25 mai 1995 |
RESTRUCTURATION FACULTAIRE: LA FACULT� DE PHILOSOPHIE REFUSE DE PARTICIPER � LA CONSULTATION
Apr�s avoir pris connaissance d'une part de ce projet, d'autre part des modalit�s pr�vues pour la consultation de la communaut� universitaire, la Facult� de philosophie en est venue � la conclusion qu'il �tait inutile de participer � ce processus � la fois parce que celui-ci n'offre pas les conditions requises par une consultation s�rieuse, et parce que le document soumis � la consultation est contestable dans son principe m�me.
1. Absence de conditions favorables � une consultation s�rieuse de la communaut� universitaire
1.1.�� deux reprises r�cemment, le Fil des �v�nements a publi� une invitation "faite � tout membre ou � tout groupe de la communaut� universitaire int�ress� � proposer, d'ici le 1er mai, un avis �crit sur le document Projet de restructuration facultaire (rapport B�langer)". Mais la p�riode qui s'�tend entre le d�but d'avril et le 1er mai est celle o� les professeurs sont accapar�s par les travaux de fin de session et, le cas �ch�ant, par la pr�paration de communications pour les congr�s annuels de la fin du mois de mai et du d�but du mois de juin. Il en r�sulte que cette date tr�s h�tive du 1er mai constitue une entrave objective � la participation des professeurs au processus.
1.2.�Le fait que le Conseil universitaire ait refus� de prolonger ce d�lai sous pr�texte que le processus d'implantation durera deux ans pr�suppose qu'il y aura effectivement implantation, ce qui nous fait craindre que celle-ci ne soit d�j� d�cid�e et ait lieu quels que soient les r�sultats de la consultation, qui deviendrait ainsi une simple formalit�.
1.3.�Le fait que le Comit� de consultation soit sous le contr�le direct de la haute administration de l'Universit� laisse pr�sager, � notre avis, que les travaux de ce comit� pourraient �tre tout aussi orient�s a priori que l'�taient ceux du Comit� B�langer, comme on le verra ci-apr�s.
2. Un rapport contestable dans son principe m�me
2.1.�Le Comit� B�langer n'avait pas pour t�che d'�tudier la structure de l'Universit� et d'en �valuer la pertinence ainsi que l'efficacit�. La mission de r�duire le nombre des facult�s et �coles non rattach�es (et/ou leur pouvoir de repr�sentation) faisait express�ment partie de son mandat, ce qui signifie qu'un diagnostic avait d�j� �t� pos� sur cette structure avant m�me le d�but des travaux du comit�: par qui? comment? pourquoi?
2.2.�La cause �tant entendue � l'avance, cela permet de comprendre qu'on ne nous offre aucune �tude comparative et chiffr�e de la structure de notre universit� par rapport � celle d'autres universit�s du Qu�bec, du Canada ou de l'�tranger.
2.3.�Cela permet aussi de comprendre pourquoi le Comit� ne met en �vidence que les suppos�s d�fauts et lacunes de l'existence des facult�s: vision unilat�rale confirmant, s'il en �tait besoin, que celles-ci �taient condamn�es � l'avance, l'objectif �tant simplement d'accumuler des motifs cautionnant a posteriori cette condamnation.
2.4.�De plus, par un acte unilat�ral, les personnes qui se montrent favorables � la conservation des facult�s sont pr�sent�es par le Comit� comme des individus refusant le changement et cherchant � pr�server leurs int�r�ts personnels:
on disqualifie l'interlocuteur au lieu de r�pondre rationnellement � ses arguments, ce qui est d'autant plus inadmissible que cela se passe en milieu universitaire.
