9 juin 1994 |
L'�pisiotomie remise en question
Cette pratique m�dicale courante favoriserait, dans certains cas, les probl�mes qu'elle devrait pr�venir.
Une �tude r�alis�e par des chercheurs de la Facult� de m�decine de l'Universit� Laval montre que l'�pisiotomie, une intervention chirurgicale tr�s fr�quemment pratiqu�e chez les patientes au moment de l'accouchement dans le but de faciliter la sortie du b�b� et de pr�venir les d�chirures du p�rin�e chez la m�re, multiplie par trois les risques de d�chirures s�v�res du p�rin�e. L'�pisiotomie est r�alis�e en pratiquant une incision entre la vulve et l'anus et, encore aujourd'hui, cette intervention est pratiqu�e de fa�on routini�re dans les salles d'accouchement. L'�tude r�alis�e par Michel Dallaire, Annie Tremblay, Lucie Baillargeon, Michel Labrecque, Jean-Jacques Pinault et Suzanne Gingras, a port� sur 6522 femmes ayant accouch� pour la premi�re fois � l'H�pital du Saint-Sacrement de Qu�bec entre janvier 1985 et mai 1993.
Parmi les femmes � l'�tude, 4390 (67,3%) ont subi une �pisiotomie m�diane, ce qui d�montre bien le recours encore tr�s fr�quent � cette intervention. Les m�decins ont diagnostiqu� des d�chirures s�v�res du p�rin�e chez 1 002 (15,4%) des 6522 patientes. Parmi les femmes qui ont subi une �pisiotomie au moment de l'accouchement, cette proportion est de 20,6% alors qu'elle n'est que de 4,5% chez celles qui n'ont pas subi cette intervention. Une fois tous les autres facteurs pris en consid�ration, notamment l'usage des forceps et des ventouses, le poids du b�b� et l'exp�rience du m�decin, le risque de conna�tre des d�chirures graves du p�rin�e � la suite d'un accouchement est approximativement trois fois plus �lev� pour les femmes qui ont eu une �pisiotomie que pour celles qui n'ont pas eu d'�pisiotomie.
� l'H�pital du Saint-Sacrement, on a observ�, au cours des derni�res ann�es, une r�duction importante des interventions m�dicales (�pisiotomie, forceps) lors des accouchements par voie vaginale et la fr�quence des d�chirures graves du p�rin�e a �galement diminu�. En 1985- 1987, 78% des femmes qui accouchaient d'un premier enfant � cet h�pital subissaient une �pisiotomie alors qu'en 1991-1993, il n'y en avait plus que 56% . Pendant la m�me p�riode, la fr�quence des d�chirures graves passait de 17,2% � 12,6%. Les chercheurs concluent que si l'�pisiotomie est restreinte aux cas o� elle est vraiment justifi�e, il y a r�duction de l'incidence des d�chirures du p�rin�e.
Ces r�sultats ont �t� pr�sent�s dans le cadre de la 6e Journ�e qu�b�coise de la recherche en m�decine familiale qui se d�roulait le 27 mai � Sainte -Foy. Organis� par le D�partement de m�decine familiale de l'Universit� Laval, avec la collaboration de la F�d�ration des m�decins omnipraticiens du Qu�bec et le Groupe qu�b�cois de la recherche en m�decine familiale, cet �v�nement avait pour th�me ``Favoriser la recherche interdisciplinaire''.
Pourquoi les m�decins continuent-ils � pratiquer des �pisiotomies si cette intervention accro�t les probl�mes qu'elle est sens�e pr�venir?
''L'�pisiotomie n'est pas � proscrire totalement, a pr�cis� le professeur Michel Labrecque, lui-m�me un m�decin de famille qui pratique des accouchements. Lorsque la vie du b�b� est en danger et qu'il faut le sortir rapidement, l'�pisiotomie est justifi�e. C'est plut�t l'�pisiotomie de routine qu'il faut remettre en question mais la pratique m�dicale est prudente face aux changements. Il y a trente ans, les m�decins endormaient encore les femmes au moment o� elles donnaient naissance � leur enfant Il y a dix ans � peine, les m�decins croyaient qu'une femme qui avait eu une c�sarienne devait forc�ment avoir des c�sariennes pour tous ses accouchements successifs: c�sarienne un jour, c�sarienne toujours. Heureusement, la pratique se remet en question ce qui am�ne des changements. C'est par la pr�sentation de r�sultats de recherche dans des rencontres scientifiques comme celle-ci et en diffusant de l'information dans la population que les choses �voluent. ''
Jean Hamann
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