14 mars 1996 |
«C'est bien agréable de rencontrer une université qui
a un taux de diplomation aussi élevé, et qui n'a pas un énorme
déficit accumulé, qui a une très bonne situation financière.»
C'est en ces termes que s'exprimait la députée de Terrebonne,
Jocelyne Caron, le 27 février dernier, en s'adressant au recteur
de l'Université Laval, Michel Gervais, au vice-recteur exécutif,
Jacques Racine, à la vice-rectrice aux études, Louise Milot
et au vice-recteur aux ressources humaines, Alain Vinet,
à l'occasion de la comparution de la direction de l'Université
devant la Commission parlementaire de l'éducation. On se rappellera
qu'en vertu de la Loi 95, adoptée sous l'égide de l'ancien
ministre de l'Éducation, Jean Garon, toutes les universités
québécoises doivent maintenant rendre compte annuellement
de leur performance, de leurs perspectives de développement, et de
l'état de traitement de leurs dirigeants devant les députés
de l'Assemblée nationale.
S'exprimant au nom de l'Université, le recteur Michel Gervais a centré
ses commentaires sur la diplomation et la durée des études,
les mesures d'encadrement, le placement des diplômés, la recherche,
la tâche professorale et les états financiers de l'Université.
Il a d'abord indiqué aux députés que l'accessibilité
à l'université n'est pas tout: «L'Université Laval
a compris cette notion dans le sens d'une accessibilité productive,
en vertu de laquelle non seulement des milliers d'étudiants et d'étudiantes
peuvent entrer à l'Université, mais surtout, la quitter avec
un diplôme reconnu». Puisant ses renseignements dans une étude
de la cohorte de 1987, le recteur a appris aux députés que
73,8 % de ces étudiants ont obtenu leur diplôme après
3,54 années en moyenne. «Considérant le fait que plusieurs
programmes ont une durée normale de quatre ans, on peut estimer qu'il
s'agit là d'une performance remarquable», de dire Michel Gervais,
qui a ajouté que Laval a le meilleur taux à cet égard
au Québec, avec l'Université McGill.
La culture de la réussite
Le recteur a ensuite décrit les diverses mesures d'encadrement nécessaires
pour instaurer ce qu'il a appelé «la culture de la réussite».
Il a signalé aux députés l'attention particulière
apportée, entre autres, à l'accueil et à l'encadrement
aux étudiants admis au premier trimestre de la première année
d'un programme, période sensible entre toutes. Il a aussi expliqué
les efforts faits par l'Université pour améliorer la dimension
«formation pratique» de ses programmes de formation. Abordant
ensuite le placement des diplômés, Michel Gervais a rappelé
que l'Université Laval a pris, à ses frais, le relais du gouvernement
fédéral lorsque celui-ci a décidé de fermer
son service de placement qui était sur le campus depuis 40 ans. «En
quelques années, de préciser Michel Gervais, ce service s'est
imposé auprès des employeurs et des usagers comme un des meilleurs
services de placement universitaires au Canada.» Grâce aux enquêtes
auprès des diplômés, l'Université s'enquiert
du sort de ses anciens, ce qui lui permet de croire avec assurance que globalement
la situation est loin d'être aussi mauvaise que certains sont portés
à le croire, et qu'il y a une part de mythes dans le thème
des «chômeurs instruits».
Pas de bonne formation sans recherche
Affirmant la fierté de l'Université Laval face à ses
performances en recherche, le recteur a consacré une longue partie
de son intervention à la place de la recherche dans la formation
des personnes qui fréquentent l'Université. Refusant d'opposer
enseignement et recherche, comme trop tentent de le faire, Michel Gervais
a rappelé que «la sagesse des siècles n'a pas trouvé
de meilleure façon de former une personne au niveau avancé
que de l'associer elle-même et de la faire participer activement au
processus de développement du savoir». «Au niveau de la
maîtrise et encore plus du doctorat, a poursuivi le recteur, l'étudiant
se forme dans et par la recherche. Même au premier cycle, l'étudiant
doit être mis à niveau par rapport aux plus récents
développements du savoir et à la fine pointe des connaissances».