3. Conclusion
Le processus de consultation entourant le d�bat sur la structure de l'Universit� est d'autant plus inad�quat qu'il veut faire adopter � la vapeur ce qui �quivaut en fait � un chambardement complet de notre milieu; non seulement le rapport qui est l'objet de cette consultation est contestable en son principe m�me, puisqu'il a tout d'une �tude d�nu�e d'objectivit� et qu'il repose sur des conclusions donn�es � l'avance; -- mais encore, et il est triste de le constater, il est une insulte � l'intelligence de la communaut� universitaire. On nous pr�sente en effet comme une op�ration de d�centralisation ce qui, en r�alit�, en est exactement l'inverse: la plus grande tentative de centralisation � laquelle nous ayons jamais assist�. Dans ce contexte, nous sugg�rons � tous les membres de la communaut� universitaire de ne pas participer � cet exercice de consultation dont il est � craindre qu'il ne serve qu'� donner bonne conscience � ceux qui ont d�j� tout d�cid� � notre place.
LES PROFESSEURS DE LA FACULT� DE PHILOSOPHIE =============
Renvoi d'ascenseur
Mercredi le 10 mai dernier, � 13 h 30, le Centre mus�ographique de l'Universit� Laval a re�u un groupe de douze visiteurs dont cinq �taient en fauteuil roulant. Lorsque l'ascenseur s'est arr�t�, au rez-de-chauss�e du pavillon Louis-Jacques Casault, un Homo sapiens sapiens bip�de, v�tu d'un joli complet-veston, s'y trouvait. Apr�s l'entr�e des deux premi�res personnes, le bip�de, n'en pouvant plus, s'est impatient�, et il a demand� qu'on monte puisqu'il �tait press�. �ric a recul� son fauteuil... Les gens qui font preuve de b�tise se trouvent partout apparemment.
Suzanne Press�
Centre mus�ographique
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UNE POLITIQUE QUI VA FAIRE UN TABAC
Coordination Sant� et s�curit� du travail
3384, pav. Bonenfant
Objet: politique concernant l'interdiction du tabac � l'Universit�.
Mesdames, Messieurs,
Je profite de l'invitation lanc� dans le Fil du 20 avril dernier pour vous faire conna�tre mon avis sur la politique que vous proposez en mati�re de lutte contre le tabagisme.
L'interdiction totale que vous envisagez, avec pour seule exception les chambres d'�tudiants, est abusive et irr�aliste. Il conviendrait de pr�voir dans chaque pavillon deux ou trois fumoirs, pourvus d'une a�ration particuli�re s'ils n'ont pas de fen�tre. En revanche, il va de soi qu'on ferait respecter l'interdiction partout ailleurs de fa�on rigoureuse.
�tant donn� le climat du Qu�bec, l'interdiction frappant tous les lieux couverts du campus (m�me les tunnels!) �quivaut pour une tr�s large partie de la population de l'Universit� � l'obligation de s'abstenir compl�tement toute la journ�e, donc � l'obligation d'arr�ter tout net de fumer.
Vous avez sans doute fait de savantes �tudes sur les m�faits du tabac, et je serais surpris que vous n'ayez trouv� mention nulle part du fait que des millions de fumeurs ont essay� sans succ�s de renoncer � la cigarette. M�me si ces personnes peuvent �tre trait�es de p�cheresses, d'�mes faibles et de pitoyables aveugles, je vous ferai observer que rien dans nos lois ne fait d'elles des criminels et que le tabac est toujours en vente libre. Il est tyrannique de leur imposer un stress extr�mement p�nible.
Je connais par exp�rience les m�faits du tabac et ne puis qu'appuyer les mesures qui visent � r�duire l'usage de ce produit nocif, en particulier celles qui �cartent la jeunesse de ce pi�ge. Par ailleurs, je demeure tr�s sceptique quant � la possibilit� d'extirper le Mal de notre plan�te en y exer�ant la dictature de la raison. Puisque vous vous engagez dans ce sens, je vous sugg�re par exemple de pr�lever une taxe � l'entr�e du campus sur toutes les personnes qui veulent y p�n�trer en voiture alors qu'elles habitent � distance raisonnable ou qu'elles sont bien situ�es sur le r�seau des transports publics. Ces gens-l� font un tort consid�rable � leur sant� en ne marchant pas, ce qui finit par co�ter cher au tr�sor public;
elles empoisonnent l'air au ras du sol et bousillent la couche d'ozone, sans parler de la pollution par le bruit et de la d�gradation du tissu urbain rong� par les autoroutes.
