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29 septembre 1994 ![]() |
Le silence des agneaux
Le Parti lib�ral du Qu�bec ferait une erreur s'il se donnait une position constitutionnelle. C'est un professeur de science politique de lUniversit� Laval qui le dit. Le Qu�bec n'a pas le droit de faire l'ind�pendance sans l'accord du Canada. Et c'est le m�me professeur de science politique qui le dit.
Aux yeux de Jean-Pierre Derriennic, en effet, la raison pour laquelle le PLQ ne doit absolument pas s'afficher est la suivante: voter oui � l'ind�pendance, ce serait voter pour un programme bien d�fini. Par contre, voter non, ce ne serait pas voter pour un programme. Par cons�quent, nul n'a rien � attendre du PLQ -une curieuse raison, diront certains, pour voter tout court.
Jean-Pierre Derriennic participait lundi soir � la premi�re soir�e de la deuxi�me saison de l'antenne �locale� de la revue Cit� libre. Il faut dire que quand on assiste � une soir�e Cit� libre, on sait � quoi s'attendre -sp�cialement si le sujet tourne autour de la politique qu�b�coise. L'id�ologie de la revue est bien connue, et Jean-Pierre Derriennic n'a pas fait myst�re, d�s le d�but de son expos�, de sa pr�f�rence pour une victoire du non. Quant au chef de file des �cit�libristes� de Qu�bec, Max Nemni, du D�partement de science politique, qui agissait encore une fois comme ma�tre de c�r�monie, il est sans doute l'un des d�fenseurs du f�d�ralisme les plus actifs du campus. Certains se rappelleront qu'il s'�tait clairement affich� en faveur du oui � l'entente de Charlottetown, en octobre 1992, avant de se raviser et de pr�coniser un non -la semaine m�me o� Pierre Trudeau prononcait son c�l�bre discours pour le non.
Lundi soir, au restaurant du Mus�e du Qu�bec, il y avait bien un second conf�rencier, R�jean Pelletier, lui aussi professeur de science politique a Laval, pour pr�senter �l'autre� fa�on d'analyser l'ann�e politique qui s'amorce, mais il ne faisait pas le poids aux yeux d un auditoire qui, en grande majorit�, �tait d�j� acquis aux arguments de Derriennic.
�Le PLQ sera sur la d�fensive et devra se compromettreX, a affirm� R�jean Pelletier, prenant ainsi le contrepoint de son coll�gue. Il ne pourra pas s'en tenir � une position constitutionnelle trop vague�, sp�cialement apr�s sa s�rie d'�checs, de Meech � Charlottetown.
Les deux conf�renciers ont profit� du temps qui leur �tait allou� pour �chafauder, comme cela leur avait �t� demand�, quelques sc�narios plausibles advenant un oui ou un non, mais Jean-Pierre Derriennic est rapidement sorti du cadre impos� en mettant carr�ment en doute la l�gitimit� m�me d'un r�f�rendum. Et il n'a pas h�sit� � faire sienne la position pour le moins controvers�e du Parti �galit�, selon laquelle une majorit� de Qu�b�cois n'aura pas le droit de faire l'ind�pendance, tant qu'une majorit� de Canadiens n'aura pas donn� son accord.
�Comme l'Alg�rie, a-t-il donn� en exemple. L'Alg�rie est devenue ind�pendante apr�s un double r�f�rendum, un en France et un en Alg�rie.�
Curieux retour des choses: il y a 20 ans, les ind�pendantistes comparaient le Qu�b�cois � un �colonis� pour justifier leur lutte. Les f�d�ralistes s'appr�teraient-ils � prendre en exemple les pays colonis�s?
Avis aux int�ress�s: Cit� libre est toujours � la recherche de collaborateurs. Pas besoin, rappelle-t-on, d'�tre de grands auteurs pour pouvoir y �crire.
PASCAL LAPOINTE