Traitant ensuite de la tâche professorale, Michel Gervais a précisé
qu'à l'Université Laval, la tâche professorale n'est
pas gérée centralement et ne fait pas l'objet de normes précises
universellement applicables. Selon le recteur, on ne peut non plus réduire
la tâche aux seules heures de présence en classe: la tâche
professorale comporte également des activités de recherche
et d'encadrement des étudiants gradués. De plus, dans une
université aussi diversifiée que l'Université Laval,
il est illusoire de penser appliquer des normes universelles en matière
d'enseignement, puisque les situations varient énormément
non seulement d'un département à l'autre, mais aussi à
l'intérieur d'un même département. Enfin, s'appuyant
sur une étude la CRÉPUQ (Conférence des recteurs et
des principaux des universités québécoises), Michel
Gervais a indiqué que suivant une méthodologie qualifiée
de conservatrice, la tâche d'un professeur d'université québécoise
s'établit à 3,7 cours de 3 crédits par an, ce qui est
aussi exactement la moyenne établie pour les professeurs de Laval.
Le maximum pour l'enseignement et la recherche
Enfin, rappelant que la Loi 95 prévoit le dépôt par
le ministre de l'Éducation des états financiers des universités,
le recteur a précisé aux députés que, malgré
qu'elle ait subi les mêmes compressions budgétaires que les
autres universités de même que d'importantes baisses de sa
clientèle étudiante, l'Université Laval a sauvegardé
l'équilibre budgétaire et maintenu une bonne santé
financière, «à vrai dire, la meilleure du réseau
universitaire québécois.» Signalant les efforts à
accomplir en 1996-1997, où l'Université s'efforcera de réduire
ses dépenses de 30 millions de dollars, Michel Gervais a rappelé
que la direction de l'Université a coupé son salaire de 5
% en 1995-1996, réduit la même année de 40 % les suppléments
administratifs, réduit le nombre d'administrateurs et de cadres,
entrepris la réingénierie des processus administratifs et
une restructuration budgétaire, et enfin privatisé certains
services. «L'idée, a-t-il conclu, est de réduire au minimum
la fonction administrative et de concentrer le maximum de ressources vers
l'essentiel, la mission d'enseignement et de recherche.»
Des députés attentifs
Après la présentation du recteur, la parole passait aux députés
qui, pendant plus d'une heure, ont interrogé le délégation
de l'Université Laval. Les questions, de façon très
générale, ont porté sur les succès des étudiants
et étudiantes de l'Université Laval aux examens des différentes
corporations professionnelles, sur la tâche des enseignants et sur
la masse salariale de la direction de l'Université.
A cet égard, les échanges ont permis au vice-recteur exécutif
Jacques Racine de signaler aux députés une anomalie de la
loi qui force les universités à inclure dans ce que la loi
appelle «la valeur pécuniaire des composantes de traitement»
des éléments comme des frais de voyages liés aux fonctions
des directions des universités. Les questions des députés
ont aussi porté sur la carrière et les critères de
promotion des professeurs, ce qui a permis au recteur de signaler aux députés
que plus de 81 % des professeurs de Laval sont détenteurs d'un doctorat,
ce qui est le taux le plus élevé à cet égard
au Québec.
S'appuyant sur le Plan directeur 1992-1997 manifestement lu et analysé,
les députés ont aussi posé des questions sur les progrès
de la recherche à l'Université, que cette recherche soit propre
à l'Université Laval ou qu'elle soit interuniversitaire, sur
le plancher d'emploi et la réouverture récentes de la convention
collective des professeurs. Les perspectives de développement de
l'Université ont également fait l'objet d'échanges
de vues, avec un intérêt évident pour les travaux du
comité sur la restructuration facultaire. Enfin, il a été
question de la rationalisation de l'offre de programmes universitaires au
Québec, et du rôle particulier qu'une grande université
comme Laval joue dans son milieu régional particulier. En somme,
cette comparution devant la Commission permanente de l'éducation
a été une occasion en or de mieux faire connaître l'Université
Laval auprès des élus de l'Assemblée nationale.