Luttons contre le tabagisme, d'accord, mais sans tomber dans la Croisade. On se rassure � peu de frais devant l'�tat inqui�tant du monde en faisant la guerre � un beau petit ennemi absolument m�chant et facile � identifier tandis que perdurent d'autres probl�mes infiniment plus graves et plus angoissants. � une �poque on a tout r�gl� en prohibant l'alcool, maintenant c'est l'air sans fum�e qui procure la paix de l'�me et le bonheur de la soci�t�.
Nous avons juste � c�t� de chez nous une exemple qui illustre ce propos. Nulle part la vertu en mati�re de nicotine ne s'exprime avec plus d'�clat qu'aux �tats-Unis; au rythme o� vont les choses, tous les habitants de ce pays auront bient�t vu la Lumi�re. Ils continuent � s'acheter des mitraillettes comme d'autres ach�tent des chemises, leurs enfants se munissent d'un r�volver en partant pour l'�cole, une bonne partie de la population vit dans une mis�re pire qu'au Pakistan tandis qu'une infime minorit� accapare le quart de la richesse collective et qu'on coupe dans l'�ducation et les d�penses sociales, mais le principal est acquis et les Am�ricains peuvent avoir la conscience tranquille: bient�t ils ne fumeront plus (� part l'opium et ses d�riv�s).
Veuillez agr�er, Mesdames et Messieurs, l'expression de mes sentiments tr�s distingu�s.
Raymond Joly
D�partement des litt�ratures
Facult� des lettres
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NAZISME AUX COULEURS TROPICALES
Le texte �Burundi: une arm�e contre l'espoir� paru dans l'�dition du Fil du 27 avril utilise parfois un jargon que seul un habitu� de certains milieux burundais peut d�coder. Peut-il pr�ciser ce qu'il entend par �les enfants de la pi�tre noblesse de la caste tutsi?� Quand il parle de la �population� face � l'arm�e, ne d�signe-t-il pas les milices g�nocidaires qui se heurtent � l'arm�e nationale? Lorsqu'il parle d'espoir, de quel espoir s'agit-il? S'agit-il de l'espoir d'exterminer les minorit�s ethniques et politiques comme cela s'est r�alis� en partie au Burundi en octobre 1993 et presque enti�rement au Rwanda en avril 1994?
L'arm�e nationale du Burundi est vilipend�e parce qu'elle constitue le principal obstacle � l'ach�vement du g�nocide commenc� en octobre 1993. Ce n'est pas un hasard si au Burundi il y a eu moins de morts qu'au Rwanda, c'est parce que l'essentiel de l'arm�e nationale ne s'est pas, comme au Rwanda, rang� du m�me c�t� que les milices g�nocidaires. Si quelques membres de cette arm�e ont commis des crimes, cela ne justifie pas sa diabolisation globalisante.
Les fours cr�matoires de Kibimba, Butezi et Rango o� des enfants tutsi ont �t� br�l�s vifs en octobre 1993 sont l'oeuvre des milices du Frodebu (parti au pouvoir) et du Palipehutu (un parti interdit au Burundi qui a �t� condamn� par la CEE en janvier 1992). Ces m�mes milices ont �galement perp�tr� le g�nocide organis� des Tutsi et des Hutu de l'opposition sur les trois quarts du territoire du Burundi: massacres dans les communes de Mwumba, Ruhororo, Vyerwa, Buye, Gashikanwa, Kiremba, Nyamurenza, Muhanga, Tangara, Rango, Gahombo, Muhuta, Banga, Kirundo, Vumbi, Bwambarangwe, Muyinga, Butihinda, Rutegama, Bukeye, Mbuye, Musigati, Mubimbi, Isale, Gitega, Bukirasazi, Buraza, Gishubi, Ryansoro, Bugendana, Gasorwe, Mwakiro, Gashoho, Buhinyuza, Giteranyi, Karusi, Nyabikere, Bugenyuzi, Buhiga, Gitaramuka, Mutumba, Shombo, Ruyigi, Gisuru, Nyabitsinda, Butaganzwa, Bweru, Moso...
