16 mars 1995 |
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ID�ES
LA RECHERCHE ET LE PLAN QUINQUENNAL :
O� EN SOMMES-NOUS ?
par
Denis Gagnon
Vice-recteur � la recherche
Universit� Laval
Allocution prononc�e lors de l'assembl�e annuelle du Centre de recherche en horticulture
le 9 d�cembre 1994 � l'Envirotron
C'est avec un immense plaisir que j'ai re�u et accept� l'invitation de Serge Yelle de venir participer � cette assembl�e annuelle du Centre de recherche en horticulture. Il ne m'arrive malheureusement plus souvent d'accepter de telles invitations pour la simple raison que je ne trouve pas toujours le temps qu'il faut � travers tout le reste. Je dois dire aussi qu'il n'est pas �vident que tard en soir�e, apr�s la journ�e coutumi�re, l'inspiration nous viendra n�cessairement pour aligner des mots et des id�es, et pr�parer une allocution qui ne sera pas trop moche et qui livrera d'un fa�on aussi intelligente et intelligible que possible, les messages qu'on veut laisser � un auditoire aussi averti que celui que vous formez.
Mais l�, vraiment, l'occasion �tait trop belle pour que j'accepte de me priver de ces quelques moments privil�gi�s, d'abord de me retrouver dans un environnement aussi impressionnant que l'Envirotron mais surtout, de partager avec vous, les membres du Centre de recherche en horticulture, ma perception ou, si vous pr�f�rez, mon �valuation de ce que l'Universit� Laval est en train de devenir dans le monde de la recherche universitaire.
Vous comprendrez donc que ce n'est pas par hasard, que pendant les quelques minutes dont je dispose, j'aie choisi de vous poser la question : o� en sommes-nous dans la r�alisation des objectifs que nous nous �tions fix�s en mati�re de recherche pour la p�riode de 1992 � 1997 ?
Laissez-moi vous rappeler comment nous avions d�crit le renouveau attendu de l'Universit� � l'aube de ce plan quinquennal; nous disions, et je cite : � ... notre communaut� oeuvrera dans une universit� o� les activit�s de recherche sont nombreuses et diversifi�es, mais o� des pointes d'excellence sont bien soutenues, tant au niveau d�partemental, qu'au niveau facultaire ou interfacultaire, chaque niveau disposant de structures appropri�es. Il s'agissait de tout un contrat, car ces attentes alors exprim�es par notre communaut� universitaire contenaient toutes les vertus d'une universit� qui migrerait tr�s nettement vers la cat�gorie des universit�s dites de recherche, pas seulement une universit� o� l'on fait de la recherche.
Mais qu'est-ce que c'est vraiment une universit� de recherche ?
Vous aurez bien devin� que les d�finitions varient d'une universit� � l'autre, d'une p�riode � l'autre et, j'oserais dire d'un gouvernement � l'autre. Mais si on fait l'analyse et la synth�se de l'ensemble de ces d�finitions, on y retrouvera des traits communs, des caract�ristiques et des param�tres qui permettent de d�couvrir � peu de choses pr�s, les universit�s qui ont une �culture de la recherche� et d'autres qui en ont moins ou m�me, pas du tout.
Ainsi, quand le milieu permet l'�closion d'activit�s qui sont mues par la curiosit� scientifique, par le go�t de savoir, par le d�sir de repousser les fronti�res de la connaissance, quand les fruits qu'on en r�colte sont partag�s et reconnus par la communaut� scientifique internationale, et quand nos chercheurs participent ainsi de plein droit � la d�finition des consensus internationaux dans leur secteur d'activit�s scientifiques, je crois qu'on peut dire qu'on est en pr�sence des �l�ments de base qui constituent une universit� de recherche.
