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14 mars 1996 ![]() |
Dans leurs prescriptions aux patients, les professionnels de la santé
devraient insister davantage sur le moment de la journée où
un médicament devrait être consommé. Il faudrait même
espérer que, dans l'avenir, les concepts de chronopharmacologie et
de chronothérapie soient pris en considération afin d'adapter
la prise de médicaments aux besoins individuels de chaque patient.
Voilà le message que Gaston Labrecque, professeur à l'École
de pharmacie et spécialiste de la chronopharmacologie, a livré
aux 75 journalistes américains réunis à New York le
29 février à l'occasion d'une journée spéciale
d'information sur la chronothérapie présentée par l'American
Medical Association (AMA).
L'AMA a organisé cette journée d'information en réponse
à un sondage mené auprès de ses membres qui disaient
réaliser l'importance de la chronopharmacologie et qui souhaitaient
la mise sur pied d'une campagne d'information sur le sujet. Seul expert
étranger invité par la vénérable association,
Gaston Labrecque a passé en revue quelques-unes des recherches menées
au cours des vingt dernières années qui ont démontré
que l'effet d'un médicament varie selon le moment de la journée
où il est administré. Ainsi, la probabilité de guérison
à long terme de la leucémie lymphoblastique est deux fois
plus élevée lorsque le médicament anticancéreux
est pris le soir plutôt que le matin, les médicaments pour
les ulcères sont plus efficaces lorsqu'ils sont consommés
au moment du souper et ceux contre l'asthme donnent de meilleurs résultats
s'ils sont pris le matin ou l'après-midi.
Ce phénomène, a-t-il rappelé, est attribuable à
un ensemble de facteurs dont des variations dans l'absorption, l'excrétion,
le métabolisme, la liaison des médicaments à des récepteurs
et la sensibilité des tissus aux médicaments. Non seulement
l'efficacité de certains médicaments connaît-elle des
variations pendant la journée mais l'heure optimale semble également
varier d'une personne à l'autre ce qui pourrait éventuellement
conduire à une individualisation des traitements pharmaceutiques.
Dans l'avion qui le ramenait de New York, après que la tension d'une
journée hors de l'ordinaire soit retombée, Gaston Labrecque
ne pouvait s'empêcher de penser qu'il y a vingt ans à peine,
la chronopharmacologie était considérée à peu
près comme l'horoscope. «En réalisant comment les choses
avaient évolué depuis, je dois admettre que je planais un
petit peu plus haut que l'avion. La chronopharmacologie vient définitivement
d'obtenir ses lettres de noblesse».