Le g�nocide, ce crime de l'homme contre lui-m�me, d�guis� dans certains m�dias sous l'expression de �massacres interethniques� ne s'explique pas et ne se justifie pas. Ce n'est pas l'oeuvre de la �population� en lutte contre l'arm�e nationale. Le terme �population� est utilis�, dans le jargon de certains milieux, pour garder l'anonymat dans le crime et d�courager l'investigation alors que les responsables et leurs m�thodes sont connus et impunis pour la plupart.
Il est dommage qu'au moment o� l'on c�l�bre la lib�ration des camps de concentration nazis, on voit appara�tre des �crits meurtriers incitant � la haine ethnique. L'extermination des minorit�s ethniques et politiques par la �population� n'est pas la d�mocratie mais bien du nazisme aux couleurs tropicales, une barbarie rappelant la solution finale.
Kateretse Salvator
�tudiant burundais
� l'Universit� Laval
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MISE AU POINT DU DOYEN NABIL KHOURY
Dans un commentaire intitul� ��Un m�pris universitaire�� (Au fil des �v�nements, 20 avril 1995), Louis O'Neill s'attaque aux id�es exprim�es, quinze jours plus t�t dans le m�me hebdomadaire, par Jacques Saint-Pierre, professeur � notre Facult�, dans le cadre du d�bat continu entre souverainistes et f�d�ralistes.
Dans sa d�nonciation, monsieur O'Neill consacre un paragraphe aux relations de la Facult� avec le r�gime Pinochet du Chili des ann�es 70. Le lien entre le ��m�pris�� dont ferait preuve notre coll�gue Saint-Pierre envers les qu�b�cois, la direction de la Facult� des ann�es 70 et la dictature Pinochet n'est pas �tabli.
Je dois rappeler les faits�:
1) Notre coll�gue Jacques Saint-Pierre n'a jamais �t� m�l� au projet P�CANA et n'�tait pas � l'�poque membre de la direction de la Facult� ni de celle de son d�partement;
2) Le projet d'�changes canado-andin en administration (P�CANA) fut mis sur pied par l'ACDI � la demande d'ESAN, une �cole de formation de cadres, de Lima, P�rou. Le projet, qui d�buta en 1976, pr�voyait des �changes de professeurs et d'�tudiants entre le Canada et les pays du Pacte andin, ainsi que des projets de recherche et de d�veloppement rural;
3) L'ACDI d�signa l'Universit� Laval comme ma�tre d'oeuvre du projet, et la chargea aussi de pressentir les universit�s canadiennes comme source de coop�rants ou comme lieux de s�jour des boursiers. � son tour, Laval signa un contrat avec l'ESAN, responsable de la r�partition des ressources parmi les pays andins et du choix des institutions b�n�ficiaires;
4) En 1977, l'ACDI demanda au P�CANA de se retirer des pays qui n'�taient plus �ligibles � l'assistance canadienne pour des raisons politiques ou �conomiques�:�le Chili, l'�quateur et le V�n�zuela. Aussi, lorsque l'ACDI fit passer le projet de la direction des programmes r�gionaux � la direction bilat�rale, des ententes-cadres furent sign�es par le gouvernement canadien avec la Bolivie, la Colombie et le P�rou. Jamais la Facult� des sciences de l'administration ou l'Universit� Laval n'ont eu affaire avec le gouvernement du Chili ou avec ses repr�sentants;
5) Au total, 13 professeurs et sp�cialistes canadiens, 8 professeurs et 24 boursiers et chercheurs latino-am�ricains ont particip� au projet. Huit institutions latino-am�ricaines et autant d'universit�s canadiennes ont profit� de ces �changes et des contacts intellectuels, culturels et humains qui les ont entour�s.
La Facult� est fi�re de sa participation au P�CANA et des retomb�es de ce projet. Je trouve d�plorable que M. Louis O'Neill nous la reproche encore, vingt ans plus tard, et qu'il associe � ce projet sa critique du point de vue constitutionnel de Jacques Saint-Pierre.
NABIL KHOURY
Doyen de la Facult� des
sciences de l'administration