Quand un �tablissement a su d�velopper des activit�s de recherche qui rencontrent les qualit�s d�crites ci-haut et ce, dans la majorit� des unit�s qui le composent, et que cette rage du savoir s'est r�pandue dans tous les coins et recoins, c'est dire qu'on a r�alis� une �tape de plus vers l'universit� dite de recherche.
Quand on a d�velopp� les r�flexes institutionnels qui font que nos structures, nos services et nos ressources viennent aider ou je dirais plut�t, viennent participer � cet effort collectif dans le d�veloppement des connaissances, on se rapproche, de toute �vidence, d'un v�ritable milieu de recherche.
Depuis quelques ann�es, on a propos� sinon exig� du monde de la recherche universitaire qu'il prolonge sa mission vers l'application et le transfert des connaissances et des technologies. Au risque d'en faire fr�mir plusieurs, je dirais que ces activit�s de transfert sont effectivement devenues un �l�ment majeur des activit�s scientifiques de certaines des composantes de l'universit� moderne. Elles ont manifestement leur place, � la condition qu'on ait eu la sagesse de veiller au grain, et de faire en sorte que les activit�s scientifiques qui sont en amont, continueront toujours de bien alimenter celles qui sont plus directement associ�es au transfert et � l'application.
Mais toutes ces activit�s, toutes ces caract�ristiques sont le propre de n'importe quel milieu de recherche; pour recevoir le qualificatif d'universit� de recherche, il faudra n�cessairement les associer � un objectif fondamental, celui de former des personnes, former des jeunes chercheurs. Si cette pr�occupation n'est pas pr�sente constamment, si nos programmes de formation et la qualit� de l'encadrement des �tudiants et des �tudiantes ne sont pas � la hauteur, s'il arrivait, par malheur, que les �tudiants soient de trop, nous ne formerions jamais une universit� de recherche; peut-�tre quelque chose d'autre, mais pas une universit�.
Voil� l'image que nous avions de l'universit� que nous voulions contribuer � b�tir, lorsque nous avons entrepris la r�daction du plan quinquennal qui devait nous y conduire. Vous aurez compris qu'il s'agit ici du �nous� collectif, pas seulement celui de la direction de l'Universit�.
Le volet institutionnel du plan directeur s'ouvre sur ce que nous avons appel� les �tendances marquantes de la situation de notre Universit�. Ces tendances qui constituent en quelque sorte l'autocritique de notre communaut�, permettent de souligner les points pour lesquels nous nous reconnaissons des forces, mais elles nous livrent aussi certains petits d�fauts dont nous n'�tions pas toujours tr�s fiers. Je crois qu'il �tait non seulement utile, mais sans doute n�cessaire que nous nous livrions � cet exercice, et que nous ayons le courage de regarder les images que notre miroir nous retournait.
On ne pouvait pas jeter les bases de nos orientations futures, ou nous donner les objectifs institutionnels qui permettraient de corriger les carences et les lacunes que nous avions identifi�es, sans tenter de bien comprendre les nouvelles exigences des environnements dans lesquels nous aurions � travailler. Permettez-moi de vous en citer quelques unes parmi celles que nous avions retenues:
� les changements dans la d�mographie �tudiante;
� la d�gradation du parc immobilier, la d�su�tude des �quipements et le d�ficit chronique d'espaces;
� les nouvelles exigences des organismes subventionnaires et la concentration de la recherche.
� RENFORCER LA POSITION DES CHERCHEURS DE L'UNIVERSITɻ. C'est ainsi que nous avons formul� un des trois objectifs prioritaires qui sous-tendent les gestes que nous proposions de poser au cours des cinq ann�es du plan. Il nous apparaissait en effet urgent de permettre � nos chercheurs de pouvoir entrer en comp�tition avec les meilleurs du pays et de tirer leur �pingle du jeu dans un monde o�, comme le disait la ministre de l'Enseignement sup�rieur et de la Science de l'�poque, �la recherche universitaire devrait �voluer dans l'excellence, la concurrence devenant impitoyable pour les performances simplement honn�tes�.
