CAPTIES: Le campus de demain sera-t-il réel ou virtuel?
La Toile mystérieuse
Le campus de demain, réel ou virtuel?
Bien qu'il n'ait rien, à proprement parler, contre les nouvelles
technologies informatiques appliquées au domaine de l'éducation,
Florian Sauvageau met en garde ceux et celles qui ne jurent que par le réseau
Internet pour transmettre et acquérir des connaissances. Selon ce
professeur au Département d'information et de communication, Internet
doit en effet être considéré comme un outil parmi d'autres
pour atteindre des objectifs éducationnels.
«L'idée de l'éducation exige, à mon avis, une
rencontre physique entre quelqu'un qui veut apprendre et quelqu'un qui veut
enseigner. On ne fait pas cela avec un réseau, aussi sophistiqué
soit-il», a affirmé Florian Sauvageau, lors d'un débat
portant sur le thème «Le meilleur campus de demain: réel
ou virtuel?»
Plutôt réticent face au «discours euphorique de la technologie»,
Florian Sauvageau dénonce l'absence de regard critique chez les journalistes
et les politiciens qui reprennent ce discours sans en connaître la
véritable portée. «L'Université est davantage
coupable parce que son rôle est de développer le regard critique
chez l'étudiant, estime-t-il. D'autre part, les entreprises ont compris
que l'information scientifique s'avérait un domaine très rentable.
Si cette information ne devenait accessible qu'aux entreprises et institutions
capables de payer, les universités pourraient vite être dépassées
dans le domaine.»
Dans cette foulée, Nina Duque, étudiante au Département
d'information et de communication et chef de pupitre au journal L'exemplaire,
croit qu'Internet représente «un médium élitiste»
et un «investissement dispendieux»: «On met beaucoup trop
d'emphase et d'effort sur un médium qui, de toute façon, est
constamment appelé à évoluer. En fait, Internet a son
utilité, au même titre que le livre ou la télévision.
Mais obliger un étudiant à étudier sur Internet m'apparaît
dangereux au niveau de la qualité de l'enseignement.»
De grandes possibilités
Professeur au Département des sciences du bois et de la forêt,
Jean Robert Thibault émet une opinion plus nuancée sur la
question. S'il rejette l'idée que l'Université devienne «un
parc d'ordinateurs», il croit cependant que l'utilisation des nouvelles
technologies informatiques ne peut que donner plus d'ampleur à «la
relation incontournable professeur-étudiant.»
«Tout professeur en sciences de la nature se sent frustré au
moment où la nature se réveille et que les étudiants
quittent le campus», dit Jean Robert Thibault, qui a donné au
trimestre dernier un cours portant sur la physiologie de l'arbre, dont la
moitié était offerte sur le réseau Internet. «Les
nouvelles technologies informatiques ouvrent des possibilités immenses
au niveau de la pédagogie. Sur le site W3, par exemple, les étudiants
peuvent revoir à satiété les images qui ont été
vues en classe, en plus de pouvoir entrer en contact avec des sommités
de la foresterie et de la géomatique.»
Ayant suivi ce cours, Nelson Thiffault vante la disponibilité et
l'instantanéité de ce mode d'apprentissage qui permet de consulter
en tout temps graphiques, articles et diapositives et photos plus vraies
que nature. «En photosynthèse, par exemple, il est possible
d'avoir tous les derniers résultats des recherches dans le domaine,
souligne cet étudiant en génie forestier. Nous pouvons également
participer à des groupes de discussions, en plus d'avoir accès
à une banque d'examens. Cela impose plus de travail mais le jeu en
vaut la chandelle.»
Si les nouvelles technologies ouvrent la voie à de multiples possibilités
quant à l'acquisition de connaissances, les professeurs doivent toutefois
aider à la navigation dans l'enseignement afin que l'étudiant
ne périsse pas noyé sous une mer d'informations, considère
Jean Robert Thibault: «Avant l'avènement d'Internet, une recherche
bibliographique sur un sujet donnait peut-être cinq ou six références.
Aujourd'hui, la même recherche sur le réseau informatique peut
générer des centaines d'articles sur la question. En ce sens,
il faut à tout prix que les étudiants apprennent à
gérer l'information et développent une meilleure capacité
d'analyse.»
RENÉE LAROCHELLE