Pierre Morin, entrepreneur-boulanger
DIPLÔMÉS
Le levain de la vie
Après avoir mangé son pain noir, Pierre Morin s'est
sorti du pétrin.
À l'heure où les bonnes gens, bien au chaud dans le calme
de leurs chaumières, dorment sur leurs deux oreilles, Pierre Morin,
lui, fait du pain. Après avoir pétri une pâte constituée
de farine, d'eau et de sel, il attend patiemment que le mélange lève
avant de l'enfourner, en espérant que le produit final sera beau
et bon. Quand les premiers clients arrivent à sa boulangerie, vers
les huit heures, et que l'odeur du pain chatouille délicieusement
les narines, Pierre Morin est heureux. «Le pain, c'est la vie»,
dit-il simplement, de l'air d'un homme qui a trouvé sa voie.
Pourtant, tout n'a pas été facile pour cet entrepreneur qui
a obtenu un baccalauréat en administration des affaires de l'Université
Laval en 1993. «Je me suis vite aperçu que les emplois ne poussaient
pas dans les arbres, alors j'ai foncé, résume-t-il. Au début
de 1995, mon associé et moi avons longuement réfléchi
sur ce ce que nous avions vraiment le goût de faire. L'idée
de fonder une boulangerie l'a emporté sur toutes les autres. Parallèlement,
nous sentions souffler un vent favorable quant aux possibilités de
succès concernant ce type de commerce car les gens sont de plus en
plus exigeants quant à la qualité du pain qu'ils achètent.»
L'ami du pain
Résultat: le 13 octobre dernier, Pierre Morin procédait à
l'ouverture de La Boul'Miche, une micro-boulangerie ayant pignon sur rue
au 1487 Chemin Sainte-Foy, à Québec. Au menu, une variété
impressionnante de pains, dont la seule évocation titille les papilles
gustatives: pain aux oignons, aux carottes, au fromage, au chocolat, nature
ou au blé, pour ne nommer que ceux-là. «Notre mission
consiste d'abord et avant tout à produire du pain de qualité
fait avec des ingrédients sains», assure Pierre Morin, qui utilise
exclusivement de la farine biologique dans ses recettes. Et bien que ses
nuits soient blanches comme la mie, il affirme être entièrement
payé de ses peines quand un client - et même des pairs - vantent
l'excellence de son pain, le meilleur en ville, paraît-il. «Tant
mieux si je mets du soleil dans la vie des gens...»
Avant de fonder son entreprise, ce sympathique quadragénaire a effectué
mille métiers pour gagner sa vie, dont celui de fonctionnaire au
ministère des Affaires sociales, au début des années
1970, poste qu'il a vite quitté pour celui d'administrateur pour
le compte d'un maison hébergeant des personnes handicapées.
En 1981, il se lance dans la production de tomates de culture biologique,
une aventure qui durera dix ans. Idéaliste - et entrepreneur - dans
l'âme, l'homme décide de venir étudier en sciences de
l'administration à l'Université Laval, ayant pour son dire
qu'«en affaires, ce qui manque, ce sont des gens qui connaissent le
marketing».
Le prix de l'excellence
Avant d'ouvrir sa propre boulangerie, Pierre Morin a toutefois ramé
dur, voguant de projet en projet sans qu'aucun ne se concrétise,
vivant même de l'aide sociale pendant quelques mois. En compagnie
de celui qui deviendra son associé, il bâtit et présente
un solide plan d'affaires qui a l'heur de séduire ceux et celles
qui détiennent les cordons de la banque, avec le résultat
que l'on sait. S'il admet que son commerce n'est pas tout à fait
rentable actuellement, ce fier boulanger a pourtant confiance, sachant que
l'excellence paie toujours en retour.
«Avant de se lancer en affaires, il faut d'abord savoir ce qu'on veut
et y aller progressivement, lance Pierre Morin à l'intention des
jeunes qui souhaitent se lancer en affaires. Évidemment, cela implique
une certaine connaissance de soi. Mais si on est possède une bonne
formation dans le domaine et des qualités d'entrepreneurship, tout
devient possible.»
RENÉE LAROCHELLE
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