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21 mars 1996 ![]() |
La comète Hyakutake, la plus grosse à passer à proximité
de la Terre depuis 1546, est maintenant visible à l'oeil nu. Découverte
le 30 janvier dernier par un astronome amateur japonais, elle s'approche
présentement de la Terre à la vitesse de 150 000 km/heure
et elle passera à environ 40 fois la distance Terre-Lune, soit 15
millions de kilomètres, à la fin de mars, signale Yvan Dutil,
étudiant au doctorat au Département de physique. Il ne faudra
pas manquer ce rendez-vous car le prochain passage de cette comète
n'aura lieu que dans 12 500 ans.
«On peut la voir en observant le ciel en direction sud, à compter
de minuit, dans la constellation de la Vierge, dit-il. La chevelure est
déjà aussi longue que le diamètre apparent de la pleine
Lune, bien que beaucoup moins brillante. À l'aide de jumelles, on
peut aussi voir la queue qui pointe vers l'ouest.» Le moment fort surviendra
cependant dans la nuit du 24 au 25 mars alors que la comète passera
le plus près de la Terre. «Elle devrait alors être aussi
brillante que les étoiles de la Grande Ourse, sa chevelure sera cinq
fois plus longue que le diamètre apparent de la Lune et sa queue
s'étirera pour couvrir le quart du ciel.»
Il ne faut cependant pas s'attendre à voir une boule de feu déchirer
la voûte céleste en quelques secondes. En fait, la comète
a l'allure d'une étoile floue ayant un point brillant en son centre
et il faudra la fixer attentivement pendant plusieurs minutes pour réaliser
qu'elle se déplace. La comète Hyakutake poursuivra sa course
en direction nord pour atteindre l'étoile polaire dans la nuit du
26 au 27 mars. «Par la suite, la lumière de la Lune croissante
nuira aux observations mais, par un heureux hasard, il se produira une éclipse
totale de Lune en début de nuit le 3 avril, ce qui permettra d'observer
les deux phénomènes simultanément. Tout au long du
mois d'avril, la comète restera visible à l'ouest après
le coucher du Soleil mais le crépuscule rendra les observations de
plus en plus difficiles.»
L'étudiant-chercheur compare les comètes à de gigantesques
boules de neige d'une dizaine de kilomètres de diamètre. Formées
de gaz gelés et de poussières, elles naissent dans les régions
externes du système solaire et fondent en s'approchant du Soleil.
L'évaporation des gaz gelés qui la composent crée autour
d'elles un nuage lumineux appelé coma ou chevelure, d'où elles
tirent d'ailleurs leur nom. Leur queue est formée de poussières
et de gaz soufflés par les radiations du Soleil à mesure qu'elles
s'en approchent.
Pollution lumineuse
En ville, le spectacle risque cependant d'en décevoir plusieurs,
prévient Yvan Dutil, parce que la brillance artificielle du ciel
masquera la majeure partie de la chevelure et de la queue. «Un éclairage
excessif et des luminaires mal conçus, qui gaspillent de 30 à
40% d'énergie en dirigeant leur lumière vers le ciel, risquent
de ternir l'un des spectacles naturels les plus exceptionnels qui soit»,
déplore-t-il.
L'étudiant-chercheur signale que la pollution lumineuse constitue
un problème grandissant pour les astrophysiciens, notamment à
l'Observatoire du Mont Mégantic qui subit l'éclairage de Sherbrooke
ainsi que des fermes et des village avoisinants. Il existe pourtant des
solutions simples, tels que des luminaires avec abat-jour comme ceux que
la ville de Sainte-Foy installe maintenant, qui permettent en plus de réaliser
des économies appréciables. «La pollution lumineuse sévit
dans la plupart des pays mais le problème semble particulièrement
frappant au Québec parce que l'électricité ne coûte
pas cher, explique Yvan Dutil. Des données indiquent que la pollution
lumineuse double à tous les dix ans.»