25 mai 1995 |
AFRIQUE : la d�mocratie en marche?
Dans la foul�e des �v�n�ments de l'Est qui ont provoqu� la chute du mur de Berlin, ainsi qu'� la suite des appels pressants de l'Occident qui conditionnait le versement de son aide � la mise en place d'un processus d�mocratique, plusieurs pays africains ont amorc� un virage vers le pluralisme politique. Au cours d'un colloque, organis� d�but mai par le D�partement de science politique et le Centre Sahel de l'Universit� Laval, des chercheurs et des �tudiants ont trac� � grands traits le nouveau portrait politique de nations, peu r�put�es jusqu'� pr�sent pour leur esprit d�mocratique. Si tous ont soulign� la mise en place de proc�dures administratives visant � favoriser la reprise du dialogue, ils ont �galement constat� que certaines promesses demeuraient encore vaines.
�La d�mocratie n'est ni pour aujourd'hui, ni pour demain. Elle n'est pas compatible avec la r�alit� bantoue.� Lorsqu'Omar Bongo, le pr�sident gabonais a prononc� ce discours en 1989, il ne se doutait pas qu'une crise �conomique sans pr�c�dent et la contagion du vent de l'Est allait l'obliger � accepter un nouveau contrat social. Un contrat social, comme l'expliquait Gervais Oniane, �tudiant au doctorat, qui comprenait notamment la libert� de presse et d'association, ainsi que l'organisation d'�lections l�gislatives. Un rassemblement des forces d�mocratiques du pays pr�sente alors son leader aux �lections pr�sidentielles de juin 1993. Le vote se d�roule dans une atmosph�re de fraude �lectorale et le pr�sident sortant, contre toute attente, proclame sa r��lection. Le candidat de l'opposition a finalement d�cid� de se d�sister pour r�clamer de nouvelles �lections, tandis que pendant ce temps, l'�lection d'Omar Bongo �tait l�gitim�e. Ce qui fait dire � Gervais Oniane que la d�mocratie africaine a peut-�tre plus de chance de r�ussir en s'appuyant sur les syndicats ind�pendants et les Organisations non gouvernementales que sur les leaders d'opposition.
Au Niger, les d�mocrates ont appris � se m�fier des structures formelles cens�es promouvoir le pluralisme. Ainsi la conf�rence nationale souveraine, qui devait favoriser un v�ritable d�bat de soci�t�, �tait compos�e de repr�sentants de groupes dont le nombre ob�issait plus � la r�gle des quotas qu'� celle de la libre expression. Selon Pearl Robinson, professeur dans une universit� nig�rienne, les groupes de femmes avaient peu de chances de faire valoir leur int�r�ts, seulement trois noms f�minins se retrouvaient sur la liste de la Conf�rence. De plus, une loi nig�rienne interdit aux partis politiques de d�fendre les positions d'une r�gion, d'une ethnie, d'une religion ou d'une race particuli�re. � entendre la conf�renci�re, certaines r�gions peuvent souffrir de ce manque de repr�sentation, de la m�me fa�on que certains citoyens, comme les paysans, ne disposent pas de tribunes pour exprimer leur point de vue. De plus, une future constitution devrait prendre en compte le r�le de l'arm�e, a rajout� Pearl Robinson, sous peine de pratiquer la d�mocratie la t�te dans le sable. Trop souvent en effet, les militaires s'institutent arbitres supr�mes de la vie politique en Afrique, pour qu'ils acceptent sans broncher de n'assumer aucune responsabilit� dans l'appareil politique.
Pascale Gu�ricolas