D�s la premi�re ann�e du plan, nous avons entrepris l'�rection de constructions nouvelles dont deux devaient jouer un r�le de tout premier plan dans dans la consolidation et le d�veloppement de la recherche : l'Envirotron et le pavillon C.-E.-Marchand. Un peu plus tard, l'Universit� y allait d'une contribution financi�re substantielle permettant l'agrandissement du centre de recherche du CHUL, et une entente sp�cifique assurait que 75% des espaces seraient consacr�s aux activit�s de recherche de nos professeurs. Ces r�alisations ne sont �videmment pas le seul fait de l'Universit�, mais dans chaque cas, elle a voulu utiliser une part importante de ses budgets afin de doter les chercheurs d'espaces et d'�quipements qui leur permettraient de mieux faire face � ces nouvelles exigences dont je parlais ci- devant. D'autres constructions sont pr�vues � court ou moyen terme qui permettront d'offrir � des professeurs d'autres unit�s, les outils dont ils ont besoin.
D�j�, au moment o� toute la communaut� travaillait � la r�daction du plan, l'Universit� avait �t� invit�e � faire partie du groupe des dix universit�s canadiennes les plus d�velopp�es sur le plan de la recherche subventionn�e. Mais malgr� l'�tat impressionnant de nos performances en 1992, une enqu�te SOM r�v�lait alors que les progr�s remarquables de notre universit� en recherche de m�me que notre capacit� d'offrir un encadrement et une qualit� de formation sup�rieurs dans maints domaines, demeuraient toujours m�connus des �tudiants � l'ext�rieur de notre bassin traditionnel.
Lorsqu'il s'agit du recrutement d'�tudiants et d'�tudiantes des 2e et 3e cycles, il faut reconna�tre que ce sont ces derniers qui tiennent �le gros bout du b�ton�. Si nous ne sommes pas en mesure de faire en sorte que les �tudiants, o� qu'ils se trouvent au Qu�bec et qui veulent entreprendre leur formation en recherche puissent dire : � dans ce domaine c'est � Laval que je pourrai obtenir la meilleure formation �, je pense que nous serons en s�rieuses difficult�s.
La comp�tition est vive, la r�gion de Montr�al offrant par ses quatre universit�s un ensemble de programmes beaucoup plus vaste que ce que nous sommes en mesure d'offrir. La concentration de chercheurs dans ces quatre universit�s et dans les organismes de recherche priv�s et gouvernementaux qui les entourent, permet des alliances et, par voie de cons�quence, la cr�ation d'un grand nombre de centres de recherche interuniversitaires poss�dant une masse critique et des possibilit�s de d�veloppement qui d�passent largement nos capacit�s.
C'est ainsi que nous avons voulu recommander que �l'universit� assure la consolidation des groupes de recherche reconnus, et qu'elle identifie de nouveaux cr�neaux prioritaires de d�veloppement de la recherche vers lesquels elle concentrera ses ressources, incluant le recrutement des professeurs et le renouvellement du parc des �quipements scientifiques�.
Cette recommandation n'est pas rest�e lettre morte; six nouveaux centres de recherche ont �t� reconnus par la Commission de la recherche et le Conseil universitaire depuis le d�but du plan. Je crois qu'on peut pr�voir que trois ou quatre autres le seront d'ici 1997. Quelques postes de professeurs, � carac-t�re strat�gique, ont �galement �t� accord�s pour faciliter la consolidation et le d�veloppement de certains centres de recherche.
Pour faire suite � une autre recommandation du volet institutionnel du plan directeur, un institut d'�tudes sup�rieures a �t� cr�� dans le domaine des �tudes internationales, et tout laisse croire que nous aurons bient�t le plaisir d'assister � la naissance d'un deuxi�me dans les domaines de la g�n�tique et de la biologie mol�culaires et leurs applications. Les budgets d'investissements et de fonctionnement que n�cessitent ces deux projets sont relativement �lev�s, mais nous croyons vraiment que c'est ce qu'il faut faire pour atteindre le niveau d'excellence qui permettra � nos chercheurs de faire face � la comp�tition, et d'offrir � nos �tudiants des milieux de formation comparables � ce qui se fait ailleurs au Qu�bec et au Canada.
