370 000 visiteurs entreprennent le tour de l'île sans forcément
s'arrêter, explique Christian Bilodeau. Les artisans, les peintres,
les sculpteurs, nombreux dans la région, pourraient utiliser la boutique
du Musée Félix-Leclerc pour exposer leurs oeuvres. On participerait
à la relance de l'île dont l'économie connait une véritable
décroissance depuis quelques années.»
Les jeunes occupent également une place prépondérante
dans le projet, car les promoteurs tiennent à leur donner le coup
de pouce qui a fait si cruellement défaut à Félix à
ses débuts. La fille du chanteur pense ainsi à recréer
le camp en bois rond où son père habitait alors qu'il écrivait
«Le fou de l'île» et «Pieds nus dans l'aube».
Cette maison de la nature accueillerait des jeunes effectuant des stages
de formation en théâtre ou en chanson, peut-être venus
de France grâce à l'Office franco-québécois pour
la jeunesse. «En regardant le fleuve, les oiseaux aux alentours, ils
baigneront dans la même athmosphère, propice à la création
qui inspirait mon père», fait valoir Nathalie Leclerc. 42 milles
de choses tranquilles pour supporter grandes blessures dessous l'armure.
PASCALE GUÉRICOLAS