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9 f�vrier 1995  |
LES SENTINELLES DU SOL
D'humbles vers de terre pourraient aider les environnementalistes � d�tecter la pr�sence de contaminants dans les sols. Autrefois, lorsque les mineurs descendaient dans des galeries souterraines, ils apportaient avec eux des canaris en cage pour d�tecter la pr�sence de gaz toxiques inodores. Quand les canaris rendaient l'�me, il �tait grand temps pour les mineurs de remonter. Il semble que ce r�le de thermom�tre biologique de toxicit� environnementale ne soit pas r�serv� qu'aux canaris. En effet, les vers de terre pourraient �tre mis � contribution pour d�tecter de faibles doses de contaminants dans les sols. C'est du moins ce que tentent de d�montrer, avec un certain succ�s jusqu'� maintenant, deux chercheurs associ�s � la Facult� de m�decine, Guy Poirier et Denis Nadeau, de l'Unit� de recherche en sant� et environnement du CHUL.
``La technique que nous utilisons a d�j� �t� mise � l'essai avec d'autres esp�ces, notamment avec certaines esp�ces de poissons pour �valuer la toxicit� de l'eau, dit Denis Nadeau. Il appara�t que personne n'a encore fait appel aux vers de terre pour d�terminer la g�notoxicit�, en doses subl�thales, de contaminants dans le sol.'' Souvent, dans des �tudes environnementales, la pr�sence de contaminants est d�cel�e par une mortalit� massive de certaines esp�ces. Le type et l'abondance des contaminants peuvent ensuite �tre d�termin�s par analyses chimiques. Les polluants sont malheureusement fort nombreux et s'il fallait doser tous les types possibles de produits, la facture atteindrait rapidement des sommes exorbitantes. C'est l� qu'interviennent les vers de terre.
``Les vers de terre agissent comme des d�tecteurs non sp�cifiques des polluants et indiquent une qualit� g�n�rale acceptable des sols, explique Denis Nadeau. Et ils ne co�tent pas tr�s cher.'' La m�thode d�velopp�e par l'�quipe des deux chercheurs de la Facult� de m�decine tire profit du fait que de nombreux polluants ont un effet sur l'ADN des vers de terre. Certains polluants des familles des HAP, BPC et de certains insecticides se lient � l'ADN ou � l'ARN et forment des ``adduits''. En isolant l'ADN, en le segmentant et en utilisant une technique de marquage radioactif des adduits, la pr�sence de contaminants peut �tre �tablie assez rapidement.
Les chercheurs ont r�cemment mis leur technique � l'�preuve dans leur laboratoire en pla�ant des vers de terre dans des �chantillons de sols pr�lev�s sur des sites contamin�s de Qu�bec et de Montr�al. Les r�sultats montrent que le nombre d'adduits augmentent rapidement avec le s�jour dans la terre et que les vers constituent de bons bioindicateurs de la toxicit� des sols. Parall�lement � ces travaux, ils tentent de mettre au point une m�thode encore plus rapide faisant appel uniquement � certaines cellules du vers de terre qui seraient plac�es dans un milieu de culture contenant des contaminants.
Une firme qu�b�coise, sp�cialis�e dans la d�contamination des sols s'est montr�e tr�s int�ress�e par leurs travaux. Les vers lui permettraient d'effectuer, � peu de frais, le suivi de la d�contamination d'un site. Un projet de recherche conjoint pourrait voir le jour sous peu.
JEAN HAMANN
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