Par son budget d'appariements strat�giques, l'Universit� a permis � plusieurs chercheurs et groupes de chercheurs d'obtenir des subventions d'�quipements et d'infrastrucures dans diff�rents domaines; le nouveau laboratoire des sciences aquatiques est un autre bel exemple de ce que cette synergie nouvelle peut apporter afin de renforcer la position des chercheurs.
J'ai voulu �num�rer quelques-unes des r�alisations qui t�moignent de l'engagement de l'Universit� de permettre � ses chercheurs d'�voluer dans un monde difficile certes, mais toujours emballant. Il leur appartient maintenant de tout mettre en oeuvre pour continuer cette progression vers de nouveaux sommets acad�miques et scientifiques.
En pr�parant cette allocution, je me suis livr� � nouveau � l'exercice qui nous avait permis d'identifier ce que nous avions appel� � les nouvelles exigences de l'environnement �. Je rappelais plus t�t ce passage du volet institutionnel du plan directeur qui indiquait que les organismes subventionnaires imposeraient de nouvelles exigences; trois ann�es plus tard, nous pouvons affirmer sans l'ombre d'un doute que nous avions vu juste. Du cot� f�d�ral, plusieurs programmes sont n�s ou ont �t� modifi�s, qui sont venus justifier les gestes que nous avons pos�s pour renforcer la position de nos chercheurs. Nous ne savons pas encore de fa�on tr�s claire ce que l'avenir nous r�serve avec les trois grands conseils de recherche f�d�raux, mais d'ores et d�j�, nous croyons que les gestes pos�s nous permettront de faire face aux d�cisions � venir avec plus d'assurance et sans doute, plus de succ�s.
En ce qui a trait aux organismes subventionnaires qu�b�cois, vous et moi avons assist� � un renforcement de la tendance vers la recherche regroup�e en centres et en �quipes. Les messages les plus r�cents qui nous viennent du Fonds FCAR et du FRSQ laissent entrevoir de fa�on assez nette que cette tendance ira s'accentuant, et que le partenariat avec les universit�s deviendra une des r�gles de base des programmes �centres�.
Je crois sinc�rement que nous avons fait les bons choix et propos� les bonnes strat�gies lors de l'adoption du plan quinquennal. Bien s�r, nous aurions voulu faire plus en termes de red�ploiement des ressources humaines et mat�rielles n�cessaires pour consolider et d�velopper nos acquis en recherche, et am�liorer nos milieux d'encadrement pour les �tudes gradu�es. Mais, elles manquent ces ressources, et les grandes manoeuvres que nos gouvernements pr�parent en mati�re de support aux �tudes sup�rieures et � la recherche vont sans doute justifier une fois de plus les choix que nous avons faits et les priorit�s que nous avons retenues.
A deux ans et quelques mois de la fin de mon mandat au vice- rectorat � la recherche, j'ai envie de vous dire � quel point je suis heureux des progr�s marquants que nous avons connus au chapitre de la recherche et des �tudes gradu�es � l'Universit� Laval. Je peux m�me me permettre d'en parler avec fiert�, parce que nous savons tous, moi le premier, que ce sont les chercheurs et les �tudiants qui fa�onnent une universit�, et non pas le vice-recteur qui ne sera jamais rien d'autre qu'un promoteur, un facilitateur mais, disons-le aussi, un t�moin heureux de ce qu'il voit tout autour.
De fait, l'Universit� Laval est-elle devenue une universit� de recherche? Je vous donnerai ma r�ponse dans deux ans et quelques mois.