20 avril 1995 |
Colloque du G�TIC
UNE PARABOLE POLAIRE
Quelques r�ponses all�goriques � une question �hypoth�tique�:
jusqu'ou devrait aller le processus de francisation des Inuit anglophones dans un Qu�bec souverain?
�Il est �vident que dans un Qu�bec souverain, le fran�ais constituera la seule langue d'usage. M�me si, au d�but, pour des raisons tactiques, certaines concessions linguistiques devront �tre consenties aux minorit�s d'origine anglophone, ces concessions seront difficilement justifiables dans le cas des minorit�s allophones ou autochtones. Assez rapidement d'ailleurs, l'usage de l'anglais perdra de son importance, et une fois l'ind�pendance bien assise, les concessions linguistiques seront, en toute probabilit�, retir�es.� C'est ce qu'a affirm� Louis-Jacques Dorais, professeur au D�partement d'anthropologie et l'un des conf�renciers au colloque Nord-Laval en sciences humaines organis� par le Groupe d'�tudes inuit et circumpolaires (G�TIC) qui a eu lieu le 8 avril. D'entr�e de jeu cependant, le chercheur a pris bien soin de pr�ciser que ces r�flexions sur la place des Inuit dans un Qu�bec �ventuellement souverain ne r�fl�taient pas n�cessairement ses propres opinions. En fait, c'est � la suite d'une conversation avec un chercheur de l'UQAM, � qui le gouvernement venait de commander une �tude sur la francisation des Inuit du Qu�bec, que Louis-Jacques Dorais a �labor� ce discours qu'il qualifie de "parabole politique". Dans l'optique d'un Qu�bec souverain donc, il serait inconcevable que les Inuit puissent continuer � utiliser l'anglais comme langue seconde, notamment parce que l'usage courant de cette langue pourrait faciliter et renforcer leurs liens avec leurs cong�n�res du Nunavut, du Labrador et du Groenland. �� un moment o� le respect de l'int�grit� territoriale du Qu�bec rev�tira une importance cruciale, il faudra emp�cher que les Inuit jouent le r�le d'une cinqui�me colonne pouvant remettre en cause le rattachement du Nunavik au territoire qu�b�cois, par le biais d'alliances ethniques non contr�l�es par le gouvernement du pays.�
Des Qu�b�cois comme les autres
Dans ce processus de francisation des Inuit, le minist�re de l'�ducation devra sans doute retirer � la Commission scolaire Kativik le droit d'enseigner en anglais. De son c�t�, l'Office de la langue fran�aise aura � mettre rapidement sur pied des programmes de francisation s'adressant aux entreprises, administrations et autres organismes publics inuit. Sera-t-il n�cessaire de retirer aux Inuit le droit � l'usage de leur langue � l'�cole? s'interroge Louis-Jacques Dorais. Si le Parti Qu�b�cois garantit ce droit depuis la promulgation de la Charte de la langue fran�aise, le p�re de cette Charte, Camille Laurin, laisse pourtant sous-entendre que le support officiel � l'enseignement en langue d'origine ne devrait s'appliquer qu'aux autochtones ayant pr�serv� l'authenticit� de leur culture. Mais les Inuit correspondent-ils encore � cette d�finition? �Le gouvernement d'un Qu�bec souverain sera sans doute oblig� de normaliser ses populations nordiques, en leur donnant tous les outils dont ils auront besoin pour devenir des Qu�b�cois comme les autres, et en leur retirant des droits qui pourraient retarder la r�alisation de cet objectif�, argue Louis -Jacques Dorais.
Conclusion de ces propos purement all�goriques: les politiques de francisation et de normalisation des autochtones appliqu�es dans un Qu�bec souverain ne conduiront sans doute pas � une situation de type stalinien ou hitl�rien, mais elles risquent toutefois de mener, et ce sans qu'on s'en rende compte, � un certain d�ni des droits de la personne. �Mais apr�s tout, les Qu�b�cois se sont fait marcher sur les pieds depuis tellement longtemps qu'il est peut-�tre temps qu'ils commencent � marcher sur ceux des autres.�
REN�E LAROCHELLE
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